Raser gratis ? Cette expression viendrait d'un barbier qui avait placé jadis une pancarte proclamant ladite formule…Mais notre artisan, tout aussi fûté que près de ses sous, l'y laissait tous les jours. Par conséquent, le naïf qui, le lendemain du jour où il avait vu la pancarte pub, venait se faire raser ou couper les cheveux et qui s'étonnait de devoir quand même payer, s'entendait répondre : "Oui, mais il y a écrit que c'est demain que c'est gratuit !". Aujourd’hui encore, notamment en politique, les promesses des personnalités en vue n'engagent que ceux qui les écoutent sans faire appel à leur libre-examen…Ce n’est pas le cas ici. Où on s'efforce plutôt de manier le mot à couper la langue de bois .

lundi 21 juin 2010

TROUBLES DE L'ELECTION(46): Bart De Wever, l’ours en peluche qui ne regarde pas la poitrine des femmes …


C’est amusant comment, en quelques jours, un quasi pestiféré devient soudain un Vizir d’Etat hautement respectable. Et d’observer tous ceux qui au Sud, depuis dimanche, s’attachent à en savoir plus sur l’informateur quasi formateur Bart de Wever ou sur le programme socio-économique de la NV-A. Qui, selon Laurette Onkelinx, est “moins à droite que celui de l’Open-VLD”. Ce dernier étant, pourtant, selon d’éminents spécialistes universitaires de Flandre, bien plus proche de celui du… SPa que du CD&V. Ce qui complique donc encore un tantinet le jugement.
Si les medias francophones font du “Bart pour les Nuls”, les neerlandophones, eux, en exploitent désormais le filon pour doper leurs ventes, puisque De Wever est désormais le plus populaire et le bekendissime des BV (“Bekende Vlamingen”).
C’est ainsi que l’hebdo “Story” (qui est un peu le "Closer" du Nord) a poussé un peu plus loin ses investigations en interrogeant toutes une série de plus ou moins proches de l’informateur républicain du Roy.
Erik Philibert, son ami et ancien  condisciple du collège d’Edegem et du KVHV ( le cercle d’étudiants Katholiek Vlaams Hoogstudenten Verbond) nous apprend ainsi que, question musique, Bart affectionne surtout les eighties et notamment Rick Astley ( Never Gonna Give You Up) et, en bien plus gothique, les Sisters of the Mercy
Que, question caractère, Bart supporte difficilement que d’autres soient meilleurs que lui.” On jouait au badminton et, au début, il perdait toujours contre nos amis bien plus sportifs que lui.Du coup, il a carrément pris des cours particuliers de badminton pour pouvoir l’emporter…
Que, jadis, Bart échoua dans un entretien d'embauche pour un poste de cadre à la Volksunie, le défunt parti lui préférant son ami Piet De Zaeger, qui faisait lui aussi partie d'une bande inséparable d’une dizaine de students. Le dit Piet nous fait d'ailleurs, lui, une confidence psy : Bart à tendance à se projeter, pour les événements de sa propre vie, dans les scènes-cultes de ses films préférés.
Il est vrai que Bart connaît, séquence par séquence, tous les plans de films comme Pulp Fiction de Tarantino, The Big Lebowski  des Frères Coen, Der Untergang ( “La Chute "d’Adolf Hitler : ça, on sent que cela va encore faire causer…) et Michael Collins.( tiens, tiens, voici le célèbre leader nationaliste républicain irlandais…)
Jadis, Bart et Piet ont même rénové ensemble une ferme du Pays Basque. “Laissez-moi vous dire , dit Piet (un brin inconscient à nouveau des leçons que d’aucuns mauvais esprits pourraient en tirer), que Bart était très bon pour abattre les murs à coups de masse. Les travaux de finition, ça c’était par contre pas vraiment son truc…”
Frieda Brepoels, la “maman politique” de Bart et la seule femme du “top” de la NV-A, connaît Bart depuis lurette, du temps ou, physiquement, il pesait “un quart de son poids actuel”. Elle nous confirme que, dans toute réunion, Bart sourit constamment, son humour permanent étant “une façon de déstresser”. Mais “ c’est un vrai leader qui peut, en quelques minutes, convaincre quelqu’un de le suivre…”
Et, comme tous les proches de Bart, elle est quelque peu inquiète, non pas tellement par sa désinvolture vestimentaire (abonné qu’il est au bleu gris ou au beige) mais bien pour sa santé. Ce n’est d’évidence un secret pour personne dans l’entourage de Bart que celui-ci se nourrit très mal, s’arrêtant chaque soir à la friture ou avalant des “broodjes” à longueur de réunions…(les photos de Bart plus jeune montrent une évolution pondérale spectaculaire…)
Quant à Siegfried Bracke, après avoir conté combien il a été frappé par le charisme de Bart , (“ un jour, j’ai vu des étudiants attirés par lui comme des mouches par un pot de confiture…”) il y va d’une anecdote et d’une analyse bien singulière.
La plupart des hommes regardent directement la poitrine des femmes, nous révèle curieusement l’ancien présentateur vedette de la télé flamande. Bart ne fait pas cela …(sourire de Bracke, précise l’hebdo) Il regarde  d’abord les femmes droit dans les yeux  pendant un bon quart d’heure… “
Pour ses proches, Bart suscite d’ailleurs chez les femmes un sentiment presque maternel. “ Comme un ours en peluche”. Mais Bart, (marié à Veerle, quatre enfants) n’a jamais été un “homme à femmes”.
C’était un beau parleur, intelligent et plein d’humour, mais les femmes n'étaient  pas à cette époque son premier centre d’intérêt…” rajoute son condisciple d'univ Piet Philibert.
Les politologues francophones ne lisent pas “Story”: c’est une source qui explique pourtant parfois bien des choses…

vendredi 18 juin 2010

TROUBLES DE L'ELECTION(45): Du futur Ministre d'Etat Bart De Wever à l'héritier iconoclaste d'André Renard...

Bart De Wever est passionné par l’histoire. Et on ne doute que ça sert grandement son intuition et explique souvent sa stratégie politique. Tout a déja eu lieu, seuls les hommes changent.
Et on met notre main au feu que, candidat à rien (sauf au maïorat d’Anvers) il se méfie grandement aujourd’hui de tout, à commencer par ce Palais à l’entourage si CD&V qui le reçoit désormais si aimablement. Jusqu’à déjà faire évoquer que Bart De Wever pourrait fort bien se retrouver un jour, à l’instar d’Hugo Schiltz ou de Frans Van der Elst, nominé Ministre d’Etat.
Comptez sur Bart De Wever pour ne surtout pas gâcher toutes les cartes qu’il a aujourd’hui en main. Et ne faire aucun show de sa mission.
Peut-être se souvient-il, lui, du libéral flamand Herman Vanderpoorten qui, jadis, fut un informateur royal motus et bouche cousue dont on ne sut quasi rien du rapport final, aujourd’hui enfoui dans quelque archive du Palais Royal..
En attendant, d’ici pas longtemps, Elio Di Rupo sera donc formateur.
Car si Bart De Wever a endossé, il est vrai un peu forcé et contraint par son succès, le titre d’informateur (à force d’inventer des “explorateurs” et des “démineurs”, on en avait presque fini par oublier la fonction toute simple d’ “informateur”), cela signifie, mine de rien, que le fils de mineur et le fils de cheminot peuvent voir un chouia plus loin.
L’un avec ce trait de tempérament très flamand qu’est l’efficacité: pas de temps à perdre en circonvolutions ou précautions oratoires ronds de jambe. L’autre, plus miel, mais qui ne perd jamais son temps jusqu’à parfois même frustrer ses interlocuteurs.
L’un qui, depuis dimanche, symbolise tout ce que souhaite, tout ce que veut le Nord du pays. L’autre qui est en position stratégique pour, au nom du “pays stable”- ce slogan à total double sens- faire passer au Sud une réforme secouante de l’Etat. (c’est amusant, De Wever a curieusement repris l’expression-éthylo-clé: un “grand accord exceptionnel” de Michel Daerden)
Et ce n’est pas par hasard si, en communication, le “grand wallon” Elio déboule désormais chaque jour dans les medias: c’est qu’il faut, après que les partis francophones aient tant diabolisé la NV-A, reconvertir les esprits, les préparer à un double choc.
Celui de la négociation poussée avec “le gros flamand” (en français itou dans la presse flamande) de la NV-A et celui d’une évolution désormais très radicale du pays hors tout ce qui touche à la Sécurité Sociale, la seule ligne vraiment au rouge du PS. Car c’en est bientôt fini de faire comme si: de faire accroire que des compétences autres que des poussières légales pourraient venir “renforcer le fédéral” comme le trompette encore le “vieuvieuzelas” Francis Delperée pour le CDH.
Et les signes, petits ou grands se multiplient : que ce soient les organisateurs du fameux “Gordel”, la promenade-manif cycliste flamande autour de Bruxelles, qui envisagent l’abandon de la coursette noirejaunette l’an prochain ou, au plan anecdotique, le largage par la VRT de la diffusion du concours de la “Babe BHV”, les promoteurs de Miss devant bizarrement se rabattre vers les caméras d’une télé …roumaine.
Plus sérieusement – et cela sera assurément dûment noté au Bd de l’Empereur- , on relève aujourd’hui les propos iconoclastes de Francis Gomez, le président de la FGTB Métal de Liège. Qui est, certes, un syndicaliste un peu hors-normes, pas du tout dans la ligne fédérale du mouvement syndical, mais qui est aussi le reflet d’une tradition d’indépendance, initiée par André Renard, syndicaliste et fondateur du Mouvement Populaire Wallon. Dans “ La Libre” et , de manière plus explicite, dans une édition spéciale, c’est vous dire :-), du mensuel “Rouge Métal”, Gomez communique lourd en prenant carrément fait et cause pour une régionalisation ouhla très accrue. "La situation économique de la Flandre est tout à fait différente de celle de la Wallonie, dit-il, et les remèdes aux problèmes doivent être différents".
L’héritier lointain d’André Renard incite donc les francophones à ne conserver... que la seule sécurité sociale au niveau fédéral. Finis donc, pour cet hérétique, les accords interprofessionnels nationaux qui, selon lui, in fine, handicapent les négociations régionales: "Ce ne sont jamais que des compromis minimalistes et boiteux qui finalement génèrent des tensions dans les secteurs ou les entreprises, alors qu’au départ ils devaient être un socle commun satisfaisant pour tous”.
On ne sait jusqu’où le PS osera prendre en main tous les leviers à fédéraliser que la NV-A et les autres partis flamands- d’ailleurs tous liés par les historiques résolutions du Parlement flamand- lui proposeront. Mais cette fois, cela devient assez clair, on y va.

