Raser gratis ? Cette expression viendrait d'un barbier qui avait placé jadis une pancarte proclamant ladite formule…Mais notre artisan, tout aussi fûté que près de ses sous, l'y laissait tous les jours. Par conséquent, le naïf qui, le lendemain du jour où il avait vu la pancarte pub, venait se faire raser ou couper les cheveux et qui s'étonnait de devoir quand même payer, s'entendait répondre : "Oui, mais il y a écrit que c'est demain que c'est gratuit !". Aujourd’hui encore, notamment en politique, les promesses des personnalités en vue n'engagent que ceux qui les écoutent sans faire appel à leur libre-examen…Ce n’est pas le cas ici. Où on s'efforce plutôt de manier le mot à couper la langue de bois .

lundi 17 novembre 2014

Black Out et politiques: le fiasco des bricoleurs (Qui voudrait encore investir dans un pays devenu du Tiers Monde énergétique?)

 
Il suffira d’un watt. Le watt trop peu qui déclenchera le tout premier “délestage” électrique. Parce que, pendant quelques jours d’hiver, il aura soudain fait banalement trop froid. Parce que ce soir-là, la production ou l’importation d’électricité n’aura pu coller à la demande de consommation.
Ce soir-là, les habitants des zones de Belgique momentanément préservées de la coupure de courant, regarderont les inmanquables Journaux Télévisés spéciaux en boucle, stupéfaits de se croire soudain dans un pays du Tiers-Monde énergétique.

Ce soir-là, certains bourgmestres distraits découvriront soudain qu’ils  ont omis quelques légers détails: ouvrir un centre d’accueil chauffé, veiller si personne ne traîne plus à 17h dans les écoles, vérifier si tout coulait pour les égouts… Et, pour d’aucuns, avoir géré les pompes anti-inondations, les prisons, les centres d’accueil, voire les agences bancaires et les tribunaux du cru.

Ce soir-là, policiers et pompiers découvriront soudain des situations aléatoires: des ascenseurs bloqués; de petites entreprises au bord de la crise de nerfs parce que leur chaîne de production est soudain compromise; des bricoleurs allumés qui auront connecté dangereusement au réseau le groupe électrogène acheté discount au magasin brico du coin; des personnes âgées qui, après les heures de coupure du chauffage, ne se rendront pas compte qu'il leur faut parfois le relancer manuellement… A relever: sauf groupe électrogène,  maisons de repos et hôpitaux devront tout de même patienter quelques minutes, même s’ils sont prioritaires.

Ce soir-là,  des citoyens, tentés jusqu’alors de parfois poétiser le délestage (ils se voyaient déjà jouer au “nain jaune” dans une atmosphère familiale enfin débarrassée du numérique), découvriront que les radiateurs gelés par -10°, c’est pas vraiment le top convivial.

Et, au moment de rétablir le courant, d’aucuns s’apercevront que ça ne se relance pas comme l’on relève d’un doigt léger un plomb Teco dans sa cave. Et que, dehors,  des câbles électriques, ça peut geler, se givrer. Qu’il faut des moteurs pour le gaz.  Que nos réseaux sont vraiment bien vieux: et que, pour retrouver la lumière, ce sont des hommes qui devront s’en aller péniblement, de cabine en cabine, relancer manuellement le bigntz.  Peut-être même sans ligne GSM pour  communiquer.







L’hiver 2015-2016 sera encore plus risqué



Et, le lendemain matin, le belge du Nord ou du Sud, s’il n’est pas préservé par l’un ou l’autre statut (habiter une grande ville ou être situé sur la route électrique d’une installation vitale) s’inquiètera grave: sera-ce mon tour ce soir? Et il lui faudra du temps pour comprendre que lorsque le Nord sera coupé par deux fois de courant, la Wallonie ne l’aura été qu’une fois (puisqu’elle est scindée, pour conserver l’équilibre avec le Nord, en 2 zones alternativement délestées ) Et que chacune des cinq zones fédérales définies sera délestée selon une échelle de six à un. Si votre rue est labelisée 6, vous êtes en première ligne pour être out trois ou quatre heures. Et si ça ne suffit pas, on coupera les rues sises “en degré 5”. Et ainsi de suite selon le niveau de pénurie.

Première certitude: “Le risque de manquer d’électricité cet hiver est très sérieux et sera sans doute encore plus élevé pour l’hiver 2015-2016” confirme à M…Belgique le professeur Damien Ernst (ULg)

Seconde certitude:  pour les hommes politiques de tous bords, cela sera assurément un très mauvais moment à passer. Sauf pour ceux qui, bien mieux informés, se sont déjà fait installer at home un dispositif de secours. (on en connaît, chut…) D’aucuns se mettront assurément à courir en tous sens, soit pour fuir l’opinion publique, soit pour enfin tenter de comprendre ce qui se passe. Car les jolis discours de langue de bois, ça ne passera plus, même pas auprès des heureux propriétaires de poêles à pellets. (cette tendance calorifique qui vous bouffe, mine de rien, des km2 de forêts).





