Raser gratis ? Cette expression viendrait d'un barbier qui avait placé jadis une pancarte proclamant ladite formule…Mais notre artisan, tout aussi fûté que près de ses sous, l'y laissait tous les jours. Par conséquent, le naïf qui, le lendemain du jour où il avait vu la pancarte pub, venait se faire raser ou couper les cheveux et qui s'étonnait de devoir quand même payer, s'entendait répondre : "Oui, mais il y a écrit que c'est demain que c'est gratuit !". Aujourd’hui encore, notamment en politique, les promesses des personnalités en vue n'engagent que ceux qui les écoutent sans faire appel à leur libre-examen…Ce n’est pas le cas ici. Où on s'efforce plutôt de manier le mot à couper la langue de bois .

lundi 30 août 2010

Cette sourde irritation des francophones à force de voir Bart-sans-peur gagner sans cesse à la “ Vitrine Magique”…

 En écoutant Elio Di Rupo communiquer sur le registre de la peur et crier au chaos pour donner une leçon de raison à la NV-A et au CD&V,  m’est- allez savoir pourquoi- subitement revenue en mémoire ce petit conte de ce formidable poète belge qu’était  Georges Mogin, dit Norge :

Faites entrer la Reine, dit le roi. Elle entra. Le coeur de son amant fumait sur l’autel du bourreau. - Et mangez-en ! Elle en mangea.- Eh bien ? fit le monarque. .- Eh bien, répondit la Reine, si tu crois que tu vas me corriger avec des moyens comme ça!...

Perso, je doute itou assez de l’efficacité du procédé de la mise sous pression des leaders de la NV-A, à commencer par Bart De Wever. Qui n’a peur de pas grand chose puisque, chez les successeurs de la Volksunie, le programme l’emporte toujours sur les postes de ministres…
Et ici, Bart De Wever ne fait somme toute qu’appliquer la stratégie doctrinale affirmée en 2005 par Herman Van Rompuy pour son CD&V de l’époque: bloquer la
constitution de tout gouvernement fédéral tant que les revendications flamandes ne
seront pas suffisamment satisfaites.
 L’historien qu’est De Wever le sait pertinemment: lorsqu’on n’a peur de presque rien, lorsque la recherche du compromis à tout prix n’est pas le but premier, on peut gagner beaucoup. Quitte à risquer le clash final,  même pas grave finalement.
Une stratégie embarrassante pour le préformateur qui a joué son va-tout en s’impliquant, non sans patience, non sans brio, non sans qualités, non sans efforts tenaces, dans cette mission. Et qu’on sent aujourd’hui partagé entre l’envie d’éviter l’enlisement dans des sables mouvants “à la Leterme” et la peur de voir un autre politique, du Nord évidemment, arriver à équilibrer les derniers niveaux du chateau de cartes fédéral et lui rafler la mise de la rue de la Loi.
De Wever à Canvas: une com' positive mais très déterminée
Et une forme de “langue de bois” très classique, et facile à repérer, est celle du désintéressement (“Par sens de l’Etat, j’ai donc accepté de poursuivre…”) Généralement, cela cache les ambitions les plus fortes, les plus tenaces. Et la ténacité est assurément un des atouts politiques d’Elio Di Rupo, qui toute sa vie, n’a jamais renoncé à un de ses objectifs…Donc, l’improbable duo Elio-Bart (tiens, qui serait Vice-Premier pour la NV-A?), n’en a sans doute pas fini de devoir- avec des degrés variables de confiance et de méfiance- tenter de s’accorder.
 L’indice en est sans doute que, pour continuer à enjôler le Nord, le préformateur-dramatiseur a démarré, pour la troisième fois consécutive, sa conférence de presse dans la langue de Vondel. Une démarche très volontaire qui vire maintenant presque à l’erreur de communication vis à vis de l’opinion publique francophone. Celle à qui, mine de rien, s’adressait finalement le plus l’informateur puisque agitant l’apauvrissement d’une partie de la population (entendez les Wallons) ou le danger de la qualité de vie pour les Bruxellois…(assurément ravis de l’action de leurs ...952 politiques)
Car s’il est un frémissement, une évolution des mentalités qui monte soudain dans l’opinion francophone, peu motivée ces dernières années par le communautaire, c’est ce sentiment de “lâcher tout à la Flandre “. C’est que Bart De Wever, après avoir gagné à la Loterie électorale, donne l’impression de gagner chaque jour une jolie compétence de plus à la “Vitrine Magique” de l’informateur. Un jour, Bart décroche les allocations familiales, (avec le basculement risqué d’une certaine partie de la population bruxelloise vers la Flandre si des incitants financiers servent d’appât irrésistible) ; un autre jour, Bart obtient le dévissage de la délicate horlogerie de la loi de financement. Et le troisième jour,  il regarde la petite grue happer la scission de BHV sans avoir mis grand chose dans le monayeur…( ce n’est d’ailleurs pas la moindre des contradictions que de voir le Nord chipoter très stratégiquement sur le refinancement de ce qui est théoriquement sa propre capitale…) Bref trop, c’est gros. Ou inversément.
Donc, Elio Di Rupo doit désormais aussi tenir compte de ses arrières, se rappeler que le PS n’a quasi que zéro électeur en Flandre profonde. Car une certaine irritation monte y compris à mots étouffés dans son parti, et  que le PS pourrait un jour payer. Même si tout scrutin électoral est désormais théoriquement très lointain. 
D’autant plus que l’opposition libérale trouve soudainement là un terrain tout fertile. Certes Didier Reynders n’est pas tout à fait crédible comme ancien mentor d’une “Orange Bleue “ déja très pressée par le Nord, mais lorsque Louis Michel y va de de son couplet efficace pour stigmatiser que toutes les concessions auraient été faites par les francophones et plaider un “fédéralisme radical” plus équilibré, c’est une tonalité qui rejoint plus qu’on ne le pense ce qui trottine vaguement dans la tête de M.Tout-le-Monde du sud, pour qui Bart De Wever est toujours un épouvantail.
C’est un fait que, quoiqu’il advienne de cette mission théoriquement d’information, tout ce que la Flandre aura théoriquement engrangé, sera déjà considéré par le Nord comme acquis.Avec ou sans papiers.
Oui, ce n’est pas faux: la frilosité wallonne et francophone est étrange.
Comme si les francophones avaient oublié que la meilleure défense, c’est l’attaque. Comme s’ils avaient un peu peur, à tous les tournants, de prendre leurs responsabilités.
Car Bart De Wever ce n’est pas du tout le CVP-CD&V qui, lui, jouait toujours sur les deux tableaux: contrôler tout à la fois une Flandre forte et les principaux leviers de l’Etat fédéral.
C’est une des étrangetés de l’histoire: la NV-A, qui juge la structure belge en voie d’éclatement doux, n’offre-t-elle pas  soudain  aux wallons, en voulant une réforme  résolument radicale, ce pour quoi le Mouvement Wallon s’est jadis tant battu : plus d’autonomie politique.
Dank u voor het café ou le café.