Raser gratis ? Cette expression viendrait d'un barbier qui avait placé jadis une pancarte proclamant ladite formule…Mais notre artisan, tout aussi fûté que près de ses sous, l'y laissait tous les jours. Par conséquent, le naïf qui, le lendemain du jour où il avait vu la pancarte pub, venait se faire raser ou couper les cheveux et qui s'étonnait de devoir quand même payer, s'entendait répondre : "Oui, mais il y a écrit que c'est demain que c'est gratuit !". Aujourd’hui encore, notamment en politique, les promesses des personnalités en vue n'engagent que ceux qui les écoutent sans faire appel à leur libre-examen…Ce n’est pas le cas ici. Où on s'efforce plutôt de manier le mot à couper la langue de bois .

vendredi 8 octobre 2010

Médiacratie : c’est un enfant de la télé qui joue au papa de la Flandre (en attendant la “ Révolution des Gaufres”)


A-t-on assez photographié combien la politique belge a viré “people” ? 
Au point que la publication-compilation de certains “off” journalistiques, plus révélatrice que bien des analyses de politologues, mais jugée un peu hard par une société belge devenue politiquement douillette, en arrive aujourd’hui à presque gommer les enjeux de fond ?
Au point qu’il faut souligner et rappeler -puisque c'est très méconnu au Sud - que l’homme le plus important du pays l’est en grande partie grâce à… un jeu télévisé ?
Si la NV-A, en négociations, est dans l’impossibilité de donner quelque réponse quant au coût, au fonctionnement, aux conséquences pratiques de ses exigences, son leader, Bart De Wever peut par contre, lui, brillamment tout dire aux télespectateurs flamands de Laurent Nkunda (rébellion au Congo) ou de la physique quantique.
Car Bart de Wever fut, semaine après semaine, en 2009, un  redoutable “quizzer” du “ Slimste Mens” ( L’homme le plus intelligent), le jeu très regardé de la VRT.
Par son humour à froid, sa culture, son côté bien-de-chez-ons, Bart  y gagna non seulement- quoiqu’il tempère le phénomène aujourd’hui- une popularité, mais aussi  ce bonus hyper-précieux pour tout candidat qu’est de se faire apprécier sous un tout autre angle que celui du pur politique si déprécié.
Certes, De Wever a du talent et du charisme, certes Yves Leterme l’a  puissamment aidé en devenant la risée du pays:  il n’empêche qu’il faut toujours se rappeler que c’est une grande première en ce pays qu’un jeu télé contribue ainsi à faire soudain d’une toute petite formation le premier parti du Royaume. Avec une flopée de parlementaires inconnus qui ne doivent pour une grande part leur siège qu’au fait d’avoir été portés par la vague de popularité du “Slimste Mens”.
La Médiacratie pointa jadis le nez en Flandre avec Jean-Pierre Van Rossem, le fumeux-escroc milliardaire. Depuis, selon la formule consacrée au Nord, il y eut le phénomène D.D.D.
Entendez, les trois D comme Dewinter (Vlaamse Blok-Belang), Jean-Marie De Decker (éphémère succès du LDD) et De Wever, l’aventurier de la  surnommée “Nieuw Vlaamse Avontuur”. Tous des enfants des medias et de la télé.
Avec d’ailleurs les recettes à succès ad hoc. Prenez n’importe quel discours de Bart De Wever, à commencer par celui ou, pour sortir du labyrinthe ou il se trouvait un peu perdu sans les libéraux, il annonce qu’il retourne cata-carrément à l’entrée. C’est toujours, au dela du crash négatif, une com’ finalement optimiste, toujours positive, en laissant inévitablement briller tout plein de lueurs d’espoirs. Un truc dont la griffe, la paternité revient, selon ses anciens collègues de la VRT, à Siegfried Bracke, le nouveau ténor médiatique de la NV-A.(voir la vidéo ou il contrôle la com) Qui, lorsqu’il gérait encore l’info à la télé flamande, positivait déja à tout va, "même si Wall Street s’écroulait en cendres". Une recette que Bart applique d’évidence à la lettre, en arrivant ainsi à dire forcément tout et son contraire. A s’étendre, par exemple, sur toutes les concessions qu’il fait. A l’en croire aussi énormes, aussi impressionnantes que le monstre du Loch-Ness: mais que nul ne voit réellement non plus.
A-t-on aussi fait attention au vocabulaire ? A tous ces mots qui créent , en psy, la “figure du père” ?  Si, l’autre jour, De Wever qualifiait ainsi avec paternalisme les négociations de “jeux enfantins”, il en a dit bien d’autres du genre: c’est récurrent dans son discours. Comme expliquer que la Wallonie c’était, dans le fond, une sorte de “Tanguy” à la Chatiliez .
 “Une région grand dadais à qui les parents ont payé un appartement mais qui préfère rester, à 30 ans, dans le confort et à charge de ses parents”, a-t-il un jour lâché en substance.
Bart,  ça se veut donc quelque part le “papa” de la Flandre. Ou, à tout le moins, pour les flamands "quelqu'un de bien de chez nous", qui les représente fort bien. Avec un côté “boss”. Celui qui fait un peu la leçon à tout le monde, qui bouscule (pas toujours à tort) tous les protocoles, qui se fiche de son propre Médiateur Royal et annonce himself qu’il se rendra au Palais comme si c’était une étude notariale chargée de prendre acte de sa décision.
Certes, ce ne sont pas des actes très lourds de conséquences, encore que, sur ce coup-ci, Albert 2  ait montré clairement par sa surdité qu’il appréciait peu que Bart veuille dicter son agenda.  Mais cela en jette en tout cas assurément un max auprès d’une certaine opinion flamande: même si on est loin  de cette “Révolution des Gaufres” * qui le verrait entrer dans l' histoire comme le Premier Président d'une Flandre autonome.

* " Révolution des Gaufres", formule surgie au Nord sur base du jeu de mots " Bart de Wafel"...