Le Valet Noir des politiques



Oh,  la rue de la Loi va user assurément de mille artifices de com’ pour faire accroire au citoyen lambda que-c’est-pas-moi-c’est-l’autre. On se refilera le fameux Valet Noir de l’impopularité. D’aucuns inaugureront le Cap Canaveral de l’envoi des responsabilités vers la stratosphère de l’oubli et de la confusion. D’autres feront croire dogmatiquement que- c’est-la-faute-au-photovoltaïque alors que c’est bien évidemment la déglingue du parc nucléaire belge qui est la raison première de la pénurie actuelle. Et pas de manière inopinée, c’est depuis 2008 qu’il y a alerte..

Car le truc est tout de même émorme. Hénaurme. On se pince: la Belgique, pays industrialisé moderne, gèrant son électricité comme un pays sous-développé.

Tout le monde bottera en touche. Ah, le ministre, c’était pas moi… Le gouvernement untel: oh j’y étais pas… C’est comme dans les jeux télévisés lorsqu’un candidat ne connaît pas la réponse et qu’il s’exclame “Ah, mais c’est que je n’étais pas né!”. Comme si ça le dispensait de connaître Simenon ou Zénobe Gramme.



Le syndrome Kodak



Nos politiques  sont dans le “syndrome Kodak”, du nom du si puissant géant mondial de photographie clic-clac-kodak qui n’a jamais vu venir, qui a nié l’évolution, la révolution du numérique… Jusqu’à tout y perdre.

Et pour cause: nos hommes politiques, nos élus, ne sont pas formés à suivre toute la complexité des événements énergétiques.

Soyons clairs: ils n’ont, pour la plupart, pas la capacité d’en analyser les enjeux.

Rien de forcément rhédibitoire à ça: être un bon ministre généraliste qui  peut  passer de la Santé Publique à la Défense Nationale, c’est simplement le don d’avoir des méthodes, des techniques applicables à tous les dossiers. Et, surtout, d’être bien entouré et conseillé par des spécialistes.

C’est ici qu’est le bigntz. On a connu des cabinets de responsables ministériels de l’Energie  affichant carrément zéro ingénieur dans l’organigramme. Zéro conseiller connaissant les réseaux d’électricité.

On y préfère les juristes, histoire d’arracher des “rentes nucléaires” à Electrabel. (la déclaration gouvernementale de #Michel1 prévoit encore naïvement 500mio d’€ du style alors qu’il est probable que GDF-Suez ne consentira plus à dépenser bonbon pour moderniser ses installations sans intervention financière de l’Etat)



Quand le politique sous-traite dangereusement ses compétences



Conséquence: une tendance évidente du politique à déléguer son pouvoir d’Etat, voire à sous-traiter sa politique énergétique à des institutions diverses. Lesquelles polluent plutôt parfois les dossiers, racontant parfois portnawak aux ministres responsables.  Ainsi de la très flamande Elia (l’organisme qui a la responsabilité quasi morale d’éviter les black-outs)  qui s’intéresse apparemment bien davantage à ses ambitions internationales controversées qu’aux investissements à réaliser en Belgique,  exception faite du Nord du pays…(c’est Elia qui, avant que la ministre Catherine Fonck ne l’impose de force, n’entendait mordicus rien changer à ses délestages frappant deux fois plus la Wallonie, la désavantageant gravement au plan économique)



Les parlementaires ahuris



Il faut avoir la patience bénédictine, comme on l’a fait pour M…Belgique, de se pencher sur les mètres de compte-rendus parlementaires des Commissions spécialisées, tant au niveau fédéral que Wallon.

Oh, ce n’est pas que nos parlementaires manquent d’intérêt pour le sujet: le hic, c’est qu’ils… le découvrent.

Et ils sont même assez passionnés par les discours de la foultitude d’experts venus didactiquement tenter d’ éclairer leur lanterne. Et leur faire photographier que, pour l’heure, 3000 mégawatts de production nucléaire sont à l’arrêt. (contre 2000 MW l’an dernier en hiver doux). Qu’Electrabel, qui assure en temps normal 46% de la production,  a donc vu foirer la moitié de sa production.



LOLE ne fait pas toujours rire



Mais on ne les voit  plus sourire lorsqu’un expert leur parle pourtant du LOLE (Loss of Load Expectation) bien moins drôle que l’acronyme internet puisqu’il  prédit le nombre hypothétique d’heures potentielles de délestage; qui varient de 5H à 116h d’après de vagues calculs et selon les délais de réparation de la centrale de  Doel 4 gravement sabotée. (le Ministère de l’Intérieur a oublié d’ailleurs de sécuriser les lignes critiques.)

On tourne les pages et on voit les élus des zones rurales défendre leurs électeurs hautement délestables cet hiver alors que Bruxelles sera préservé, et ce contrairement à l’arrêté royal du 3 juin 2005.

On voit ceux du Brabant Wallon s’étonner dêtre deux fois plus délestés que ceux du Brabant flamand. C’est qu’il subsiste une “région du Centre”, sorte de BHV électrique.

