Raser gratis ? Cette expression viendrait d'un barbier qui avait placé jadis une pancarte proclamant ladite formule…Mais notre artisan, tout aussi fûté que près de ses sous, l'y laissait tous les jours. Par conséquent, le naïf qui, le lendemain du jour où il avait vu la pancarte pub, venait se faire raser ou couper les cheveux et qui s'étonnait de devoir quand même payer, s'entendait répondre : "Oui, mais il y a écrit que c'est demain que c'est gratuit !". Aujourd’hui encore, notamment en politique, les promesses des personnalités en vue n'engagent que ceux qui les écoutent sans faire appel à leur libre-examen…Ce n’est pas le cas ici. Où on s'efforce plutôt de manier le mot à couper la langue de bois .

mardi 29 novembre 2011

Bart De Wever prend le ton Michael Collins (indépendantiste irlandais): " Je suis un homme avec une mission"


C’est curieux. Alors que l’on va vers un scrutin communal (octobre 2012) qui, en Flandre, pourrait bouleverser spectaculairement pas mal de donnes; alors que la N-VA est toujours le premier parti du pays, on dirait que Bart De Wever ne suscite plus guère l’intérêt.
Pourtant, la longue interview de fond qu’il vient de donner à Doorbraak (mouvement flamand) est loin d’être inintéressante. Ne fut-ce que parce que De Wever y emploie un ton très Michael Collins…
Extraits choisis:
--"J'ai de la patience pour capitaliser. Je suis un homme avec une mission.Cela peut paraître solennel, mais je veux le dire"

--"Rien n'est aussi fort qu'une idée. Je suis optimiste. Les seuls qui peuvent tout bousiller, c'est nous-mêmes..."
-"Je ne peux pas offrir l'indépendance: c'est irréaliste. Je ne crois pas à l'indépendance immédiate."

-"Pouvez-vous imaginer ici, comme en Ecosse, un magasin Lidl qui proclamerait: "Fier de servir la Flandre"? Il devrait vite fermer! "

-Il n’y aura pas de coalitions communales avec le Belang, ce serait "aller à l'abîme". Leur "coeur de métier", c'est le "show anti-Islam", l’anti-immigrés…

-"J'ai d’ailleurs l'impression que le discours anti-immigrés du Belang est devenu pour eux bien plus important que l'indépendance"

-"Je me demande si N-VA et Belang ne feraient pas mieux de se centrer et de maximaliser sur leur propre base, au lieu de s'en prendre l'un à l'autre. Moi, j'essaie de ne plus mener d'action offensive à leur égard.(...) J'essaie juste de parer à leurs attaques" (...) " Vous ne pouvez pas dire que le Belang est un parti comme les autres, ce n'est pas le cas. Sa perception, c'est aussi la réalité.(...) Le Belang avait laissé présager un virage à 180°: en fait il se durcit et s'aigrit".

-"Je parle aussi peu que possible devant le mouvement flamand, c'est prêcher aux fidèles. J'aime à parler au Rotary, Club 51, les Lions, Davidsfonds, les clubs philanthropiques, les clubs d'affaires...Si vous pouvez convaincre les intellectuels, l'élite, vous avez fait 90% de votre chemin."

-"Je passe plein de temps avec des diplomates étrangers, j'en ai reçu vraiment beaucoup: nous sommes le plus grand parti du pays"

Sondage Libre-RTBF du 2/12: éloquent...

mercredi 23 novembre 2011

Google Milquet View

Cest-y-pas-possible ! En flânant sur Google Street View Belgique (en ligne depuis ce 23/11) je découvre que Google a immortalisé la... Renault-bureau ambulant de Joëlle Milquet ! Quelle com !

lundi 21 novembre 2011

Lorsque les symboles extérieurs priment, en communication, sur le discours des politiques (de l’incongruité de la bagnole haut de gamme en arrière-plan des discours d’austérité)