mercredi 16 juin 2010

TROUBLES DE L’ELECTION(44)/ Du culot en communication politique... (la curieuse pub MR dans la presse)


En communication, celle de Didier Reynders a toujours eu une caractéristique: elle est culottée.
A tel point que, souvent, on s’est interrogé sur ce qui, psychologiquement ou politiquement, la motivait. Tiens, on se souvient ainsi qu’aux élections communales liégeoises de 2006, le président du MR afficha froidement “ Didier Reynders, votre bourgmestre !”. Un ton conquérant qui était tout de même assez étrange puisque ses chances étaient aussi minces que le signataire de Guido De Padt (si vous ne savez pas qui c’est, don’t worry, vous n’êtes pas le seul)
Et voici que, dans la presse quotidienne de ce matin (16/06), le président du MR remet ça. Avec une insertion pub tout aussi gonflée à l’helium culotté. Bon, c’est évidemment un tout grand classique que de remercier son électorat et ça ne mange pas de pain.
Mais de là à adopter un ton tinorossié ( “ 1 francophone sur 4 a voté MR  !”) assorti d’un point d’exclamation-laurier de César, là, ça surprend un tantinet.
Car chuter de 835 073 électeurs à  599.618, ça s’est remarqué tout de même un chouia.
C’est un très vieux truc de com, bien sûr, que de relativiser une déconfiture.
Et ce n’était pas forcément une mauvaise idée que de faire asavoir- à l’heure ou Elio Di Rupo coupe son Blackberry et ou Bart De Wever le délégue carrément à Liesbeth Homans, sa fidèle lieutenante- que le MR pesait tout de même, avec ses 24,32%, bien plus qu'Ecolo ou CDH, relégués cette fois bien loin derrière. De fait, 24% c'est toujours du lourd.(Encore le premier parti à Bruxelles, le deuxième en Wallonie et toujours la seconde famille...)
Mais alors, en communication, après un tel recul aussi sensible (une "défaite" a balancé Gerard Deprez, vice-président MR-MCC) on prend plutôt un autre ton . On la joue plutôt modeste, ce qui, dans cette situation là, est toujours positif car plus crédible.
Une bonne formule com’ du genre :
C’est vrai, au MR, on est vraiment déçu, on s’est un peu planté, mais votre voix continue à peser de tout son poids…”.
C’était d’ailleurs un peu le ton du très bon discours, empreint d’une certaine humilité, de Didier Reynders, dimanche soir.
Alors, cette pub au ton un brin taratata (ah, un point d'exclamation suffit parfois à tout gâcher...) survenant aujourd’hui dans un climat de purée de pois cassés, c’est vraiment bizarre. Sauf si c’est juste destiné aux militants et sympathisants MR. Sinon, en communication, c’est vraiment prendre l’électeur pour un neu-neu-bleu amnésique très précoce…

lundi 14 juin 2010

TROUBLES DE L'ELECTION(43)/ Et si le cannibale De Wever et le papillon Di Rupo se trouvaient ? (de la conjonction des ambitions des hommes)

Bart De Wever s’est doté d’un nouveau surnom: c’est le “ cannibale”.
Celui qui, à l’instar d’Eddy Merckx, rafle toutes les mises.
Et ce n’est pas fini: la victoire est un aimant.
Dans la perspective des communales de 2012 -c’est demain- et dans l’état de capilotade d’un perdant CD&V promis à bien des déchirements internes, gageons que bien des mandataires locaux vont déménager non sans quelque opportunisme vers les rangs du parti de Bart De Wever.
Et structurer davantage la base locale militante d’une NV-A déjà fortiche pour ce qui est de son formidable réseau d’universitaires et d’intellectuels sympathisants.
Et on ne serait, nous, pas autrement plus étonné que ça si, au détour de négociations fédérales qui positiveraient, la NV-A en profitait pour revendiquer in fine au passage- tout étant dans tout- le poste de Président du Gouvernement flamand, le seul vrai niveau de pouvoir qui l’intéresse…
En communication, un moment très fort de la soirée électorale, que j'ai relevé dans la spéciale télé de "Sans langue de bois", fut en tout cas cette petite phrase de la présidente désormais incontestée des socialistes flamands, Caroline Gennez .
Je félicite MON AMI Bart De Wever” a-t-elle lancé de sa tribune rouge.
En télé, on entendit alors des ooooh de surprise tétanisés sortir des rangs des militants du CDH habilement réunis pour fleurir Joelle Milquet et donner l’image d’une victoirette…
C’est que, tout au long de la campagne, les partis francophones n’ont eu de cesse :
- soit d’être dans le déni en agitant de l’Union qui fait la force, gommant BHV et autres mouvements de fond confédéralistes en Flandre…
- soit de diaboliser électoralement Bart De Wever, avec une dialectique très ambigue visant souvent mine de rien à faire confondre NV-A et Vlaams Belang.
Opération dangereuse et quelque peu écoeurante: agiter l’image du croquemitaine De Wever, ben oui, ça rapportait des voix mais, léger défaut, ça renforçait illico d’autant la NV-A en Flandre… (1)
Donc, l’heure est à la reconversion-exorcisme fissa rapidos de l’opinion francophone, à la grande réhabilitation express de Bart De Wever. Oh, on y met certes encore bien des méfiances (justifiées) mais on y vient très vite. Ce qui n’est d’évidence pas facile pour d’aucuns. ( Le “passeur de lumière” Francis Delperée et Joelle Milquet, ce matin, traînaient encore des pieds, la présidente doucement sortante du CDH qualifiant encore vraiment inutilement Bart De Wever de “Napoléon” et, bien plus gravos, niant encore jusqu'à l'absurde le message très clair envoyé par l’électeur flamand…)
Et on prend le pari qu’après avoir prudemment évité les medias francophones en campagne, Bart De Wever, qui entend rassurer le Sud, y sera plutôt présent dans les jours et semaines à venir. Qu’on va peu à peu, au Sud, découvrir sa personnalité pour le moins complexe, sa petite famille si médiatisée en Flandre. Qu’on va comprendre que ce n’est évidemment plus son seul passage dans des jeux télé (“Het Slimste Mens”) qui explique cette vague électorale jaune.
Formidable communicateur, Bart De Wever avait déjà fait attention à tous les détails dimanche soir : le drapeau européen -une étoile remplacée par un lion- supplantant le drapeau flamand, (on était loin des images très arrogantes de la fête à Leterme de 2007 !), un discours main plutôt tendue, plutôt rassurant, stratégiquement ouvert et positif et en français bien sûr. Même Geert Bourgeois, le “Robespierre” de De Wever, s’est prêté au jeu de l’interview en francophone.
Bref, les “vuvuzelas” du flamingantisme n’étaient volontairement pas tonitruantes…
Clair, direct, l’humour acéré, rhétorique redoutable, gageons qu’on entendra désormais pas mal Bart De Wever désormais côté francophone. Et qu’il pourrait vite, son style direct aidant, y devenir même, si, si, assez populaire. Est-ce hérétique d’intuitionner que bien des wallons, bien des francophones, ne sont plus demandeurs de rien mais de  quelque chose de banal: être simplement vraiment gouvernés.
On ne cessera jamais de répéter que voter pour Bart De Wever, c’était vu de Flandre poser un vote modéré. Et que l’homme, en bon ancien de la Volksunie, dont c’est le triomphe posthume, (pour rappel, la VU fit jusqu’à 20 sièges du temps des Schiltz et Anciaux) ne veut en aucun cas d’un ”parti stérile” qui ne prendrait pas ses responsabilités.
On ignore évidemment tout de ce qui peut se passer. Il est assez limpide qu’Elio Di Rupo a eu des négociations informelles avec le CD&V pour nouer un axe évident et que certains contacts ont eu lieu, indirectement, via les socialistes flamands, avec la NV-A. Mais après…
Bart DeWever se voit un destin historique en Flandre. Elio Di Rupo a, depuis des années, déployé, lui, des trésors de stratégies diverses et une persévérance inouie pour pouvoir se hisser un jour au 16 rue de la Loi.
Si les deux ambitions s’accordent, s’équilibrent, on risque demain d’être surpris.