On voit les élus du peuple multiplier les idées les questions, parfois naïves, tantôt précises.

“C’est bien beau tout ça, mais qui financera un toutes-boîtes communal, hein ?”, s’interroge un député à idées courtes. 

Y a-t-il moyen de doper l’importation?, s’interroge un autre. ( bof, bof, faudra plus trop compter sur la France, notamment vu les millions de pavillons Leroy-Merlin  dotés à moindre coût de chauffage électrique)



On ne stocke pas le courant comme du sucre



Peut-on  encore améliorer ce qu’on appelle la “réserve stratégique”? demande un autre. L’électricité ne se stockant pas comme le sucre,  il s’agit que des entreprises acceptent de refiler leur consommation à l’Etat en arrêtant leur chaîne de production. (ce qui préoccupe alors les syndicats, soucieux de la manière dont les travailleurs seront compensés pour ce chômage technique inédit).



Quant à la question récurrente: qui paiera les indemnités, les dédommagements pour les multiples dégâts annoncés? c’est l’imbroglio juridique  vu le nombre incalculable d’acteurs se renvoyant la patate toute chaude.



Pour les politiques, la vérité est rarement bonne à dire…



Photographiez bien ça: on vit dans un pays dont le parc nucléaire, pourtant robuste,  est vieillissant ou à problèmes. Les diamants sont éternels: pas les centrales, qu’elles soient à l’uranium et au gaz.

Bref, la Faillite énergétique, nous voilà. Un pays limite exsangue pour plusieurs hivers, en attendant un renfort en gaz, sans doute hollandais. Avec un programme d’accord gouvernemental qui, pas plus que ses prédécesseurs, n’a l’air de prendre vraiment la mesure du problème . La N-VA veut juste sa centrale nucléaire de 4ème Génération. Mais ce serait …pour 2035 et, léger détail pas accessoire, le Mégawatt qui en sortirait coûterait bonbon.

On sait bien que pour tout politique, la vérité est rarement bonne à dire. Dans la vie publique, s’arranger avec la vérité est bien moins dangereux que de “parler vrai”.

Ce qui est cependant affolant, ce sont tous ces politiques qui, après n’avoir rien vu venir, continuent à minimiser tous partis confondus.  D’ou cette nouvelle dramaturgie à deux sous: “Arrêtez votre micro-ondes et tout ira bien”. Prière de croire ça sans ciller, avec sérieux, en acquiesçant d’un air entendu.

 Le hic, c’est qu’il faudrait mettre 500.000 micro-ondes à l’arrêt pour obtenir l’équivalent d’une modeste centrale nucléaire.

Et que la “bonne volonté citoyenne” , si elle plait au “bon sens” de l’opinion, risque de faire -techniquement- plus de mal que de bien. Provoquer l’inattendu sur un réseau sensible, vite instable, c’est jouer à la roulette russe. C’est même le risque d’un #blackout total.

Mais qui ces politiques ont-ils consulté comme experts en réseaux avant de décider de leur campagne cache-sexe? Rien de bien sérieux d’évidence. Un peu de communication et passez muscade sur le fond.

En fait, rien ne semble se passer pour sécuriser au plus vite le pays.



120 millions perdus par heure de délestage



Ce n’est pas qu’une anecdote, ces délestages plus ou moins hypothétiques. C’est toute notre économie, nos emplois qui sont en jeu. L’économie souffre de cette désinvolture d’Etat, de ce perpétuel manque de vision politique à long terme. “Il ne faut absolument pas négliger, souligne le professeur Damien Ernst, mine de rien sommité mondiale du genre, les conséquences. C’est terriblement destructeur de richesse. Une heure de perte d’approvisionnement pendant un « business day », ça coûte 120 millions d’€ à l’économie”

Le CEO à l’autre bout du monde du monde qui zyeute la carte d’Europe pour y placer l’un ou l’autre investissement, vous croyez qu’il va aller le jouer dans un pays dont l’approvisionnement en électricité ne lui est pas garanti?

Comme le dirait Nabilla, c’est tout simple: si t’as pas d’électricité, t’as pas de croissance.



Michel HENRION.
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Interview-express de l’expert Damien Ernst (ULg)

“Electrabel ne rénovera pas Doel 1 et Doel 2 sans être subsidié par l’Etat”



Question : Que devrait faire Marie-Christine Marghem, la nouvelle ministre MR de l’énergie ?

Damien Ernst (ULg): -“ La nouvelle ministre est dans une situation extrêmement inconfortable: il n’est pas possible d’augmenter significativement la capacité de notre pays en moins de trois-quatre ans. Je lui conseillerais de tout faire pour que la situation n’empire pas d’ici l’hiver 2015-2016. Si elle ne fait rien, on risque de perdre encore plus de 1000 MW de centrales thermiques. On annonce aussi la fermeture de Doel 1 et Doel 2 pour l’hiver 2015-2016, ce qui risque de conduire à une perte additionnelle de 900 MW. Sans vouloir jouer les alarmistes, si on perd encore 1900 MW de capacité en 2015, on sera réellement dans une situation catastrophique ! “



Q: -La solution serait-elle de prolonger les centrales nucléaires de Doel 1 et Doel 2 ?