En communication, cette interminable crise ne va pas sans conséquence. Qui croit encore que le téléspectateur prête vraiment attention aux discours répétitifs- et souvent machos-roulement des épaules- des négociateurs mille fois filmés dans une séquence immuablement répétitive où les vrais acteurs sont presque des sacs à dos ou des mallettes bourrées de textes inconciliables.
Mercedes 400 : mieux en hybride écolo...
Ce qui retient encore l’attention de l’homme de la rue, c’est juste les signes extérieurs: les gestes, les images, les objets (le curieux lapin géant offert par le formateur au nouveau-né de Beke…), les modes de comportement.
Le loustic au nez rouge qui a perturbé l'autre soir le direct de la rue de la Loi au JT de RTL-TVI  est sans doute apparu ainsi comme, finalement, très significatif d’une situation politico-politicienne au bord du clownesque.
Bref, tous les signes extérieurs prennent de plus en plus d’importance dès lors que le monde politique n’arrive plus à affirmer sa compétence à décider.
On communique toujours par des symboles et, rue de la Loi, tout signe extérieur est désormais un symbole très fort.
A-t-on assez épinglé cette incongruité de com' qui consistait à voir les ténors des partis balancer leur point de vue sur le devenir plus austère des voitures de société ou, pire, marteler la nécessité de la rigueur (mot poli pour l’austérité). Et ce  tandis qu’à l’arrière plan, se parquaient, se narguaient Audi A8, Lexus haut de gamme et autres BMW, accessoires sur quatre roues du pouvoir. 
Dont le prix vertigineux est parfois masqué par l’alibi de la supposée vertitude d’un moteur hybride supposé écologique mais  qui fait surtout encore blêmir la facture.
Tout symbole est un préalable à la relation sociale: et la forte symbolique sociale de la voiture est hyper-connue, sauf apparemment des politiques. (A l’exception de l’un ou l’autre, comme le président du MR, l’ami-à-Walter-de-la-C5, qui laisse généralement sa BMW en un autre lieu et s’en vient malignement pedibus cum jambis…
Oh, bien sûr, on expliquera que les marques affectionnent de voir leurs volants de prestige tenus par des politiques; qu’il est des ficelles administratives et diplomatiques;  qu’il est des conditions d’achat et des leasings exceptionnels qui vous ramènent presque, à les entendre, la Mercédès haut de gamme au prix d’une Logan. L’argument ne tient pas une milliseconde:  c’est faire fi de la “puissance symbolique” de tels véhicules. Cela nous rappelle ce dirigeant d’une société de logements sociaux qui visitait la faune et la flore de ses bâtiments à bord d’une ahurissante voiture de prestige dont l’insolence, l’incongruité sociale lui échappait puisqu’il l’avait décrochée à 45.000€, soit à moitié prix…”Une affaire”, avait plaidé pour sa défense l’inconscient, qui avait managé sa carrière ”à gauche”.
Les intérêts notionnels, le “spread”, ça, l’homme de la rue a bien du mal à en intégrer les subtils enjeux. La symbolique de la bagnole, encore pour tant et tant signe extérieur de réussite sociale (dans les classes plus jeunes, le smartphone devient  plutôt le “signal” de remplacement) est tout sauf innocente.
Il ne s’agit pas ici d’écrire à l’encre facile de la démagogie: il s’agit de rappeler la “valeur de l’exemple”, si nécessaire lorsque la dramaturgie politique ne cause plus qu’efforts douloureux et restrictions drastiques. L'élection est un contrat de confiance entre l'électeur et son élu. Et cette confiance est un sentiment fragile si M. Tout le Monde  ressent injustice et inégalité.
Faut-il rappeler que, un peu plus au Nord, il n’y a pas que le “modèle allemand” mais aussi le “modèle politique des pays scandinaves”. Ou les ministres roulent dans des véhicules bien plus raisonnables, ou leurs bureaux ont tout du catalogue Ikea et ou ils se doivent de rentrer leurs justificatifs fin de mois. Regardez ce vidéo-reportage: tout est dit.
C’est comme si un certain monde politique belge, si prompt à prêcher les économies, avait tant de mal à s’auto-appliquer cette ligne de conduite, si nécessaire pourtant pour faire adhérer, pour persuader le citoyen.
C’est pour le moins incohérent de voir le niveau fédéral (note Di Rupo) s’engager- allez, c’est déjà mollement- à diminuer de 5% les salaires ministériels tandis que, dans la foulée, les ministres du Gouvernement wallon décident, eux,  assez discretos de se réévaluer de +2,5%.
Une “indexation” à laquelle, pris la main dans le sac des médias  (L’Avenir a eu le mauvais goût de dévoiler la ficelle), le ministre wallon du Budget a décidé -un peu beaucoup poussé dans le dos par son parti- de renoncer pour son compte, comme si c’était là le comble du sacrifice en “fonction de ses ressources”, a-t-il dit à Controverse.
Il n’y a qu’un hic:  André Antoine, ministre CDH et wallon du Budget, roule en Mercédès 400 Hybrid.
Qui s’affiche au catalogue à 97.000 €.

dimanche 20 novembre 2011

Les"Francs Tireurs" du 20/11: le silence des pantoufles est parfois plus dangereux que le bruit des bottes; la pub Benetton, symbole d'une époque frileuse

Porté aux nues après BHV, le formateur vire tête de Turc des médias flamands...