Tiens, en feuilletant mes archives de communication, j’ai retrouvé ce vieux discours d’Elio Di Rupo. L’honnêteté intellectuelle commande évidemment de ne pas l’utiliser au pied de la lettre ( le mot “confédéralisme” était alors, évidemment, prononcé dans le climat de l’époque), mais, sur le fond, c’est très intéressant. On cite :

Qu’allons-nous faire de ce pays? s’interrogeait Elio Di Rupo en 1988. “ D’abord, me semble-t-il, combler le fossé de l’incompréhension(…) La fusion des flamands et des wallons , artificiellement opérée en 1831, s’est avérée au fil du temps un mélange hétéroclite, parfois explosif. Et il est vain de souhaiter son maintien. En revanche, l’avènement d’une Belgique fédérale ou confédérale à édifier de façon équilibrée et stable répondrait aux aspirations des deux Communautés et chacune pourrait tirer profit efficacement de sa différence culturelle et économique..” (session extraordinaire de la Chambre du 14 mai 1988).

Si jamais Bart, qui entend entrer dans l’histoire et Elio, qui entend être au sommet, au delà de leurs personnages, de leur ego, de leurs discours de show politique convenu, se trouvaient miraculeusement, ça pourrait  devenir très inattendu.

(1) Ca laisse des traces: ce lundi matin encore, une photo circule sur le Net, manipulatrice. C’est un banal instantané d’une milliseconde de Bart De Wever, saisi par un objectif le bras droit tendu, un hasard dans sa gestuelle de communication festive de dimanche soir au “ Claridge”. Bref, on essaie de faire accroire que Bart De Wever aurait fêté son succès d’un salut para-nazi. Beurk.

samedi 12 juin 2010

TROUBLES DE L'ELECTION(42): Les photos les plus kitch de l'album à Michel Daerden (art contemporain)

  C’est vraiment un très curieux ballet. Le candidat orange croise le candidat bleu qui lui-même vient de saluer le candidat rouche lequel vient juste de réussir à dribbler, dans l’allée “textile-tout-à-5-euros”, le candidat vert… Je suis quant à moi, après tant de campagnes électorales, toujours pour le moins dubitatif quant à la grande efficacité réelle, dans un rapport “énergie déployée-cueillette de voix” de ces conquêtes de parts de marché. Que n’en ai-je vu, de ces candidats forçant leur nature, mal à l’aise, tentant de placer leur tract et taillant parfois longuement le bout de gras pour tenter de convaincre un chaland aux opinions  souvent d’ailleurs déjà bien arrêtées…
  La réflexion commune un peu poujade (“Tiens, on ne les voit jamais entre deux élections et met’nant, sont là avec tous leurs papiers !”) a du juste. Je préfère de loin l’homme politique qui, tout le fil de la législature, se mêle  à tous les activités de sa région , et pas seulement les folkloriques et autres réunions de pensionnés. Ou qui, à l’instar d’Elio Di Rupo qui, il le raconte souvent, met une heure à traverser son centre-ville parce qu’il  essaie de prendre tout de même le temps de prêter attention à ceux qui l’interpellent au hasard d’un croisement…

Une exception à cette interrogation: l’inévitable “phénomène Daerden”, le ministre des Pensions se faisant un devoir de réviser à chaque scrutin sa controversée popularité sur tous les marchés de la province de Liège. Si on ne peut pas dire que son consternant  slogan 2010 (“Tout le monde aime Papa”) relève le niveau du débat (soyons gentiment euphémiques) et l’image du politique ( on n'est parfois pas très loin du candidat à “ Dilemne”), c’est vrai que c’est étonnant.
Ce gaillard la frise le “star system” niveau Grand Jojo ou Michael Vendetta et c’est sans doute le seul homme politique francophone à signer des autographes . Et à parfois même presque déclencher des bousculades, si, si.
Sur son site, Michel Daerden publie, depuis des semaines, l’album-photo de toutes ses rencontres. Vieux truc malin: le passant photographié pourra, ainsi, imprimer plus tard ce souvenir mémorable…
Mais ces albums-photo, à les feuilleter, cela vire presque à l’art kitsch.
On y trouve, au fil des hasards, des clichés tantôt émouvants, tantôt un brin grotesques, tantôt interpellants, tantôt dégageant assez finement la joie de vivre bon enfant qui fait le tempérament wallon.
Cela mériterait d’être édité en livre d’art, l’album à Daerden.
Ca frise involontairement la sélection pour Biennale d’art contemporain (on est assez sérieux).
Bref, avec un gentil regard non-politique, c’est assez étonnant.
Allez, on vous livre, parmi les centaines de clichés  de Michel Daerden, notre sélection de photos coups-de-coeur…
nb: les attentifs croiseront sur ces photos, deux autres personnalités politiques...




vendredi 11 juin 2010

LES TROUBLES DE L’ELECTION (41): Pour De Wever (9 ans), “c’est tout de même le Roi, le patron du pays ! “(de la pipolisation au Nord du pays)

Pour la semaine de fin de campagne, Bart De Wever a encore reçu un très joli coup de pouce des medias flamands. Qui, tantôt pour des raisons commerciales - la popularité fait vendre et c'est un très bon "client", plein d'humour...-, tantôt pour relayer le combat flamand, ont beaucoup contribué à son vedettariat.
Et la “pipolisation “ de la politique a encore franchi un cap au Nord avec l’interview vraiment très, très précoce, cette semaine, dans le très popu hebdo “Dag Allemaal”… de Liesbet De Wever (presque 3 ans), Simon De Wever (5 ans), Katrien De Wever (7 ans) et Hendrik De Wever qui, a 9 ans, est le portrait tout craché de son papa, sourire ADN compris.
Ce qui est intéressant, en communication, c’est que Bart De Wever n’hésite pas à carrément exposer ses enfants (ce qui est un peu le trait de caractère commun des Bekende Vlamingen…) avec des réponses enfantines tellement rafraîchissantes que cela en devient  vraiment parfois très sympa…
En Flandre, cela ne se vit d’évidence pas comme en Brullonie, ou le pyjama de Jean-Mi Javaux n’a toujours pas fini de faire médiocrement jaser…
Bart expose médiatiquement sa progéniture mais les protège cependant... de la politique. Le leader de la NV-A estime en effet “que les enfants doivent d’abord vivre leur enfance "(…) Même l’aîné de 9 ans est trop jeune selon lui "pour qu'on lui explique les différences entre Flandre et Wallonie". Hendrik sait juste qu’on parle une autre langue au Sud du pays.( “ L’australien”, lance Hendrik pour un peu faire son malin dans l’interview, mais aussitôt repris par son père qui lui demande de donner une “réponse un peu sérieuse”)
"J’attendrai, dit De Wever, qu’ils aient douze ans pour leur apprendre ce ce qu’est la politique. Dites, qu’est-ce qu’un gamin de 9 ans pourrait comprendre à la scission de BHV ?”(…)“ Mais s’ils veulent faire de la politique plus tard, moi, je n’aurai rien contre…”
On apprend aussi que :
- À l’instar d’Alexander De Croo (qui fait construire), la famille De Wever envisage d’acheter une nouvelle maison ( “quelque chose de plus grand”).
-  Que Bart, passionné d’histoire romaine, a passé ses dernières vacances en France, du côté de l’ancienne Alésia. Et que ses enfants n’ignorent non plus rien des Gaulois et de Vercingétorix..
-  que la célébrité de leur papa leur vaut tout de même quelque souci. (“ Bart De Wever est homo, me lance-t-on parfois à  la cour de récréation. Mais je ne sais pas ce que c’est, un homo…”)
Katrien (7 ans), elle, se demande toujours comment sa maman, Veerle, a bien pu épouser (l’an dernier) un “aussi gros Monsieur…
- Hendrik balance que “c’est parce que papa mange beaucoup trop de frites et qu’il ne doit plus s’arrêter chaque soir à la friture en revenant très tard de Bruxelles..” ( les enfants De Wever ne voient leur papa que le matin)
- - Simon aggrave son cas en dénonçant que “dès que papa est à la maison, l’armoire à chips et à chocolats se vide…
- que Bart n’est vraiment pas le prince de la cuisine (“keukenprins”) et que si maman n’est point là, Bart préfère les faire manger au Quick ou dans un resto chinois…
A noter que Bart, déjà l’homme politique le plus “cool” de la Flandre, l’est aussi pour ce qui est des résultats scolaires.
- Hendrik : “ Jamais fâché si j’ai des mauvais points à l’école…
- Katrien : “ J’ai eu un cinq sur dix et il n’a absolument rien dit…
- Hendrik encore : “…et il me laisse jouer au flipper avec mon argent de poche, contrairement à maman…"