-Mme Marghem (MR) devrait d’abord essayer de sécuriser les 1000 MW de centrales thermiques qui sont menacées en augmentant la taille de la “réserve stratégique”. Pour ce qui est de Doel 1 et Doel 2, cela s’annonce être un dossier pour le moins difficile. Je ne suis même pas sûr que cela soit possible pour l’hiver 2015-2016, car ça prend du temps d’obtenir du nouveau combustible. Comptez quelque 18 mois… D’autre part, l’Agence de Contrôle Nucléaire n’autorisera probablement pas la prolongation de Doel 1 et Doel 2 au-delà de quelques mois par rapport à leur date de fermeture sans des investissements considérables. Il faudra plus de 600 millions d’euros. Or, il est quasi certain qu’Electrabel ne se lancera pas dans de tels investissements sans une “garantie de profitabilité” donnée par l’Etat belge. Vu le prix très bas de l’électricité sur les marchés de gros, il y a même fort à parier que cette garantie de profit devrait se traduire par un subside de l’Etat pour Electrabel. Ce qui pourrait être politiquement assez difficile à gérer...”






 “Le photovoltaïque est déjà rentable lorsqu’il est

consommé localement, avec des batteries”



-Alors, le rêve du renouvelable serait-il mort ?

Damien Ernst (Ulg): -“Le belge est en désamour avec les énergies renouvelables car il a l’impression qu’elles ont couté cher, trop cher. Et qu’elles ont fragilisé sa sécurité d’approvisionnement. Ca se répercute sur les politiques qui semblent ne plus vouloir soutenir activement la filière, sans peut être le dire. Or -même si l’on met de côté toutes les considérations et passions écologiques- le renouvelable est toujours intéressant. Car il offre une vraie solution pour réduire nos besoins en importation d’énergie, qui nous coûtent de plus en plus cher. Tenez-vous bien: en 1999, l’Europe importait pour 84 milliards d’€ en énergie. En 2011, la facture atteignait …488 milliards d’€, un montant dont l’ampleur étouffe réellement l’Europe.”

- Qu’est-ce qui pourrait réanimer la filière?

-  C’est tout simple: les progrès technologiques! Notez bien ceci de peu connu: même sans subsides, le photovoltaïque est déjà rentable en Belgique lorsqu’il est consommé localement.  C’est-à-dire lorsque le photovoltaïque ne doit pas transiter par le réseau électrique global pour alimenter les charges. Les gens ne se rendent pas compte que c’est déjà financièrement intéressant pour eux d’installer du photovoltaïque sur le toit et éventuellement aussi quelques batteries dans leur cave, même sans subsides.

Ces progrès permettent déjà d’avoir en Belgique des éoliennes qui sont compétitives avec des centrales au gaz. D’ici quelques années, même le photovoltaïque belge sera compétitif avec lesdites centrales…




“On va moins dépendre des réseaux électriques”





Damien Ernst (ULg): -“On va migrer beaucoup plus rapidement que l’on ne le pense vers un monde où la majorité de l’énergie générée le sera grâce à des éoliennes et du photovoltaïque. La seule chose dont je ne suis pas sûr c’est la place que nos sociétés donneront au réseau électrique. Je pense qu’il n’est pas impossible que notre dépendance vis-à-vis du réseau diminue de plus en plus, au profit de la génération distribuée et du stockage distribué de l’électricité. Quoi qu’il en soit, nos systèmes électriques/énergétiques vont muter très fortement dans les années à venir.”

(propos recueillis par Michel Henrion pour M...Belgique)















mercredi 12 novembre 2014

Stress test pour le gouvernement Michel (M... Belgique hebdo du 31/10/2014)



Ce pays vit décidément à l’époque du jamais vu. Jusqu’ici seuls les spécialistes des relations sociales ont apparemment photographié l’inédit du vaste mouvement social programmé jusqu'au 15 décembre. Ceux-ci ont beau fouiller dans les annales syndicales, nada à comparer, à tout le moins depuis l’après seconde guerre mondiale.
C’est le fait marquant: les trois syndicats de toutes les tendances (socialiste, chrétien, libéral) qui conviennent, pour la première fois ensemble, d’un “plan d’action” s‘étalant sur cinq dates tant au Nord qu’au Sud. (manifestation nationale à Bruxelles, trois jours de grèves tournantes par provinces et une grève nationale le 15 décembre). Olé.
Car, dans l’histoire sociale de ce pays, les syndicats sont loin d’être toujours sur la même longueur d’ondes. Parce que la sensibilité n’est pas la même en Flandre qu’en Wallonie. Parce que les élections sociales postulent la concurrence. Parce que, si les organisations syndicales veillent toutes à leur image d’indépendance vis à vis des partis politiques, (c’est particulièrement le cas, ces temps-ci, à la FGTB vis à vis du PS et de ses “ciseaux”) cela n’empêche pas les proximités, les amitiés et les relais. Et cela vaut tout autant pour le patronat, Bart De Wever n’hésitant pas à proclamer en son temps que le “VOKA était son patron”, entendez l’influent  lobby des 18.000 PDG de Flandre.