  

Gregory Goethals m'interrogeait, ce dimanche(20/11), dans les "Francs Tireurs" (RTL-TVI) sur la "méthode Di Rupo". Lequel est formateur depuis...une demie-année, ce qui laisse pour le moins le temps d'observer.
C'est finalement assez simple: sur fond de dramaturgie, le formateur déploie une stratégie aussi vieille que la politique.
Cela s'appelle "jouer la montre", laisser transpirer ses rivaux politiques jusqu'à ce qu'ils cèdent.... Avec de temps en temps une grande théâtralisation.
Cela a fonctionné pour BHV: Di Rupo a somme toute attendu que le CD&V laisse tomber la N-VA, attendu que le MR laisse tomber le FDF et que les Verts soient laissés tombés.
Maintenant, laisser mijoter, ça ne fonctionne plus. La dramaturgie a tourné vinaigre. Il est vrai que faire des réunions toute la nuit, ça fonctionne si ça réussit: si ça rate, soir après soir, les m
édias soulignent l’échec.(et même si l'on réussit à ficeler le tout plus tard, ça n'a plus le même impact dans l'opinion)
Et les choses vont parfois très vite en politique: porté aux nues après BHV, Di Rupo est aujourd'hui la tête de Turc des médias flamands, suscitant des critiques même chez les socialistes flamands, le formateur étant accusé de vouloir "faire payer le bon travailleur flamand".
Tout cela s'explique par un problème de fond: vouloir, 37 ans après Leburton, devenir Premier Ministre en étant wallon, francophone et socialiste est tout sauf évident. 
Le formateur, pour la Flandre, doit clairement payer le 16 rue de la Loi par deux fois: le prix d'une réforme de l’Etat voulue par la Flandre et, maintenant des concessions socio-économiques fortes difficiles à avaler par les syndicats.
Etre le deuxième parti, dans un gouvernement, c’est toujours, de fait, plus facile.
Le PS, lorsqu’il était dans un gouvernement comme ceux de De Haene Leterme ou Verhofstadt, demandait traditionnellement que ses exigences soient mieux prises en compte. Aujourd'hui, ce sont les libéraux qui reprennent ce rôle.


lundi 14 novembre 2011

L’inertie politique creuse le fossé Nord-Sud: ou comment la N-VA agite la peur au ventre de la Flandre de basculer vers la “Zone Ouzo”…