Mais, selon Hendrik, “ Pfoe, notre papa n’a peur de rien !
Mais de là à faire du même papa le “baas” du pays, il y a de la marge.
Pour Hendrik De Wever, ça c’est carrément du grand n’importe quoi :
C’est tout de même le Roi, le patron du pays, non ?"

jeudi 10 juin 2010

LES TROUBLES DE L’ELECTION (40)/ TECHNIQUES ELECT-ORALES: “ JE VAIS VOUS DIRE…” (l’amorce de bon sens d’Elio Di Rupo et N. Sarkozy)


C’est décidément difficile, en communication politique, de trouver le juste ton.
Qu’est-ce qui est préférable: le manque d’assurance, le naturel un chouia naïf, le cruel déficit de “métier” (et la politique n’est que cruauté) de Sarah Turine, la co-présidente d’Ecolo, jeune femme brillante mais qui pourtant perd pied et pédales à l’antenne de par une question-piège préméditée de cette grande pro qu’est Joelle Milquet ? Ou le discours totalement formaté des grands carnassiers de la politique, avec leurs discours récurrents totalement préformés ou formatés ? Avec les fausses formules de modestie, les petites phrases proverbiales entendues jusqu’au vertige dans cette campagne, l’écran protecteur du flou empathique, l’art de l’esquive  finissant par tuer toute réponse spontanée ? Lesquelles ont pourtant, en communication, bien plus de richesse significative. (sans doute Alexander De Croo ou Paul Magnette  sont-ils, dans cette campagne, davantage adéquats: déjà beaucoup de métier, de l’intelligence et un discours déjà formaté mais qui ne hume pas encore par trop le discours hyperconstruit…)
Puisqu’on m’a interpellé  à ce propos, j’explicite un chouia ce que je relevais mercredi soir dans “Sans langue de bois ”-“Elio Di Rupo face aux Belges”. /
A savoir que chaque pro de la politique audiovisuelle a ses trucs et ficelles. Et qu’il me frappe toujours, à l’observation de leur communication, qu’Elio Di Rupo et Nicolas Sarkozy ont ce (rare) point commun non politique, en interview audiovisuelle, d’ utiliser la “technique de l’évidence”. Une petite variante  très habile de la vieille ficelle- qui ne “passe” plus) de retourner la question de l’interlocuteur en l’interrogeant à son tour.
Ici aussi, on renverse les rôles, mais en plaçant juste une évidence, une amorce de bon sens.
Je vais vous dire…” a placé ainsi maintes fois Elio Di Rupo dans ses réponses de jeudi soir.
Une formule qui permet bien sûr de se donner quelques millisecondes de réflexion, de retrouver dans sa base de données le discours de campagne à placer (même s’il s’éloigne à toute vibrure de l’objet de la question) mais surtout de réduire l’interlocuteur ou l’interviewer à acquiescer .
Le “ Je vais vous dire…” force quelque part à regarder passer les péniches sur la Meuse.
 Tout comme d’autres formules de la même veine:
-“ Je voudrais vous dire une chose…
-“Savez-vous que…"
-” Est-ce qu’il faut que…
-“Est-ce que vous croyez que…
Qui peut penser que…"
Cette technique électorale, basée sur un bon sens apparent, permettant surtout d’entamer la réponse en la collant sur sa propre démonstration et tout en donnant l’illusion de répondre concrètement aux questions. Prêtez attentivement l’oreille lorsque vous entendrez à nouveau le président du PS, à qui jamais rien n’échappe en matière d'astuces de com …
Et c’est encore plus futé lorsque, tout en s’écartant et en se désintéressant mine de rien de la question originelle, on assortit le tout d’une anecdote vécue, un peu de “storystelling” ne mangeant jamais de pain en campagne……
(“Jusqu’à minuit sur l’internet, j’ai eu des gens qui avaient perdu leur emploi…”, racontait-il l’autre jour)
C’est le nouveau langage élect-oral de pointe : parler vrai en parlant très volontairement comme les “gens” qui parlent vrai.

mercredi 9 juin 2010

LES TROUBLES DE L’ELECTION(39)/ BART DE WEVER SERA RECU AU PALAIS, MAIS APRES ? COMMENT LE ROI ET SON VICE-ROI S’EFFORCENT D’ENDIGUER TOUT CE QUI MENACE LE PALAIS…( de “la méthode Bébert”)

Le roi Albert II a fêté dimanche ses 76 ans. Il règne depuis 16 ans.
Jacques Van Ypersele de Strihou a 74 ans. Et se fait Vice-Roi depuis 27 ans.
Quelles petites fiches l’influent chef de Cabinet du Roi prépare-t-il déjà de sa fine écriture pour le Roi et son traditionnel défilé d’audiences d’après scrutin fédéral ?
C’est une question-clé, car s’il est un moment ou le Palais peut influer sur le cours des choses, c’est bien lors du processus de formation d’un nouveau gouvernement. En désignant Dupont plutôt que Dupont ; ou en lui confiant une mission un peu trop tôt ou  ou jamais ou encore plus tard… On rappelle  ainsi que Jean-Luc De Haene, jugé d'abord un peu trop frustre par le Roi Baudouin, dut un jour s’effacer un temps devant Wilfried Martens…
Quel scénario de crise le Palais nous prépare-t-il  si la NV-A, formation séparatiste- ce qui n’était pas le cas de la Volksunie- et républicaine, devient dimanche le premier parti du pays ? Si jamais Bart en arrivait à rôder (on n'en serait pas plus surpris que cela) autour des 800.000 voix de Leterme, la précédente idole flamande si vite brûlée ?  (et avant lui Steve Stevaert…)
Bart De Wever fut convié à Laeken en 2007: mais c'était du temps ou le  CD&V, par le cartel, lui donnait encore un certificat encore rassurant pour le Palais.
Bart sera reçu sans doute aussi cette fois, encore que rien ne soit vraiment sûr: le Palais nous a déjà réservé quelque surprise. ( mais c'est probable, sauf à générer une vive réaction en Flandre)
Si oui, cela ira-t-il au delà  d'une visite diplomatique ?
C’est au Palais de Laeken qu’aurait alors eu lieu une  “révolution copernicienne”…
On en doute donc fortement. Déjà qu’on y a la chair de poule dès qu’une région du pays se met  à remuer par trop: ce fut le cas jadis pour les régionalistes wallons, c’est aujourd’hui le cas pour les promoteurs du confédéralisme.
Une idée déjà défendue d’ailleurs… en 1988 par le CVP-CD&V Luc Vandenbrande, alors Ministre-Président du Gouvernement flamand. Qui avait affirmé mâlement vouloir “aller plus loin dans le sens confédéral.” Phrase bien banale du jour d’aujourd’hui mais qui valut à son auteur de se faire très vertement  tancer par feu le Roi Baudouin  et d’être ensuite carrément boudé par le Palais, à l’instar d’un Leo Tindemans pour son Pacte d’Egmont finalement raté…
Et feu Hugo Schiltz, lorsqu’il était Vice-Premier Ministre de la Volksunie, fut itou dûment prié de s’excuser et de retirer son propos (“la Belgique ne sera plus notre problème”) faute de quoi il aurait été exclu du gouvernement, a raconté Wilfried Martens.
 Mais la stratégie du Palais, pour freiner une évolution institutionnelle pas toujours à son goût, prend parfois des détours étranges. Pol Van den Driessche et Guy Polspoel, dans leur livre sur la monarchie, ont révélé ainsi que, jadis,  pour torpiller les accords du Lambermont, l’entourage du Roi s’était en quelque sorte allié, dans un concert momentané d’intérêts contradictoires, avec la Volksunie et …Geert Bourgeois (l’autre patron actuel de la NV-A).
Pour freiner la montée séparatiste en Flandre, le Palais a d’ailleurs usé, au fil des années, de diverses tactiques.
Ennoblir d’abord une kyrielle de personnalités flamandes, si possibles proches modérées du Mouvement flamand . Ensuite, envoyer Albert II (en 1994) à la commémoration de la bataille des Eperons d’Or pour lui faire chanter le “Vlaams Leeuw” (à l’instar d’ailleurs de son illustre ancêtre Baudouin en 1887)
Et, plus people, cette semaine, le numéro spécial de “ Nina” ( le coloré  magazine lifestyle flamand) était tout entier consacré à la découverte de la future Reine Mathilde. Opération évidente de com’ vers la Flandre qui est tout sauf un hasard. 
Ou l’on apprend certes que Mathilde “est une maman ordinaire qui fait elle-même les tartines “ mais aussi qu’elle porte des lunettes Armani, une Rolex (6.110 euros) des sacs de chez Delvaux et, pour la déco, fait appel à “Flamant Interiors”, qui n’ont de Flamant que leur nom de famille qui est aussi celui de leur chicos boutique bruxelloise.
De quoi assurément vivement intéresser Bart De Wever qui, à ses heures, affectionne de causer  évolution de la société et qui, il y a peu, s’en prenait à l’influence des suppléments du week-end de la presse Flamande. “ On perd la boussole, disait-il en substance. Ces magazines  du samedi décrivent les voyages les plus exclusifs, la cuisine la plus fine et des bagnoles de rêve.
Le matérialisme devient la seule valeur qui reste aux Flamands...”
Ce n’est un secret pour personne rue de la Loi : le Roi Albert II use et abuse de ce que les hommes politiques appellent entre eux la “méthode Bébert”, entendez l’avion militaire qui envoie souvent au Roi Albert II dossiers ou arrêtés à signer sous des cieux plus ensoleillés.
Et ce n’est pas davantage un secret que, depuis le décès du Roi Baudain, le “Vice-Roi” Van Ypersele, homme très discret, bourreau de travail et idéaliste extrême, déploie beaucoup d’énergie pour tout écrire (les discours royaux), tout contrôler, tout orienter, soit par des objections juridico-techniques soit par l’influence. Bref, faire tourner la boutique avec pour volonté de tout faire pour maintenir l’unité du pays. Un fervent catholique charismatique, avec une expérience d’innombrables cabinets politiques et une banque de données à nulle autre pareille (il est un des rares survivants des années 70-80). Et si le Palais est censé être d’une neutralité active, il ne faut pas aller très loin rue de la Loi pour entendre fuser soupçons et critiques,  l’homme étant souvent critiqué pour sa manière de soutenir en douce des sociaux-chrétiens: du  genre, ces dernières trois années, d'Yves Leterme.
Ce qui avait conduit, en son temps, Guy Verhofstadt a s’interroger assez vertement  sur ce pouvoir tissé autour du chef de l’Etat…
Un pouvoir qui ne semble, las, réagir qu’en fonction d’anciennes règles, d’anciennes méthodes, d’anciennes cartes de visite.
On l’a vu lors de la crise de l’Orange Bleue ou de la chute de Leterme en novembre 2009, le Palais faisant alors appel à tout ce que la Belgique comptait comme vieilles gloires politiques plus ou moins naphtalinées (dont Wilfried Martens, hors de la politique belge active et ignorant largement la très technique problématique de BHV )
En Flandre, Bart De Wever et Alexander De Croo sont désormais les deux hommes politiques les plus populaires. Et cette nouvelle génération politique là, le Palais ne la connaît donc que fort peu…
Comme disait Tristan Bernard, les rois doivent toujours se méfier des as.