Poupehan: lorsque Jef soutenait Wilfried

Le gouvernement Martens-Gol des années 80’, si souvent évoqué ces temps derniers, s’était ainsi appuyé sur les fameux accords secrets de Poupehan, ces collines boisées de la Semois ou Wilfried Martens s’en allait parfois à la messe avec trois amis sociaux-chrétiens. Dont le gouverneur CVP de la Banque Nationale et l’atout Jef Houthuys, à l’époque tout puissant boss des syndicats chrétiens. Si la CSC wallonne de l’époque était pour le moins sceptique quant aux sacrifices exigés par “l’esprit du Cardinal Cardijn” , Jef Houthuys -fort du lourd poids du Nord en interne ACV-CSC- soutenait dans l’ombre Wilfried Martens. Sa formule est restée célèbre: “ Wilfried, vous dites ce qui doit passer au syndicat: je m’arrangerai pour que ça passe”.  
De même peut-on rappeler, même si toute comparaison avec la situation actuelle est totalement hors de propos, que  lors des ”Grèves du siècle” (cinq semaines) de 1960-1961 contre la “Loi Unique” de feu Gaston Eyskens, les syndicalistes wallons d’André Renard- qui allaient marquer l’histoire du fédéralisme et de l’autonomie wallonne- s’étaient vite senti seuls, les actions des syndicalistes chrétiens étant bridées par leurs instances. (la FGTB flamande n’adhérant pas non plus).
Bref, tout ça pour souligner que l’unité syndicale dans l’action est plutôt chose rare.

En toile de fond, l’enjeu du modèle social à la belge


Contrairement à ce que d’aucuns pensent, s’il y a une règle médiapolitique à retenir c’est celle-ci: un mouvement social, ça ne se décrète pas. Comme le dit en substance Marc Goblet, le nouveau secrétaire général de la FGTB, c’est plutôt la base qui dirige… Et celle-ci l’a apparemment fait asavoir très vite aux trois syndicats: l’accord de gouvernement #Michel1 (saut d’index, réforme des pensions, coupes dans la sécurité sociale…) ça ne le fait pas.
Avec, en toile de fond, un truc bien belche mais essentiel aux yeux syndicaux: l’enjeu du “modèle social belge” de concertation que-le-monde-nous-envie-depuis-1944.
Dans l’esprit de la Libération, patrons et syndicats avaient en effet décidé de se définir comme des “partenaires sociaux”, s’appuyant sur des institutions ad hoc comme le Conseil Central de l’Economie ou le Conseil National du Travail.
 La philosophie en était très simple: au delà de nos rapports de forces, cherchons le compromis, visons autant que possible la paix sociale, nouons entre nous des accords interprofessionnels tous les deux ans et laissons de préférence l’Etat en retrait. Juste prié, à l’époque, d’intervenir s’il fallait légiférer ou stabiliser des accords noués dans ladite concertation.   C’est de ce système de concertation qu’est notamment né, entre bien d’autres avancées, le “salaire minimum légal” (adopté en 1977)
Oh, bien sûr, comme le chantait Brel, il y eût bien des orages dans le couple des partenaires sociaux.
Et des périodes roses (shake-hands ininterrompus de 1986 à 1995)
Mais aussi, au fil du temps, un retour de plus en plus marquant du politique dans la négociation. Elément un brin technique mais marquant : l’exemple de la “Loi de compétivité de 1996”, qui fixe depuis lors des marges salariales préventives.
Oh, le monde évolue: la Belgique s’est fédéralisée, a cumulé les réformes de l’Etat. D’ou la naissance d’autres modes, d’autres lieux de concertation sociale tant en Wallonie qu’à Bruxelles.
Mais, en gros, l’esprit demeure le même: se concerter.

La concertation, remède souvent miracle

L’autre dimanche, sur le plateau de Controverse (RTL-TVI) une joute verbale l’a bien illustré. On y discutait du climat pour le moins agité à la SNCB. Et on y vit Etienne Schouppe, figure du CD&V mais surtout ancien CEO de nos chemins de fer s’accorder soudain avec Marc Goblet (FGTB). Les deux en choeur-embrassons-nous-Folleville: “Mais bon sang, mais c’est bien sûr que s’il y a concertation, nous trouverons une solution”.  Et les syndicats de cheminots de relever que les actions spontanées ont cessé dès lors que Jo Cornu, le nouveau CEO du rail, daignait accepter se réunir.


Le hic, pour les trois syndicats, c’est que si la déclaration gouvernementale est bien truffée de phrases appelant à la concertation, nombre de décisions sont d’ores et déjà bel et bien prises par le gouvernement du libéral Charles Michel. Ce qui ne va doncpas sans fâcher les militants du syndicat… libéral, “parfois bien plus énervé que des militants du PTB”, raconte un syndicaliste chrétien.

