Raser gratis ? Cette expression viendrait d'un barbier qui avait placé jadis une pancarte proclamant ladite formule…Mais notre artisan, tout aussi fûté que près de ses sous, l'y laissait tous les jours. Par conséquent, le naïf qui, le lendemain du jour où il avait vu la pancarte pub, venait se faire raser ou couper les cheveux et qui s'étonnait de devoir quand même payer, s'entendait répondre : "Oui, mais il y a écrit que c'est demain que c'est gratuit !". Aujourd’hui encore, notamment en politique, les promesses des personnalités en vue n'engagent que ceux qui les écoutent sans faire appel à leur libre-examen…Ce n’est pas le cas ici. Où on s'efforce plutôt de manier le mot à couper la langue de bois .

lundi 23 août 2010

Après avoir réussi l’amalgame du nationalisme et du conservatisme tranquille, Bart De Wever a une obsession: gagner les communales pour ne pas devenir un parti-Tétraodon…


Cela se passe à Roosdaal, en BHV. Ou la NV-A avait pris l’habitude d’offrir des roses à tous les bons patriotes qui, chaque 11 juillet éperonné d’or, arboraient le drapeau des Flandres à leurs fenêtres. Las, cette année, la présidente locale à Bart a reçu son odorant marketing en retour, assorti d’un délicat billet anonyme (“Tes fleurs, tu peux te les mettre  …etc..”). Enquête des fins limiers de la NV-A du cru et voila qu’on découvre que c’est bel et bien la bourgmestre CD&V de la localité, Christine Hemerijckx, qui avait fait le coup de la sordide insulte anonyme, refusant actuellement de démissionner même si ça fait controverser sec  au CD&V du coin.
Comme quoi, s’il en est qui, dans les rangs sociaux-chrétiens  en débandade, rêvent de ressusciter un cartel NVA-CD&V inversé, il en est d’autres qui ne rêvent que de faire payer sa stupéfiante victoire à la NV-A et de l’entraîner dans le piège qui la ferait largement s’évaporer…
On rappelle la cruauté de l’écart: 1.135.617 voix et 27 sièges à la Chambre pour la NV-A contre 707.906 voix au CD&V et 17 sièges à peine.
Un tel succès électoral, c’est historique (le VLD ou le Spa de Steve Stevaert n’ont jamais imaginé racrapoter à ce point les sociaux-chrétiens) autant que politiquement fragile.
D’où la double contrainte de Bart De Wever, son propre "périmètre", qu’il faut intégrer ces jours-ci dans toute analyse de son comportement :
- c’est la première fois que les revendications des nationalistes flamands ont une telle légitimité démocratique. (feue la Volksunie n’aurait osé rêver devenir le plus puissant parti de Flandre…) 
C’est donc le moment ou jamais de faire suffisamment avancer le patriotisme flamand tout en montrant qu’il respecte, lui –contrairement à Yves Leterme- les promesses faites à l’électeur du Nord. De Wever ne veut certes pas d’un “parti stérile” à l’idéalisme sans engagement, (“Aucun pouvoir sans compromis”, disait courageusement Hugo Schiltz, la grande figure passée du Vlaamse-Nationalisme) mais ne donnera son feu vert qu’à son propre niveau de bonne ligne de flottaison flamande. Sinon, tant pis, ce sera moins bon pour la marque historique de Bart, ce sera peut-être l’aventure mais la NV-A pourra se targuer d’avoir été raisonnable, d’avoir cherché le compromis avec les incorrigibles wallons …
- La liste Bart De Wever, car on peut se demander ce qu’il en serait réellement de la NV-A sans la personnalité charismatique de son président, a réussi un amalgame rare, non pas entre l’autorité et le charme (ça, c’est du Sardou…) mais entre le nationalisme et ce conservatisme tranquille qui fait largement consensus au Nord. 
 Donc,  est-on vraiment aussi sûr que cela que la NV-A a fait le plein de son vivier électoral alors que le Belang et la LLD (DeDecker) sont en capilotade ? 
C’est qu’on vote dans deux ans- autant dire demain- pour les communales. Et qu’à ce niveau de pouvoir plus encore qu’aux autres, l’opportunisme est une règle. Huub Broers, le meilleur ennemi CD&V de José Happart dans les Fouron, est désormais sénateur NV-A. Et, dans d’innombrables municipalités de Flandre, bien des mandataires d’autres listes se demandent ces temps-ci s’il ne serait pas bien plus opportun pour eux de rejoindre illico les rangs de Bart, le politique historique qui, par sa potion magique “patriotisme flamand-conservatisme”, a changé l’image d’un nationalisme flamand encombré longtemps par trop de parfums d’extrême droite ou trop de dévoyements divers… 
Arriver en force au pouvoir, en 2012, dans nombre de communes de Flandre (surtout celles ou la bascule pourrait se faire entre anciens alliés du cartel) serait assurément, pour la NV-A, un moyen d’installer, d’assurer durablement son influence. 
Et la grande ambition de Bart De Wever, c’est, fin 2012, de déguster les cornets de la friture “ t’Draakse”, à Deurne, en tant que bourgmestre d’Anvers. Et si Elio Di Rupo s’est plongé dans l’étude du controversé dossier du “Lange Wapper” ( faut-il créer un pont ou un tunnel pour contourner Anvers ?) c’est qu’il sait que ce dossier est important pour le boss de la NV-A, qui compte débouter Patrick Janssens, l’ancien publicitaire devenu un temps président du SPa, du maïorat de la métropole… Match qui s’annonce serré au delà du jeu des alliances possibles puisqu'il faut relever qu’à Anvers (canton), la NV-A a collecté 25,37% des voix contre 23,55 au SPa.
La NV-A a des ministres (au Gouvernement flamand), croule depuis peu sous les moyens financiers ( la dotation publique découlant de son triomphe électoral), manque encore dramatiquement de bureau d’études et d’experts (les négociateurs NV-A sont quelque peu dépassés dès que cela vire technique …) et, surtout, une peur au ventre: celle de n’être plus, demain, qu’un parti-Tétraodon, qui se dégonflerait aussi vite qu’il s’est rempli en juin 2010…