mardi 8 juin 2010

LES TROUBLES DE L’ELECTION(38) : QUAND PHOTOSHOP EMBELLIT BART DE WEVER ET FAIT S’AFFICHER “ LA JEUNE SOEUR DE JOELLE MILQUET”…

Pour l’instant réservé à la Défense Nationale française, le logiciel Tungstène n’en est pas encore à sa version algorithmique grand public…C’est bien dommage.
Son objectif ? Simple : détecter les images contrefaites grâce au célèbre logiciel Photoshop (ex-Display), dont les créateurs pensaient, à son lancement, commercialiser… 500 exemplaires (plus de dix millions d’utilisateurs aujourd’hui !) Une technologie qui influe désormais totalement sur les images que nous voyons au quotidien. Avec cette faculté de réécrire sans cesse les événements. Notamment en politique, lorsque Paris Match se fait par exemple prendre à gommer les bourrelets de Nicolas Sarkozy sur une peu flatteuse photo de vacances…
C’est que, pour leur com, les politiques de tous les pays adorent utiliser Photoshop pour lisser leur image… Tout l’art étant d’en faire suffisamment pour que cela reste naturel (laisser quelques rides) mais de ne jamais en faire trop (les dents plus blanches que blanches, comme Gerard Deprez, ça fait tout de même trop bizarre).
Certaines photos nous avaient déjà, perso, secouées. Mais, faute de logiciel-détecteur, on vient d’en avoir la confirmation grâce au quotidien flamand “Het Laatste Nieuws” qui vient de soumettre une série d’affiches électorales à l’appréciation visuelle de trois experts du genre.
Conclusion : à l’exception des candidats du SPa et de ceux de la liste De Decker, les socialistes flamands entendant montrer les candidats comme “communs des mortels”, tous les autres partis du Nord ont photoshopé. D’ailleurs plus ou moins bien, vu le peu de temps laissé par cette élection surprise.
La démonstration évidente en est Bart De Wever, tellement débarrassé de ses petits défauts (sauf ses petites rides de flamand de 39 ans) que son affiche fait presque croire à une peinture hyperréaliste… Jouant à communication ouverte, la NV-A a d'ailleurs permis de comparer la photo réelle avec celle finalement retouchée pour l’affiche de Bart.
Du côté des Verts flamands, on a itou chassé le naturel, fut-ce légèrement: l’affiche en noir et blanc de Freya Piryns, la tête de liste Groen au Sénat, a reçu du blanc pour illuminer ses yeux.
Le même truc de communication en fait que Laurette Onkelinx, tête de liste PS à la Chambre à Bruxelles, qui- ou que vous vous placiez par rapport à son affiche- vous regarde avec le fameux regard de Mona-Lisa, si prisé aux élections.Un tout petit point dans les yeux et hop, zêtes jocondée…
Mathias De Clercq, le jeune poulain de Guy Verhofstadt pour l’Open-VLD a , lui, encore quelque  problo d'acné à 28 ans. Et le candidat Open-VLD de raconter des salades, prétendant “avoir été débarrassé de l’acné par une meilleure hygiène de vie”. Las, les experts sont formels : Mathias De Clercq a été clearasilé à la fonction “healing-brush” de Photoshop.
Mais l’affiche qui a décoiffé les experts, c’est assurément celle de Joelle Milquet (49). “ Ce n’est plus elle-même, et le photographe a très mal utilisé le logiciel, trop fortement “.
C’est simple, concluent-ils : “ On dirait, sur l’affiche, que c’est la jeune soeur de Milquet !”
Bref, au CDH, on photoshope dur. (comme ce fut le cas pour le voile de Manihur Ozdemir)
Mais si , d’Elio Di Rupo à Gerard Deprez en passant par un Michel Daerden ou un Philippe Moureaux (71 ans) tout rajeunis sur les affiches, Photoshop maquille donc joyeusement la campagne, cela, chez nous, se fait sans trop de polémique.
Ce n’est pas le cas partout puisque, lors des dernières élections britanniques (nouveau gouvernement noué en… cinq jours !) on a vécu en Grande-Bretagne une véritable bataille de communication sur ce thème du “fake” photographique.
Lorsque le conservateur David Cameron (aujourd’hui Premier Ministre) placarda le visage de son candidat sur de grands panneaux commerciaux avec une image pour le moins retouchée, cela souleva de vives réactions assez teintées d’ironie. Et déclencha sur le Net, dans les journaux, un grand mouvement humoristique et satirique sur le thème de la “retouche du changement”: plus de 1200 parodies de David Cameron. Tuant pour l'image.

dimanche 6 juin 2010

LES TROUBLES DE L’ELECTION (37)/ THYSSEN FAIT RIRE LE STUDIO A LA VRT: QUAND LES FLAMANDS SE PREPARENT A PUNIR LE CD&V ET A ESSAYER BART…