“Mais qui crée du désordre? “

C’est tout le paradoxe: se déclarant très responsables dans leur plan d’action, fuyant même toute récupération des politiques,  les syndicats se posent en quelque sorte, par leur appel incessant à la concertation sociale, en défenseur de l’”ordre social”, bref du modèle belge très ordonné de dialogue social.
Le désordre, à leurs yeux, ce ne sont pas les actions spontanées ou autres: ce sont les mesures prises par une coalition qui, à leurs yeux, nie la concertation.
Le bras de fer entre le plan d’action syndicale et le gouvernement s’annonce délicat.
Les syndicats ne sont pas sans ignorer que, même si la N-VA n’a guère –et c’est un euphémisme- de sympathie pour ce qu’ils représentent, nombre de leur affiliés, de leurs représentants ont bel et bien voté N-VA. Qui adoptera sans doute aussi, au sein de la coalition gouvernementale, la position la plus rigide.
Et ce contrairement au CD&V, qui n’apprécie jamais d’être malmené par son aile démocrate-chrétienne, vitale pour le parti depuis le large exode d’électeurs vers le parti de Bart De Wever.
Dans les milieux gouvernementaux, on ne fait d’ailleurs pas grand mystère de la stratégie à développer: tenter de concéder suffisamment à l’ACV-CSC pour qu’elle se détache de cet inédit très large Front Commun; pour tenter de fissurer la cohésion syndicale Nord-Sud.
La mobilisation syndicale est d'ailleurs, mine de rien, de plus en plus ardue au fil de la disparition des toutes grandes entreprises. “Jadis, commente un syndicaliste aguerri, les gars qui venaient en masse de Cockerill ou des ACEC, ça suffisait ”.

Michel HENRION.


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vendredi 7 novembre 2014

Comment le ministère de l’émotion régente la rue de la Loi (M...Belgique 24/10/2014)

 

L’autre matin, Pascal Vrebos me téléphone, la voix parfumée à l’envie (émotion positive) : “Dis Michel, ne pourrais-tu expliquer aux lecteurs de M…Belgique le rôle des émotions en politique belge?”. Aussitôt des images toutes fraîches déboulent: les vertèbres du dos de Laurette Onkelinx qui se bloquent le soir même de son exit de 22 années passées au gouvernement fédéral (de l’influence du psy sur le corps); le visage du très pro Didier Reynders parvenant pourtant mal à cacher sa peine que le poste de Commissaire Européen lui échappe (émotion négative de besoin); l’affolement (émotion d’anticipation négative) d’un Siegfried Bracke -néo-président N-VA de la Chambre au prénom émotionnel d’une époque- incapable de gérer  la séance parlementaire de la Déclaration gouvernementale de Charles Michel. Du coup lui-même prvié de sa joie et émotionnellement choqué (insatisfaction négative) par ce climat de jamais-vu
En fait, on dit parfois que l’homme politique est comme ces boules de verre avec de la fausse neige à l’intérieur. Pas faux: l’élu du peuple  passe son temps à secouer ses émotions. Et ne voit la rue de la Loi -ce qu’on appelle le “jeu politique”- qu’à travers le filtre de ses passions, de ses  émotions au jour le jour.

La haine, l’émotion celée

Ca surprend, mais la haine est sans aucun doute l’émotion principale en politique. Oh, le politologue lambda, qui préfère généralement causer positionnements et idéologies,  évite généralement cette vision dérangeante.
On l’a vu ces jours derniers: des électeurs tout heureux (émotion de contentement, sinon pour d’aucuns de délectation) de voir les deux partis socialistes évacués de la rue de la Loi s’étonner, assez paradoxalement, que SPa et PS entament illico une opposition hard. Ce qui n’est pourtant pas sans logique puisque tout qui connaît quelques rudiments de la communication politique  sait que l’image d’un nouveau gouvernement se joue très vite, dès sa venue. C’est pourquoi, dans un  Parlement redevenant soudain intéressant, #Michel1 est né dans un climat de fureur, de rage, de colère, d’agressivité, voire de détestation. (autant d’émotions négatives, comme on dit en psy)
Toute l’histoire de Belgique est marquée par l’émotion, avec des moments extrèmement forts et majeurs: la Question Royale,  la Guerre Scolaire, les Grèves historiques de ’60 d’André Renard, voire le Carrousel Fouronnais, symbolique de ce qu’une question communautaire peut vite dégénérer…
Oh, Jan Jambon et Théo Francken, eux, ne font que passer, mais leurs propos douteux n’en ont pas moins déclenché une vague émotionnelle au Sud du pays. Qui laissera, cela dit, bien des traces: notamment au Nord.
C’est que les fréquentations, les  amitiés particulières des désormais ministres  N-VA Jan Jambon et Théo Francken sont à replacer dans un contexte flamand. Il y a, comme partout, quelques idiots au Nord. Mais pour nombre d’habitants des Flandres, la collaboration n'est pas à voir en blanc ou noir: mais plutôt en gris.
Ce n’y est pas quelque chose de binaire.
Vaste débat que celui des visions Nord-Sud  de la collaboration: ce qui est sûr c’est que l’opposition à #Michel1, tant francophone que flamande, ne pouvait manquer - dans un combat politique ou l’émotionnel est toujours une arme d’assaut forte- de s’en emparer.

