Raser gratis ? Cette expression viendrait d'un barbier qui avait placé jadis une pancarte proclamant ladite formule…Mais notre artisan, tout aussi fûté que près de ses sous, l'y laissait tous les jours. Par conséquent, le naïf qui, le lendemain du jour où il avait vu la pancarte pub, venait se faire raser ou couper les cheveux et qui s'étonnait de devoir quand même payer, s'entendait répondre : "Oui, mais il y a écrit que c'est demain que c'est gratuit !". Aujourd’hui encore, notamment en politique, les promesses des personnalités en vue n'engagent que ceux qui les écoutent sans faire appel à leur libre-examen…Ce n’est pas le cas ici. Où on s'efforce plutôt de manier le mot à couper la langue de bois .

mardi 20 août 2013

“Fièvre de l’hermine” : ce que cache toute cette communication au lithium… (Marianne Belgique 27/07/13)

 
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Balise Médiapolitique parue dans Marianne Belgique du 27/07/2013


 Le  prochain 21 juillet, on en sera au 56ème jour d’après le grand rebattage de toutes les cartes électorales (on vote le 25/5/2014) Et donc, très probablement, de crise politique.
La Belgique étant le pays des grandes émotions particulièrement fugitives, que restera-t-il alors de l’actuelle “fièvre de l’hermine” (expression flamande très significative), de ce grand show de communication et d’auto-glorification? Qui a, notamment, vu ce phénomène singulier d’hommes politiques dans le déni même de leur propre représentation politique. Histoire de complaire à une opinion publique si mal informée qu’elle croit encore volontiers au roi-thaumaturge. Lequel, de nos jours, ne guérirait plus les fistules purulentes des écrouelles, mais ferait s’évaporer la dette publique et recréerait une mythique Belgique unie, entendez unitaire.
Le Premier Ministre, qui sait pertinemment que c’est tout le contraire (le pouvoir royal n’aura jamais été historiquement aussi symbolique) et qui a bien perçu que son leadership s’en trouvait automatiquement accru, en a fait des tonnes.
Ainsi va la com’ d’Elio Di Rupo, quasi objet  de consommation politique, quasi personnage pour série-télé.
Faute de forte opposition francophone au Parlement, le Di Rupisme en devient presque une croyance médiapolitique; le sage qui déciderait de ce qui existe ou non. “Nos citoyens vont retrouver de la confiance et vivrons heureux” a-t-il ainsi rassuré, gonflé, au Parc Royal. Comme s’il suffisait qu’un roi en remplace un autre.
Cest que l’homme connaît bien ces subtiles et anciennes clés de com’ que sont l’éthos (gagner la toujours éphémère confiance du citoyen, capter l’attention et la sympathie: idéal sur les réseaux sociaux) et surtout le pathos. Entendez les désirs, les émotions, les craintes et surtout ces peurs si utiles à agiter lorsque tout pouvoir se sent fragilisé.
Et ils sont deux aujourd’hui, le Palais et la coalition Di Rupo, à se soutenir mutuellement et à jouer ainsi à se faire peur en agitant l’ombre noire et confédéraliste de la N-VA.
Curieuse communication gouvernementale qui- climat monarchique aidant- s’appuie, en Wallonie et à Bruxelles, sur d’anciens réflexes unitaires et dissimule presque les fortes autonomies créées sa propre réforme de l’Etat 6.0.
Le Roi Philippe n’a strictement rien à dire, ni à l’Elysette, ni à la Place des Martyrs (siège du Gouvernement flamand): son avenir, et c’est ce qu’il semble avoir bien intégré, c’est d’être le symbolique “Roi des Deelstaten”, entendez des “Etats (entités) fédérés”, ces Régions et Communautés qui, demain, décideront librement de 70% des anciennes compétences fédérales, quand bien même transférées parfois sans grande cohérence.
L’actuelle vague de sentimentalisme n’est pas sans danger: en son temps, la “Mathildemania” eût pour ressac un lourd “effet boomerang”, y compris la révélation de Delphine.
Car tout excès de monarchie nuit à la monarchie. Tout comme ce qui est jugé bon pour et par Di Rupo accentue, mine de rien, le clivage Nord-Sud.
Cette communication au lithium n’est en rien une réponse à Bart De Wever. Lequel a préféré avancer bien plus loin, se projetant déjà dans une autre réalité politique. Celle de la Flandre qui, confrontée à la récession et  aux faillites, juge l’enjeu du coût salarial et de la compétitivité de la Flandre plus vitale que les jeux de Palais. Ou Frans Van Daele –le Chef de Cabinet déjà pensionné du nouveau Roi- est déjà considéré par d’aucuns comme un “flamand dépassé”, un ancien CD&Vdu temps du système Dehaene et des  mythiques “Toshiba boys”...
Cette génération de flamands qui pensait parfois: “Nous pourrions peut-être vivre mieux un peu plus seuls”.
Bart De Wever, lui, dit: “ Nous pourrions vivre mieux, mais ne nous ne sommes, hélas, pas encore seuls”.

Michel HENRION.