A la VRT, on a vu, dimanche soir, les partenaires  de l’ex cartel CD&V-NV-A s’affronter durement.
Un duel très direct entre Bart De Wever, encore gonflé par son Congrès, et Marianne Thyssen, dégonflée par le dernier sondage en date.(CD&V derrière le SPa, en troisième parti)
Le public du studio applaudissait De Wever et riait ou s’offusquait de la présidente du CD&V.
Pas seulement parce que cela se fait à la VRT ou qu’en communication, Bart est plutôt un as. Et sa rhétorique régulièrement coup de crosse tout simple, n'autorisant guère de nuances. “Vous dites ne pas bien me connaître alors qu’on a fait un cartel ensemble ?” a-t-il  répliqué à MarianneThyssen, renvoyée dans les cordes avec son sourire pincé assez peu empathique.
Votre bilan  est nul sur toute la ligne” a cogné Bart, plaçant même un clin d’oeil au bon moment. Thyssen a terminé en faisant la moue, comme lorsqu’on a le sentiment que, zut, ça s’est plutôt mal passé dans la chapelure.
Et ce fut pire pour Marianne Thyssen tout au long de l’émission de la VRT (qui rassemblait tous les ténors du Nord). Ce n’est pas une fois, mais à plusieurs reprises, que le public du studio s’est mis à ricaner lorsque la présidente du CD&V tentait de faire valoir un bilan à la Justice…(la direction de la chaîne a dû s'excuser)
Ce qui est  donc en train de se passer, c’est que l’opinion publique flamande se prépare à punir sec les sociaux-chrétiens. Le bon vieux vote-sanction. Pour n’avoir pas tenu les folles promesses flamandissimes d’Yves Leterme et parce que celui-ci (“du niveau d’un échevin à Ypres” avait dit prémonitoirement le journaliste-écrivain du Nord Marc Platel) nous a donné trois années de confusion pschittt à tous les niveaux.
Les flamands sont-ils devenus soudain tous séparatistes ? Mais non: ils veulent simplement qu’on les gouverne vraiment. Comme les wallons. Comme les bruxellois.
Et un million et demi d’entre eux sont en train de se dire : tiens, pourquoi ne pas essayer cette fois la NV-A , qui a d’ailleurs assaini les finances flamandes.(un thème récuremment développé par la NV-A)
Dimanche, derrière la tribune du congrès NV-A de Gand, vieux truc de communication, un grand journal lumineux calculait  en temps réel le trou de la dette publique. Une préoccupation essentielle au Nord ( le quotidien De Morgen a le même tableau défilant sans cesse en homepage) ou la campagne se fait à coups de “plans  d’économies” contenant plus ou moins de “mesures impopulaires” : même le SPa y va de ses milliards à ponctionner. (au Sud on parle juste de “sobriété” et on multiplie les promesses )
On notera d’ailleurs, et c’est tout sauf un détail à l’aube de négociations, que le CD&V, ce faisant, a nettement déplacé depuis 2007 le curseur vers la droite, peut-être encore davantage que l’Open VLD d’Alexander sur certains domaines (pour les pensions et la fiscalité, l’Open-VLD et le SPa sont plus proches)
Donc, si le CD&V, déchiré par les dissenssions, les rivalités, les frustrations d’un Leterme subissait, malgré pourtant le soutien affiché de l’ACV-CSC, une défaite historique (ramené à 16%, c’est un tremblement de terre) ce serait évidemment la tendance modérément modérée du parti, celle actuellement représentée par Marianne Thyssen, qui serait mise illico en cause pour cette campagne électorale si dépeinturlurée couleurs de Flandre. Donc, on verrait sans doute, aux communales de 2012, nombre de mandataires CVD&V rejoindre la formation de Bart. Et le CD&V lui-même se radicaliser pour se refaire: logique.
Et la NV-A, mine de rien,  a communiqué dimanche de façon habile en en appelant à la constitution d’un “ Front flamand”. Pour que les autres partis s’engagent à ne pas participer à un gouvernement fédéral qui ne serait pas doté cette fois d’une majorité en Flandre.
C’est toujours bien de prendre l’initiative et de laisser les autres se positionner par rapport à soi : Marianne Thyssen a pu juste botter en touche à la VRT en disant “qu’elle n’avait pas encore eu le temps de la lire", ladite lettre.
 “ Bart De Wever ? C’est un homme qui a de l’humour, qui est sérieux et dont le radicalisme est vierge. C’est le représentant, comme Alexander de Croo, comme Caroline Gennez, d’une nouvelle génération politique…”
Celui qui s’exprime ainsi (HLNieuws), et dont les avis dénotent un peu dans l’actuel déluge d’interviews redondantes, c’est un revenant politique. A savoir Steve Stevaert, qui présida les socialistes flamands du temps ou ils représentaient encore plus de 20%. Un ex et populaire président du SPa qui préconise d’ailleurs, puisqu’ils ont des programmes très proches, d’aller vers un “regroupement électoral” , sinon une  fusion, entre Spa et Groen, les Ecolos du Nord.
Aujourd'hui, l’homme s’est étonnamment lancé dans les affaires à Cuba- y plumant des tonnes de poulets industriels en copinant avec toute la famille Castro- et surtout au Vietnam ou il est devenu président  d’un énorme projet portuaire à Hai Phong. (groupes Ackermans & van Haaren et CFE, comme quoi on se fait des relations en politique) Mais ça ne l'empêche pas de donner encore son avis : comme la nécessité d'avoir, demain, un gouvernement très resserré, sans secrétaires d'Etat. Et de considérer donc Bart De Wever comme un banal démocrate.
Car s’ils sont soufflés, mais pas encore balayés, par le vent qui semble porter la NV-A, vous ne trouverez aucun responsable politique du Nord, fut-il très à gauche, pour chichiter  à l’instar des francophones.
Qui cependant évoluent mine de rien puisqu’ils y vont  (dimanche soir, à Bel-RTL) désormais tous de leur nouveau refrain : “ Si on peut s’en passer, tant mieux, sinon on fera avec...”.
C’est d'ailleurs un effet de campagne facile : diaboliser encore un chouia la NV-A, plus nuancée que cela ( hier soir, De Wever a encore martelé son réalisme et sa volonté d’avancer pas à pas, comprenez lentement, vers la Flandre dans l’Europe) permet de noyer le poisson. En évitant de devoir parler de ses propres erreurs. A commencer par la formule “ On n’est demandeurs de rien” de 2007. Que plus personne ne se souvient soudain avoir prononcée ...

samedi 5 juin 2010

LES TROUBLES DE L’ELECTION (36)/ ET VOICI LE BUS MATHOT: POURQUOI DES CANDIDATS N’ONT MEME PLUS PEUR… (le contrôle du scrutin 2007 n’a jamais été finalisé au Parlement)

Décidément, en ce scrutin 2010, c’est un embouteillage d’infractions graves à la loi électorale.
Voici qu’après le semi-remorque de Michel Daerden, c’est un ancien autobus du Tec qui circule et rougeoie aux couleurs d’Alain Mathot, l’autre poids lourd (c’est le cas de le dire) de la Fédération liégeoise. Transgressant donc, lui aussi, apparemment sans sourciller, une des dispositions-clé de la loi: l’interdiction absolue de s’afficher électoralement sur une surface de plus de 4m2. On n’est donc plus dans le dérapage isolé: et c’est à se demander si ce n’est pas la Fédération PS de Liège elle-même (président l’avocat nul-n’est-censé-ignorer-la-loi Willy Demeyer) qui a pris la lourde responsabilité de désormais considérer comme tripette toute une législation éthique si difficilement construite.
Car ceux qui sont chargés de la faire respecter ont dû ramer des années pour amener peu à peu les politiques à s’en imprégner. Ce sont des centaines de lettres qui sont parties du Parlement et de sa Commission de Contrôle (présidée, c’est tout sauf un détail, par les Présidents himselfs de la Chambre et du Sénat) pour amener peu à peu partis et candidats à rentrer leurs déclarations de dépenses, déclarer les dons reçus (pour tout don de… 125 euros maxi il faut enregistrer l’identité du donateur) et se dépêtrer avec des paragraphes législatifs très ardus semant l’incompréhension (les campagnes communes de candidats), des formulaires induisant facilement en erreur de bonne foi… Ou harceler des partis rechignant à déclarer les montants qu’ils peuvent, dans une procédure un brin complexe (10% de 25% de leur maximum d’un million d’euros …) allouer en bonus à ceux qu’ils considérent comme leurs “figures de proue”. (35 nominés en 2007 dont 23 CV&V)
Sans parler des partis un peu folklo, comme le président de Velorution (encore candidat en 2010) dont le déménagement sans laisser d’adresse paraît être l’activité favorite…
En fait, on en arrive d’ailleurs à se demander si les poids lourds à mega-affiches illégales de Daerden et Mathot ne roulent simplement pas au cynisme retour électoral très délibéré.
Car ces deux futurs parlementaires ne risquent en fait, à l’analyse fine, quasi rien.
Car si, pour ce qui est des élections communales, un candidat fautif peut être déclaré déchu de son mandat (il existe un arrêt du Conseil d’Etat qui a confirmé la déchéance d’un bourgmestre et de son mandat de conseiller communal). Car si encore, pour un scrutin local, les candidats se contrôlent mutuellement et peuvent saisir une juridiction administrative avec possibilité de recours, dans la pratique des législatives (plainte auprès du Parquet), cette règlementation n’en arrive évidemment jamais au stade du procès pénal…
Et l’article de loi censé menacer Michel Daerden ou Alain Mathot, ou tout autre candidat violant peu ou prou la loi à leur instar, (les candidats et les tiers qui enfreignent ces interdictions sont passibles d’une sanction pénale, à savoir un emprisonnement de huit jours à un mois et/ ou d’une amende de 50 à 500 euros à multiplier par 5,5-art. 14, § 1er, 4°, de la loi du 4 juillet 1989 et art. 181 du Code électoral) ne rime à rien dans la pratique.
D’autant plus si, au Parlement, ceux qui ont enfreint la loi sont mis définitivement hors d’atteinte grâce à des doubles quorums bizarroïdement pas atteints…
Ce n’est pas pour rien si Herman Van Rompuy, du temps ou il présidait encore la Chambre, avait dit la nécessité “d’évaluer d’urgence” cette loi de 1989.
Ce n’est pas pour rien si l’auteur du dernier rapport de la Commission de Contrôle ad hoc, l’Ecolo Zoé Genot, a écrit “qu’on pourrait la rebaptiser Commission de Constat des dépenses électorales”.
De fait, pour ce qui des précédentes élections fédérales, la Commission de Contrôle a réussi une “première” : ne pas arriver à conclure et à décider si, comme cela devait être son rôle, elle allait dénoncer les infractions au Parquet.
Bref, on a laissé se dérouler efficacement toute la procédure de contrôle mais, au moment de finaliser, de franchir la dernière étape- c’est à dire dénoncer d’éventuelles infractions au Parquet- le quorum des deux tiers n’est comme par hasard pas atteint. Cela “ne peut être considéré comme très satisfaisant” a pudiquement conclu la Commission, d’évidence un peu juge et partie, les parlementaires n’arrivant pas à intervenir contre leurs pairs.
Dans la foulée de 2007, si Karine Lalieux (PS) retira la plainte un temps déposée envers Anne Delvaux (CDH) pour une photo apposée sur une attestation fiscale humanitaire de Cap48, Léon Walry (PS) fut, lui, rudement mis sur la sellette pour des explications controversées sur ses dépenses (10.299 euros au lieu des 5000 auxquels il était limité), d’autant plus que ledit candidat l’était depuis 1985 et ne manquait pas d’expérience. Faute de quorum, ce fut "passez muscade".
Il y a donc un hénaurme hiatus dans le contrôle des campagnes électorales entre ce qui se risque aux élections fédérales et aux scrutins locaux.
Il n’y a que pour les communales que la sanction est vraiment atomique- le risque de la déchéance du mandat- et donc très dissuasive.
Car , à Liège, qui oserait aujourd’hui arrêter un Daerden ou un Mathot dans la course folle de leurs camions peints à l’illégalité criante ?