Théodore Dalrymple, le gourou de Bart De Wever.
 “Pourquoi devrais-je me sentir solidaire de l’Afrique ? Je ne me sens pas non plus solidaire de la Grèce…” déclarait ce week-end l’écrivain Theodore Dalrymple au Laatste Nieuws, dans une fort intéressante interview.
Un point de vue qu’on se contenterait d’enregistrer sans plus si le conservateur et sceptique Dalrymple (de son vrai nom Anthony Daniels) n’était le “gourou” philosophique affiché de Bart De Wever.
Dont il n’aurait, ceci soit en passant, d’ailleurs pas trop apprécié qu’il pleure si publiquement à l’enterrement de Marie-Rose Morel (ex-Belang) puisque son dernier opus s’en prend précisément tout entier au “sentimentalisme excessif de nos sociétés”
Dénonçant cette “abondance d’émotions fausses et surévaluées”, cette époque ou chacun “doit démontrer publiquement qu'il est un homme sensible”. 
Bref, ce “ culte du sentiment” qui fait que la Monarchie britannique s’en est retrouvée ébranlée à la mort de Diana, la Reine Elisabeth n’y allant pas d’une larme en public. 
"Quarante millions d'ours en peluche ne peuvent  pas se tromper », écrit ironiquement Dalrymple pour qui l’époque doit revenir à la “sobriété”.
“Dans le passé, écrit-il, la classe ouvrière, si elle ne pouvait se permettre quelque chose, ne l’achetait pas. Nos politiques sont les premiers coupables d’avoir permis de vivre à crédit…”
On vous raconte ça parce que, au 520ème jour d’attente lugubrée d’un gouvernement, on voit bien combien cette philosophie là plait de plus en plus à une certaine Flandre.
Au delà des péripéties des diverses haltes politiques du train de l’inertie, c’est un fait marquant: l’interminable formation accentue encore, mine de rien, la  fracture Nord-Sud. 
Bien embêté lorsque l’accord communautaire fut noué, Bart De Wever ne peut que jouer de voir les négociations budgétaires ainsi s’empêtrer jusqu’à l’absurde  (deux budgets)
Alors que la N-VA, censée être l’obstacle à tout, a quitté la table depuis quasi… 130 jours.
Ce n’est un secret pour personne rue de la Loi: le risque est grand, sinon déjà assuré, de se réveiller brutalement un matin de toutes ces dodomontades politiques avec une coûteuse dégradation de la cote belge (AA+ sous surveillance) par les agences de notation.
Ce n’est un secret pour aucun citoyen, l’opinion fut-elle atone n’étant tout de même pas dupe: c’est une cascade de mesures et de taxes rétroactives qui l’attend. Malgré les veloutés de regard des politiques pendant les JT, ceux-ci vont lui présenter  la facture de ces mêmes 520 jours et de l’amorphisme depuis 2007 .
 Cela recoupe ce que dit Dalrymple, le caustique loustic philosophe de droite:
“ Comment se prémunir contre les conséquences économiques de l’imprudence, de l’immature, de l’enfantin, de l’idiot, de ce qui vire carrément à un comportement criminel. "
Donc, Bart De Wever pousse sa goualante désormais devant chaque micro: « Si l’on suit Di Rupo, on se jette dans la tempête de l’euro, dans la “zône Ouzo” .
Le  boss de la N-VA sait mieux que quiconque combien la Flandre craint, au ventre, tant et tant pour sa prospérité.
Et de creuser, par un discours très tranché, le vrai fossé Nord-Sud, les derniers chiffres  (le spread à un niveau record) démontrant combien les marchés se méfient:
 « Avec l’économie de la Flandre, nous aurions pu aisément suivre l’Allemagne, mais dans le contexte belge, nous nous retrouvons au rang de la Grèce, de l’Italie et de l’Espagne », dit De Wever.
Sous-entendu dans sa machinerie pensatoire : la Belgique est, pour nous les flamands, un boulet inefficace. Sous-entendu, marre des transferts financiers vers Bruxelles et la Wallonie, vers “Athènes-sur-Meuse”,  tout comme l’athéiste Dalrymple ne voit pas de raison évidente d’aider les grecs ou les africains…
L’enjeu a de quoi faire frissonner dans les foyers: la Belgique va-t-elle basculer vers le “Sud décadent” ou le “Nord si responsable” ? (à cela près que salaires de merde et pauvreté explosent en Allemagne: le nombre de pauvres vient d’y passer de 8 millions à 15 millions…)
Cela fait 180 jours que le formateur semble endosser son même pull gris pour une négociation grise dans un paysage politique gris à l’avenir plus noir que gris. 
Avec des libéraux flamands qui, croyant se refaire, renaudent sans cesse sans craindre de  préparer sans doute leurs propres grises funérailles. Avec un futur Premier ministre contesté dans ses méthodes avant même d’être en place. Avec cette évidence que si cette formation aboutit enfin, on va vers un gouvernement fragile, certains négociateurs ne lui donnant pas six mois.
Fragile parce que les marmelades tripartites, dans l’histoire de ce pays, ça n’a jamais vraiment plu. Fragile parce qu'un Premier Ministre francophone doit d'évidence payer le prix de son accession au 16 rue de la Loi. Fragile parce que, malgré les concessions obligées, le Nord du pays supportera difficilement un Premier wallon, francophone, socialiste et surtout- ah, le sac à irritations- imparfaitement bilingue pour nombre de flamands. Fragile parce qu’il risque d’être, par les mesures à prendre, aussi socialement contesté qu’impopulaire. Fragile parce que la N-VA attendra patiemment l’heure de rebattre les cartes: les élections de 2014, c’est déjà dans 930 jours.
Et que les graines de l’autonomie, sur un terreau aussi enrichi aux dissensions, au compost des peurs et au fumier d’égoismes organiques, ça peut germer vite.