Raser gratis ? Cette expression viendrait d'un barbier qui avait placé jadis une pancarte proclamant ladite formule…Mais notre artisan, tout aussi fûté que près de ses sous, l'y laissait tous les jours. Par conséquent, le naïf qui, le lendemain du jour où il avait vu la pancarte pub, venait se faire raser ou couper les cheveux et qui s'étonnait de devoir quand même payer, s'entendait répondre : "Oui, mais il y a écrit que c'est demain que c'est gratuit !". Aujourd’hui encore, notamment en politique, les promesses des personnalités en vue n'engagent que ceux qui les écoutent sans faire appel à leur libre-examen…Ce n’est pas le cas ici. Où on s'efforce plutôt de manier le mot à couper la langue de bois .

dimanche 6 octobre 2013

Pandas et Lapins Blancs (chronique parue dans Marianne Belgique du 21/09/2013)

En politique, tout est image. Et Haohao et Xinghui, les pandas de Pairi Daiza, viennent, mine de rien, de réenchanter quelque peu de leur minois la politique belge. Loin des discours raides ou complexes, ils ont, mine de rien, vulgarisé un truc pas anodin. A savoir la jalousie, à tout le moins l’amertume d’une certaine Flandre qui ne supporte d’évidence guère un succès wallon. Ceux pour qui un Panda, au poil luisant de retombées économiques, ne peut forcément débarquer qu’à Anvers, même si aucun dossier hautement étayé n’avait été déposé
“Querelles de paroisse” a lancé l’OpenVLD Alexander De Croo, comme si la minceur de la polémique des deux démocraties zoologiques pouvait cacher une jalousie qu’on retrouve sans cesse dans des enjeux bien plus sérieux. Ainsi de l’assez formidable réussite des aéroports wallons, qu’il s’agisse du fret de Bierset (bénéficiaire) ou des pistes de Charleroi, aéroport wallon en passe de devenir bientôt international avec 9 millions de passagers à l’horizon. A Zaventem ( théoriquement “Bruxelles-National”, à l’instar du futur “Grand Stade National” de Grimbergen), Ostende et Anvers, on ne digère clairement pas, glups, cet envol.
C’est tout le paradoxe du panda: que la Wallonie soit dans la mouise, une certaine Flandre la critique. Que la Wallonie se redresse, c’est kif. Jusqu’à mettre des traverses dans tous les investissements SNCB dont la Wallonie a tant le besoin…
Faute d’ursidés, la Flandre au Pays des Merveilles N-VA se console donc soudain à coups de Lapins Blancs.
Pas du lapin blanc d’élevage comme tous ces présidents de la FEF (Fédération des Etudiants Francophones) devenus Ecolos (Nollet, Henry, Hoyos), socialistes (Bucella ou Chapelle) ou pétébistes. (Michaël Verbauwhede)
Pas du lapin blanc de clapier audiovisuel pour liste MR.
Pas du lapin sportif comme Bea Diallo pour le PS.
Pas du lapin blanc de compagnie, type Jean-Denis Lejeune pour le CDH.
Non, ici on vous parle de lapin blanc de race, au pedigree de concours, au poil tellement angora ou de renard, qu’il pourrait occuper carrément la cage dorée de Premier Ministre.
C’est que, malgré l’insuccès fréquent des techniciens censés être plus compétents que les politiques- la dernière démonstration en date étant celle d’un Mario Monti en Italie- l’air du temps se veut toujours accueillant aux technocrates et autres supposés grands gestionnaires de génie.
Candidate au pouvoir fédéral et pour le moins nerveuse à l’approche des élections, la N-VA vient soudain de constater que -faute d’un Bart De Wever coincé à Anvers-
ça faisait tâche de n’avoir aucun challenger crédible face à Di Rupo ou au candidat du CD&V. Lequel , puisque toute la rue de la Loi vit désormais dans la spéculation, pourrait d’ailleurs être un lapin semi-blanc, à savoir le très ambitieux Koen Geens. Lequel n’arrête pas, dans ses multiples interventions médiatiques, de répéter sa disponibilité pour le CD&V et son meilleur ami Kris Peeters…
Bref, l’historien De Wever, qui a ses petits côtés gaulliens, a dû se souvenir que Pompidou était passé sans crier gare des affaires de la banque Rotschild à la direction du gouvernement français. Ou, plus récemment, que Kris Peeters est devenu ministre flamand et ensuite carrément Ministre-Président flamand sans jamais avoir été élu.
Et comme l’onction d’un De Wever vaut toutes les légitimités, tous les seconds couteaux de la N-VA, trop profilés communautaires pour un rôle de Premier belge, passent leurs journées à compulser le who ‘s who des grands CEO ou des leaders des organisations patronales (VOKA) de Flandre, tous “lapins blancs” potentiels.
Du vrai Lewis Carroll, on vous dit.

Michel HENRION