vendredi 4 juin 2010

LES TROUBLES DE L’ELECTION (35): LE CAMION DE “PAPA” DAERDEN ECRASE 20 ANS D’ETHIQUE POLITIQUE

C’est juste un constat froid: Michel Daerden a délibérément piétiné, jeudi, tout ce que le monde politique, tous partis confondus, a mis des années à construire: davantage d’éthique dans les élections grâce à la limitation des dépenses et au contrôle des moyens de propagande électorale.
Une législation qui s’est préoccupée tour à tour des élections fédérales (1989), des régionales et européennes (1994) et des communales et provinciales (1994 aussi) et dont l’objectif, après plus de vingt ans d’atermoiements et de grands et petits scandales de financement (les “enveloppes”, plus ou moins épaisses, que les grandes entreprises allaient déposer tour à tour dans tous les partis influents…) était de moraliser toutes les campagnes électorales. Non seulement pour équilibrer les chances de chaque candidat lors des élections législatives, mais également pour un meilleur respect de l’électeur et de l’environnement.
Comme l’écrivait Laura Iker, l’une des meilleurs spécialistes à avoir fait naître cette législation, dans son vade-mecum de référence (Ideal): “ L’idée est de faire en sorte que l’électeur se prononce en faveur de l’un ou l’autre parti politique ou candidat en fonction de leur valeur et de leur projet politique et non pas en raison du caractère plus ou moins tapageur, voire racoleur, de la publicité qui leur était faite”.
Des règles qui, depuis vingt ans, avaient été jusqu’ici très respectées, surtout pour ce qui est des scrutins fédéraux.( hormis quelques tricheries mineures) Et que chaque parti, chaque parlementaire connaît par coeur : c’est le baba du métier politique. D’autant plus que la loi a curieusement choisi de plutôt rendre le parti politique responsable des faits et gestes de ses candidats.(qui, lui, en fait, ne risque pas grand chose et n’est donc pas “responsabilisé”, contrairement aux communales: on se souviendra du bourgmestre MR de Woluwé St Pierre perdant son trône local pour avoir transformé son Bulletin communal en tract Corée du Nord…)
Bref, c’est dire si tout candidat député ou sénateur est régulièrement briefé sur le maximum qu’il peut dépenser et comment il peut le faire.
Une chose est de ne pas pouvoir maîtriser les faits et gestes d’un colleur qui appose plusieurs petites affiches sur une surface de plus de 4m2 (illégal), ou un militant doué en informatique qui trouve malin de pirater le Facebook d’un concurrent pour y placer l’image de sa papalâtrie…
Mais c’est tout autre chose lorsque Michel Daerden fait réaliser et imprimer, dans une des rares entreprises spécialisées pour ce type de coûteux boulot graphique, de spécifiques affiches géantes de 30m2. Et lorsqu’il loue ou se fait prêter (la valeur devra lui en être légalement imputée au prix du marché) un camion semi-remorque de dix mètres de long sur trois de hauteur, il sait pertinemment bien qu’il va violer jusqu’à l’os la loi de 1989.
Qui, sur ce point, a l’une des dispositions les plus claires, avec trois grandes interdictions, d’ailleurs valables pour toutes les élections:
-l’utilisation de panneaux ou affiches publicitaires non-commerciaux d’une surface de plus de 4m2.
- l’utilisation, complète ou partielle, de panneaux ou affiches commerciaux.
- la distribution de cadeaux ou gadgets.
Et on vous épargne les articles sur la limitation des dépenses, le crédit disponible pour “ Papa” (34.701 euros) devant déjà être pour le moins bousculé…(tiens, le camion pirate circule-t-il toujours ?)

Et cette loi, née –fait rare- de la volonté commune de sept partis politiques, de bien préciser , et ce n’est donc pas un détail, que c’est “le parti politique qui sera tenu pour responsable “, du moins pour ses dépassements de dépenses.
Donc, faut pas se raconter d’histoires: Michel Daerden n’a aucune excuse, aucune distraction à faire valoir. C’est très volontairement qu’il a décidé de se moquer de la loi de 1989 comme de son premier seau de colle électoral. En ne risquant effectivement pas, perso, grand chose.
Car, on cite, les candidats et les tiers qui enfreignent ces interdictions sont passibles d’une sanction pénale, à savoir un emprisonnement de huit jours à un mois et/ ou d’une amende de 50 à 500 euros (à multiplier par 5,5) (art. 14, § 1er, 4°, de la loi du 4 juillet 1989 et art. 181 du Code électoral).
Mais la vraie sanction prévue par les partis eux-mêmes est celle-ci, pour le moins lourde si elle était appliquée. C'est, on cite en détails, la suspension possible du droit à la dotation, dont la durée ne peut excéder quatre mois ni être inférieure à un mois, pour le parti politique qui dépasse le plafond de dépense autorisé" (un million d'euros par parti )
Le législateur s'est montré en fait plus dur pour les partis, pour veiller à limiter leurs dépenses, que pour les candidats, qui ne risquent qu'une amende ou une peine de prison théorique.(car un parti ne peut contrôler les agissements de tous ses candidats) On touche ici au coeur de la réforme : pour faire simple, parce qu’il y a aussi des dotations régionales, dès qu’un parti compte un élu à la Chambre ou au Sénat, il perçoit un forfait plus 1,38 euro par vote valable.
Ce qui explique pourquoi, lors d’un ressac électoral, certains partis se retrouvent soudain à devoir se serrer la serrure (ce fut le cas d’Ecolo) et aller jusqu’à devoir licencier tandis que d’autres gagnent un peu à la Loterie…(ce sera le cas de la NV-A cette fois ci)
Le megacamion de Daerden, qui est tout sauf évidemment passé inaperçu, a en tout cas toutes les chances de se retrouver devant la Commission de Contrôle parlementaire, une simple plainte déposée par toute personne justifiant d’un intérêt suffisant pour déclencher (entre autres dispositions) une action dans les 200 jours suivant l’élection.

Donc, l’incident est bien plus sérieux qu’une nouvelle et somme toute banale facétie très calculée de “Papa” Daerden. Donc, le ministre CDH Benoît Lutgen est politiquement gentil ou a tout faux lorsqu’il déclare (03/06) qu’il “n’y a rien d’illégal dans la démarche et que c’est une question de bon sens” que de ne pas placer le camion à Papa sur le parking de l’autoroute à Burenville.
Mais non, c’est tout le camion qui est illégal: suffit pas de lui dire : “Allez, circulez…”
Est-ce parce qu’il est pris dans la douce folie psy de son combat électoral fratricide avec Alain Mathot, qui, lui aussi (cfr ci-contre la photo de Martin Buxant sur Twitter : @Le_Bux) dépasse les 4m2 mais en les partageant habilement avec une candidate ? Est-ce le fol enjeu des voix de préférence qui lui fait espérer demeurer le poids-lourd-camion de Liège ? Est-ce parce qu’il sait que, pour de multiples raisons à réviser, sa carrière touche doucettement à sa fin et qu’il a donc décidé, la fin justifiant souvent les moyens en politique, de jouer les Néanderthaliens de l’affichage (faisant fi en outre de la circulaire ministérielle de la Région wallonne interdisant toute publicité électorale sur un terrain appartenant à la Région et l’interdiction bien connue de faire de la publicité au bord des autoroutes).
Est-ce parce  qu’une fois élu Michel Daerden, même s’il aura bafoué délibérément toutes les règles, ne risque en fait aucune inéligibilité ?
Toujours est-il que si les responsables du PS national et des autres partis (qui, après les élections, dans les différentes Commissions de Contrôle, ont tout de même tendance à nouer souvent de petits arrangements entre amis) ne réagissent pas, ce sera la porte ouverte à toutes les infractions, à systématiser petits ou grands débordements.
Au risque de voir toute l’éthique construite depuis 1989 écrasée par le camion à Daerden.

