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Balise Médiapolitique parue dans Marianne Belgique du 27/07/2013
Le prochain 21 juillet, on en sera au 56ème jour d’après le
grand rebattage de toutes les cartes électorales (on vote le 25/5/2014) Et
donc, très probablement, de crise politique.
La Belgique étant le pays des
grandes émotions particulièrement fugitives, que restera-t-il alors de
l’actuelle “fièvre de l’hermine” (expression flamande très significative), de
ce grand show de communication et d’auto-glorification? Qui a, notamment, vu ce
phénomène singulier d’hommes politiques dans le déni même de leur propre
représentation politique. Histoire de complaire à une opinion publique si mal
informée qu’elle croit encore volontiers au roi-thaumaturge. Lequel, de nos jours,
ne guérirait plus les fistules purulentes des écrouelles, mais ferait
s’évaporer la dette publique et recréerait une mythique Belgique unie, entendez
unitaire.
Le Premier Ministre, qui sait
pertinemment que c’est tout le contraire (le pouvoir royal n’aura jamais été
historiquement aussi symbolique) et qui a bien perçu que son leadership s’en
trouvait automatiquement accru, en a fait des tonnes.
Ainsi va la com’ d’Elio Di
Rupo, quasi objet de consommation
politique, quasi personnage pour série-télé.
Faute de forte opposition
francophone au Parlement, le Di Rupisme en devient presque une croyance
médiapolitique; le sage qui déciderait de ce qui existe ou non. “Nos
citoyens vont retrouver de la confiance et vivrons heureux” a-t-il ainsi rassuré, gonflé, au Parc Royal. Comme
s’il suffisait qu’un roi en remplace un autre.
Cest que l’homme connaît bien
ces subtiles et anciennes clés de com’ que sont l’éthos (gagner la toujours
éphémère confiance du citoyen, capter l’attention et la sympathie: idéal sur les
réseaux sociaux) et surtout le pathos. Entendez les désirs, les émotions, les
craintes et surtout ces peurs si utiles à agiter lorsque tout pouvoir se sent
fragilisé.
Et ils sont deux aujourd’hui,
le Palais et la coalition Di Rupo, à se soutenir mutuellement et à jouer ainsi
à se faire peur en agitant l’ombre noire et confédéraliste de la N-VA.
Curieuse communication
gouvernementale qui- climat monarchique aidant- s’appuie, en Wallonie et à
Bruxelles, sur d’anciens réflexes unitaires et dissimule presque les fortes
autonomies créées sa propre réforme de l’Etat 6.0.
Le Roi Philippe n’a
strictement rien à dire, ni à l’Elysette, ni à la Place des Martyrs (siège du
Gouvernement flamand): son avenir, et c’est ce qu’il semble avoir bien intégré,
c’est d’être le symbolique “Roi des Deelstaten”, entendez des “Etats (entités) fédérés”, ces Régions
et Communautés qui, demain, décideront librement de 70% des anciennes
compétences fédérales, quand bien même transférées parfois sans grande
cohérence.
L’actuelle vague de
sentimentalisme n’est pas sans danger: en son temps, la “Mathildemania” eût pour ressac un lourd “effet boomerang”, y compris
la révélation de Delphine.
Car tout excès de monarchie
nuit à la monarchie. Tout comme ce qui est jugé bon pour et par Di Rupo
accentue, mine de rien, le clivage Nord-Sud.
Cette communication au
lithium n’est en rien une réponse à Bart De Wever. Lequel a préféré avancer
bien plus loin, se projetant déjà dans une autre réalité politique. Celle de la
Flandre qui, confrontée à la récession et
aux faillites, juge l’enjeu du coût salarial et de la compétitivité de
la Flandre plus vitale que les jeux de Palais. Ou Frans Van Daele –le Chef de
Cabinet déjà pensionné du nouveau Roi- est déjà considéré par d’aucuns comme un
“flamand dépassé”, un ancien
CD&Vdu temps du système Dehaene et des mythiques “Toshiba boys”...
Cette génération de flamands
qui pensait parfois: “Nous pourrions peut-être vivre mieux un peu plus
seuls”.
Bart De Wever, lui, dit: “
Nous pourrions vivre mieux, mais ne nous ne sommes, hélas, pas encore seuls”.
Michel HENRION.