Règle de base: déconsidérer l’adversaire


Car la règle de base à retenir, pour ce qui est de l’émotionnel politique, c’est que le mécanisme du combat politique vise toujours à ruiner l’adversaire. A le déconsidérer, ce pour quoi tous les moyens sont bons. Surtout lorsque, comme avec la N-VA,  les pièges tombent comme cadeaux de Noël. L’objectif est classique et de toutes les époques: susciter des dissensions, influer sur les esprits des électeurs et sur l’opinion par un travail médiatique de fond.
Un autre exemple récent ? Un des points controversés de l’après-élections est de savoir qui a mis réellement fin à l’idée d’une hypothétique tripartite? Le cdH, qui n’aurait pas voulu d’une telle formule en Wallonie? Le MR, qui aurait déjà prémédité de débarquer le PS? PS et cdH qui auraient mis le MR devant le fait accompli dans les entités fédérées francophones?
Ce qui est certain, c’est que toute stratégie agressive entraîne une émotion de colère, bref  des représailles. Dans ce cas ce fut sans doute cette coalition inédite -pour d’aucuns “extravagante”-  dont nombre d’analystes postulent qu’elle n’est basée somme toute que sur une autre émotion: l’amertume (émotion négative par rapport au besoin) et une volonté de revanche.
Il ne faut pas tromper sur la forte réaction syndicale qui se dessine: c’est rare qu’un tel Front Commun syndical (rouges, verts et bleus) se forme et, surtout, reste uni dans les actions à venir; se sentant en fait, bien au delà du programme de #Michel, agressé émotionnellement dans leurs raisons d’être.
L’émotion est donc partout rue de la Loi: comme l’a si bien défini Pierre Lenain, “l’homme politique vit dans un monde précaire, instable, incertain, au jour le jour: et il tient avant tout à rester dans le jeu”. Bref, un monde hostile, fait souvent de peur (émotion d’anticipation) de l’avenir (ah, les angoisses, la crainte des rivaux, de la chute électorale…)

L’art de susciter des émotions

Bons connaisseurs de la psychologie des foules, les politiques jouent sans cesse sur l’émotionnel, sur le registre affectif.  Pour, bien évidemment, inciter leurs électeurs à penser comme eux. La politique, c’est quelque part l’art de susciter des émotions.
Le politique de centre-droit agitera toutes les formules capables de produire leur petit effet émotionnel subliminal: les “abus des chômeurs”, les “gréviculteurs”, ce genre.
A l’inverse celui de centre-gauche évoquera l’ “odieux capital”, “la socialisation des richesses”.  C’est, toutes idéologies confondues, la litanie des formules creuses au succès tout aussi assuré.
En politique, on lutte contre d’autres, mais souvent d’abord au sein de son propre parti.  En communication, les frères ennemis Didier Reynders et Charles Michel ont , le jour de la prestation de serment de #Michel1, joué intelligemment l’émotion, se donnant une accolade remarquée mais de pure communication. En politique, seul le rapport de forces compte: cette fois, il était en faveur de Charles Michel, qui a littéralement piqué son rêve à l’homme d’Uccle.
Hormis quelques rares personnalités adorant le style affectif, le plus souvent l’émotion privée est d’ailleurs étouffée en politique: l’amitié n’y pèse guère ou, alors, on la trouve plutôt souvent dans d’autres partis. Quant aux haines personnelles, elle peuvent vite émotionnellement virer Corses.
Des années durant, Guy Verhofstadt a ainsi refusé tout contact avec feu Wilfried Martens.
André Cools vouait, en son temps, une rancune tenace à Léo Tindemans.
Et pour ceux qui croient dur comme fer que PS et FGTB c’est vice et versa, le même André Cools eut des chocs frontaux terribles avec le leader syndical de l’époque (Georges Debunne) allant même jusqu’à clamer “J’en ai marre des syndicats”.
L’émotion règne même  jusqu’au Palais, et pas que dans les tumultes familiaux.  N’a-t-on pas vu feu Baudouin ne pas parvenir, en refusant de signer la loi sur l’interruption de grossesse, à faire la différence entre sa fonction et son émotionnel personnel? Et que de ministres n’avait-t-on pas vu sortir, blèmes, du cabinet royal? (Le cdH-PSC Philippe Maystadt fut cité comme exemple par Wilfried  Martens)

