Raser gratis ? Cette expression viendrait d'un barbier qui avait placé jadis une pancarte proclamant ladite formule…Mais notre artisan, tout aussi fûté que près de ses sous, l'y laissait tous les jours. Par conséquent, le naïf qui, le lendemain du jour où il avait vu la pancarte pub, venait se faire raser ou couper les cheveux et qui s'étonnait de devoir quand même payer, s'entendait répondre : "Oui, mais il y a écrit que c'est demain que c'est gratuit !". Aujourd’hui encore, notamment en politique, les promesses des personnalités en vue n'engagent que ceux qui les écoutent sans faire appel à leur libre-examen…Ce n’est pas le cas ici. Où on s'efforce plutôt de manier le mot à couper la langue de bois .

vendredi 13 décembre 2013

L’Open N-VA (chronique parue dans Marianne Belgique du 30/11/13)



-->
C’est un passage à la N-VA qui n’a guère fait parler de lui au Sud du pays, hormis dans le microcosme. Celui de Johan Van Overtveldt, économiste réputé et plume emblématique de l’hebdo financier Trends, version flamande traditionnellement pointue.
C’est un autre passage à la N-VA qui n’a pas plus fait causer de lui versus francophone: celui de la députée OpenVLD Annick De Ridder, qui, “en conscience”,  ne se reconnaît plus dans le libéralisme-marketing des “leading ladies” libérales (le trio Rutten-De Block-Turtelboom).
Ce sont pourtant là deux épisodes significatifs d’une très bonne question: où se trouvent désormais les libéraux en Flandre?
Le Grand Baromètre l’a montré: en jetant sur papier son Confédéralisme radical (soutenu par 41% des flamands, chiffre vraiment interpellant), Bart De Wever a lancé une sacrée “balle magique” qui n’a pas fini de rebondir d’ici le 25 mai 2014. Un projet qui a cependant son handicap: un certain manque de crédibilité du volet socio-économique, ressenti souvent comme pas trop arrimé.
Du coup, Bart sort de son chapeau le “lapin blanc” Johan Van Overtveldt, sans doute le plus joli animal du genre de toute l’histoire politique flamande. Parce que l’homme, nimbé de sa réputation d’expert vedette,  valide et donne, par son ralliement,  du crédit à tout ce que la N-VA dit sur un socio-économique qui se communautarise vitesse VV prime. Parce que médiatique, bon débatteur- aussi futur ministre en puissance- l’ex-rédac chef de Trends incarne pile poil l’électorat que De Wever entend précisément capter. Ces entrepreneurs flamands qui ne sont pas forcément nationalistes mais qui ralbolent des “solutions à la belge”. Qui enragent devant les blocages –aux allures de “mini BHV”- de l’équipe Di Rupo pour ce qui est du coût salarial et de la compétitivité. La N-VA, dans sa quête confédéraliste, recherche l’appui des milieux économiques et financiers. (53% des indépendants de Flandre souhaiteraient déjà la N-VA au pouvoir, loin devant l’Open VLD à un maigre 19%)
Le “lapin blanc” Van Overtveldlt pourrait donc inciter, d’autres acteurs économiques à rejoindre le terrier N-VA.
Le pragmatique professeur Van Overtveltd eût pu choisir de s’engager au sein de l’Open VLD.
Surprise: son libéralisme économique le conduit à la N-VA, dont il bonifie illico l’image.
C’est donc le moment ou jamais pour De Wever de convaincre les libéraux de virer N-VA. Et son grand congrès de fin janvier 2014 pourrait, qui sait, se comparer demain au bigbang qui transforma jadis le PVV en VLD triomphant.  Il est vrai que, à l’instar d’un De Wever, Verhofstadt était idéologue.
Aujourd’hui, Gwendolyn Rutten fait plutôt dans la forme, le marketing et l’optimisme Dr Coué : pas de vrai renouveau idéologique. On y fait plutôt le pari d’attirer par son discours de moins en moins flamand, de moins en moins libéral au sens doctrinal du terme, de nouveaux électeurs. Cela ne va pas donc sans remous entre la base et le top OpenVLD.  A son élection à la présidence, quoique soutenue par tous les apparatchiks bleus, Gwendolyn Rutten avait déjà dû encaisser le score contestataire (40%) de son challenger, le peu connu Egbert Lachaert. Cette fois, c’est un déluge de “lettres ouvertes” et autres réactions cinglantes (les Jong VLD ont été les fers de lance de la contestation interne, aussi bien maîtrisée par Maggie qu’un rétif afghan) qui montrent qu’un certain nombre de libéraux flamands ne flonflonnent plus avec ces éternelles promesses, utopiques dans le contexte belge.
Gwendolyn Rutten peut certes compter sur tous ceux qui sont OpenVLD avant d’être libéraux, sur tous ceux qui ont une réelle aversion pour le nationalisme, sur tous ceux qui ont trop ou trop peu d’ambitions. Mais bien d’autres feront comme Van Overtveldt ou la députée Annick De Ridder. Et opteront pour le libéralisme sauce N-VA.
Avec Mega Maggie, Annemie et Gwendolyn, les libéraux flamands ne sont plus les seuls à pouvoir se targuer de l’ ”étiquette libérale”: surtout pour ce qui est du socio-économique. 
Leur cauchemar de demain, c’est l’Open N-VA.


Michel HENRION