Se passer d’émotions, où bien les celer…


Curieux: malgré tous les avertissements de leurs experts, des multiples commissions spécialisées ad hoc, la politique tient souvent peu compte des hommes, de l’humain. Pris par leur mission, désormais souvent uniquement budgétaire, les politiques en arrivent de plus en plus à gommer toute émotion, refusant de voir les retombées humaines de ce qu’ils décident, tout pris qu’ils sont par leur “devoir”.  (c’est le cas notable de Maggie De Block, qui avait toujours refusé de se rendre en Afghanistan)
L’homme politique refoule d’ailleurs tellement ses émotions qu’il en tombe même malade: qu’on se souvienne d’Yves Leterme, ce stressé, hospitalisé  pour de sérieux problèmes d’estomac. Mais revenant quasi illico rue de la Loi avec un baxter roulant.
Car un politique se doit de cacher ses émotions perso: la règle est d’être dans le contrôle. Pas de chagrins intimes. Pas de deuils. Pas de faiblesse extériorisée. Pas d’amours contrariées ou par trop scandaleuses. (ah, les SMS d’Yves Leterme)
Jadis pas de divorce possible au CVP pour Wilfried Martens (qui dut céder, furax, colère, la première place européenne à…sa future épouse Miet Smet)
Car tout pouvoir affaibli est, dans ce petit monde là, un pouvoir condamné.
Ils sont rares, les hommes politiques qui acceptent de confesser leurs fragilités  émotionnelles au grand public. Au début des années  nonante, on se souvient pourtant
d’un Elio Di Rupo, ministre débutant qui -au lieu du département de l’Energie- se vit attribuer l’Enseignement, pas vraiment un département fastoche à l’époque.
“Je fus traversé par une indicible frayeur” confessa-t-il.
Depuis, l’homme a plutôt basculé dans le storytelling, vendant plus de mille fois à tous les médias l’histoire de son enfance difficile et de sa famille des Abruzzes.
Le milieu politique est ainsi fait de personnalités des plus complexes. On se trompe ainsi souvent sur #cestjoelle Milquet, souvent présentée comme autoritaire, colérique, mais dont l’émotionnel peut surtout basculer  de la joie, de l’euphorie (émotions positives de besoin) à l’insécurité (émotion négative, “on perd les pédales”). L’émotionnel autoritaire, au cdH, ne serait-ce pas plutôt, sous sa gouaille un brin gauloise, Benoît Lutgen?


L’émotionnel, ça aide souvent à se faire un nom en politique. On a ainsi connu des victimes de faits-divers, de drames remuants se reconvertir soudain, avec plus ou moins de bonheur, en politique. D’aucuns ont disparu (feu Jean-Pierre Malmendier au MR), d’aucuns ont renoncé (Carine Russo chez Ecolo), d’autres persistent obstinément. (Jean-Denis Lejeune, à chaque fois candidat CDH)
Car l’électeur n’est pas touché que par la compétence ou la séduction: mais aussi par cette région inconsciente du cerveau ou germent les émotions.

Colère et petits tyrans

Par contre, l’homme politique affectionne cette autre émotion qu’est la colère.
Pas celles de la population bien sûr. Sauf s’il peut en tirer parti.
La colère, en politique, est soit une colère feinte, quasi stratégique (par exemple pour arracher un accord) soit une perte de sang froid (C’est le célèbre “Casse toi pov’ con” de Sarkozy)
Cela vaut pour la rue de la Loi: bien des journalistes ont été un jour plantés là par l’un ou l’autre politique fuyant émotionnellement une situation qui le dérangeait ou lui échappait.
La colère, c’est souvent un excès de stress, mais pas toujours.
On connaît certains petits tyrans de la politique:  ces ministres qui affectionnent –trépignements infantiles- de jeter leurs dossiers ou leur GSM à travers les pièces, histoire d’humilier. Dans un autre style, on se souvent des horaires vexatoires de l’ancien ministre PS Jean-Maurice Dehousse qui plantait là ses collaborateurs à soumission complète, s’en partait à la dernière séance d’un cinéma et s’en revenait vers 1h du matin pour reprendre une réunion… C’est aussi le même qui bouclait lui –même, de ses petites clés, dans d’immenses armoires, d’innombrables signataires voués à attendre longtemps la griffe ministérielle.

Un bonheur toujours de courte durée

Le soir d’un scrutin électoral, certes, l’homme politique espère la joie, le succès.
Mais ce bonheur est de courte durée: l’ulcère le guette déjà tant il est vite déjà préoccupé  par le scrutin suivant,  guettant le moindre signe de traîtrise, surveillant les jeunes loups qui, forcément, rêvent déjà de lui piquer sa place…
Et lorsque le destin, l’âge, la trahison des alliances, ou un reflux électoral de sa formation (pensée pour Ecolo) frappe le politique, le temps est venu pour lui l’émotion nostalgique de son influence retrécie, du regret des temps passés, de l’âge d’or perdu où on prenait son avis en considération. (sauf en francophonie, quel CD&V prend encore une seconde Mark Eyskens au sérieux?)

L’émotion nous égare: c’est son principal mérite. Et comme cela vaut pour nos politiques, ça explique peut-être beaucoup en ces temps agités.

Michel HENRION