jeudi 3 juin 2010

LES TROUBLES DE L'ELECTION (34)/ QUAND VEERLE DE WEVER et ANNIK DE CROO PUBLIENT DES POST-IT INTIMISTES


J’ai souvent, ces jours-ci, une pensée émue pour les “nègres” des candidats, un métier très méconnu  de la com politique.
Celles et ceux qui, dans les états-majors, les centres d’études des partis, dans les groupes parlementaires, rédigent du matin au soir des réponses plus ou moins bonnes, souvent bien trop techniques, à destination des médias. Grands ou petits, car il n’y a pas que les quotidiens d’importance à envoyer de longs questionnaires, histoire de boucler une grande page ou le lecteur enthousiasmé pourra comparer les positions de chacun  sur les controversés intérêts notionnels ou leurs goûts musicaux. ( zavez remarqué, c’est fou ce qu’Arno  et Tom Barman ont comme succès pour ce qui est des choix zizique des politiques…) C’est que nos ténors politiques reçoivent aussi des demandes à la pelle des périodiques et autres bulletins des agriculteurs, des généralistes, des sommeliers assermentés, des transporteurs routiers en zo voor, chaque lobby sectoriel en profitant pour arracher des réponses qui, puisque nous sommes en période fédérale, seront sinon très positives du moins prudentes.
Côté médias, à chaque élection, on se creuse d’ailleurs itou la tête pour sortir un peu du ronron des interviews à distance et autres “chats” internet plus ou moins authentiques. (ah, ces réponses préformatées qui suivent 15 questions  plus ou moins spontanées...)
C’est ainsi que Veerle De Wever et Annik De Croo ont accepté, pour le Laatste Nieuws, de livrer chaque jour un petit billet post-it destiné à leur cher et tendre en campagne.
Lequel, à lire les confidences de ces épouses, ne passent d’évidence qu’en coup de vent dans leur “home sweet home”.
On apprend ainsi ces heures ci que
-       la très vilaiiiine tache qui avait maculé une chemise de Bert s’est révélée irrécupérable au nettoyage à sec. Et que Veerle- qui utilise en flamand l’expression “ A propos…”- s’inquiète un peu de ne pas voir Bart se préoccuper davantage de leurs vacances d’été (dites, Veerle , savez qu’il risque fort de les passer à négocier dans un chateau genre Val Duchesse ?)
-       -Que leur fille Katrien va fêter ses 7 ans et que ce serait bien que papa Bart passe tout de même un coup de fil. Et tiens - grosse ficelle- Veerle se souvient que si, en 2003, le Belang recouvrait toutes les affiches de la NV-A, ce n’est plus du tout le cas aujourd’hui…
-       Quant à  Annik De Croo, elle signale à son allumé d’époux”que sa soeur a téléphoné” et qu’Alexander ferait bien de prendre rendez-vous au garage pour enfin troquer les pneus d’hiver (ça glisse souvent fort du côté de Michelbeke)
-Et puis on découvre que les De Croo sont en train de construire (les fondations débutent semaine prochaine)  mais qu’Alexander devrait enfin prendre le temps de s’intéresser aux schémas de l’éclairage…
Le hic, c’est que ces billets là non plus, ça ne fait pas vraiment spontané. Y’aurait, derrière Veerle et Annik, du tapoteur "nègre" de clavier pro qu’on n’en serait vraiment pas étonné.

mercredi 2 juin 2010

LES TROUBLES DE L’ELECTION(33)/ LE “CLIP” OFFICIEL D’ECOLO SUR LE FIL DE LA COM POPULISTE

On avait dit ici tout le bien qu’on pensait de l’efficacité du déconcertant slogan du parti Ecolo, et de l’intérêt qu’il y avait à utiliser un procédé d’attention humoristique dans un contexte politique.
On en est donc d’autant plus à l’aise pour dire ce qu’on pense de cette cata qu’est le “clip de campagne officiel” du parti Ecolo (qui vient de succéder à l’amuse-bouche qu’était la séquence très pastiche “Questions à la une” du nouveau Vert Jean-Claude Defossé).
Eh bien nous, si on avait vraiment un amical conseil de communication à donner à Jean-Michel Javaux, ce serait de passer express la bobine de ce petit film sous les roues en fonte de son train vert.
Car si les clips du MR, du CDH et du PS ont leurs défauts ou leurs qualités de réalisation, ils sont tout de même, en gros, cohérents par rapport à leur cible.
On n’est, au minimum, pas trompés sur la marchandise politique.
Or, si le clip d’Ecolo aligne bien des défauts, dont un terrible embrouillamini de concepts et de clichés incroyablement caricaturaux, c’est son positionnement politique qui est surtout pour le moins bizarroïde.
On ne veut pas être forcément désagréable, on y a bien réfléchi, mais il n’y a pas d’autre mot : c’est sur le fil de la communication populiste.
Avec des relents aux bouffées, on pèse vraiment ses mots, parfois carrément poujade.
Bon, on sait, ça va en faire bondir d’indignation. On les invite à d’abord bien streamer à nouveau, selon les vertus du libre-examen, ce petit film aux dehors enfantins mais non sans messages douteux très sybillins.
Voici donc une curieuse petite famille modèle, avec le papa baba-cool sorti de Woodstock, cheveux longs mais idées courtes.
Qui, à propos de l’aide monétaire européenne à la Grèce, en montrant dans sa main les euros qu'on lui vole, s’écrie :
Comment sont-ils arrivés à trouver autant d’argent ? Si c’est encore les gens comme nous qui doivent payer !? “
Chouette altermondialisme, ça, y’a pas à dire.
Qui, à propos des élections anticipées, râle : “ Et voilà, grrr, c’est reparti pour un tour ! Ce-n’est-vrai-ment-pas-le-moment-de-se-permettre-ce-genre-d’histoires”.
Qui, à propos de BHV et autres enjeux communautaires, y va d’un commentaire brève de comptoir :
Nous sommes un si petit pays et on arrive quand même à toujours trouver des raisons de s’engueuler” ( Ecolo en arrive ces temps-ci, dans le fond, à être encore plus “Union fait la force”que le CDH)
Bref, dans cette communication ci, Ecolo ratisse en reprenant à son compte, mine de rien, tous les propos dits de l’homme de la rue et autres micro-trottoirs, râleurs professionnels belgicains ou carrément égoïstes (c’est quoi tous ces milliards qu’on donne à ces meûchants Grecs ?)
On nous retournera sans doute l’argument du second degré, mais celui-ci, et c’est ça le hic, est tout sauf évident.
C’est vrai aussi que le comic strip de ce dessin animé (ça c’est plutôt bien , c’est assez moderne dans la forme, même si le réalisateur a par trop écouté Gainsbourg en nous plaçant en surimpression d’onomatopiques et curieux “Swouch” “Kapow” “Ouch”…) est, mine de rien, assez “libéral” dans le concept.
Car c’est, dans le fond, le clicheton absolu de la petite famille modèle préformatée.
Mon papa, ma maman et moi, on a quitté notre appartement de la ville pour une maison à la campagne: c’est moins cher et plus grand, avec un grand jardin”. ( quoi c’est pas bien, la ville, croit-on comprendre?)
Maman est au chômage, papa travaille toujours en ville”.(chouette image de la femme, non ?)
Et là, on ne s’y retrouve vraiment plus du tout dans ce qu’elle pense, cette famille. (il est possible qu’on n’ait rien compris, que ce soit conçu au 43ème degré , que la maman au chômage ce soit pour s’indigner, mais alors, en communication, l’électeur assurément non plus).
Il pense réellement quoi, le papa chevelu ? Surtout lorsqu’il dit successivement “ C’est de la faute aux chinois et aux russes si çà coûte cher “ et “C’est à cause des banques qu’il y a des chômeurs”. Dites, qu’est-ce qui est débile et qu’est-ce qui est juste, selon Ecolo, dans ces deux pensées fortes ? Ambigu encore.
C’est bizarre: combien peuvent encore s’identifier, sur leur Itouch ou devant leur télé, à cette caricature soixantehuitarde ? Et si c’est censé faire écolo-type pour électorat au propret Jean-Mi, pourquoi alors est-il un vrai beauf ?
Bien sûr qu’on devine que le scénariste de cette cata a voulu (on l’espère) jouer l’ironie, le contrepoint, le 43ème degré de compréhension, nous montrer qu’isoler sa maison c’est bien (euh, depuis quand c’est un gros enjeu fédéral, ça ?) que réduire le temps de travail c’est top itou pour Ecolo (mais 38 heures divisées par deux, ça donne… 19 heures : on cherche pas la p’tite bête mais c’est quoi ce calcul très bizarre sur le tableau vert de la prof’ progressiste ?), que c’est of course dommage que les trains ne s’arrêtent plus à la petite gare…
Mais c’est tellement embrouillé, mal scénarisé, les idées partent tellement erratiquement dans tous les sens, bref c’en est tellement confus que ce clip fait des crap! des bang! des vlop quasi PP et même des zip dans notre cerveau ! (oui, nous aussi, on aime bien Gainsbourg)

Et ce qui est encore plus frappant dans le fond, si on revisionne ce clip et qu’on réfléchit un peu plus avant, c’est que le parti Ecolo y veille surtout, surtout à ne pas se situer.
Dans ce clip, tiens, il ne fait somme toute que soulever ou poser des questions.
Voila: untel pense ça et nous on va y réfléchir…
Or, en politique (c’est tout de même de ça dont on parle à une dizaine de jours d’un scrutin) ce n’est évidemment pas un positionnement que de juste dire “qu’on va y réfléchir”.
J’espère qu’il y en a d’autres qui pensent aussi à tout ça,” nous récite pourtant la gamine verte.

Dans sa communication, Ecolo joue donc doublement sur l’ambiguité et, outre la trouble confusion entretenue sur les brèves de comptoir égoïstes, ne nous dit donc pas comment, lui, il se positionne.
Quel programme, à voir ce clip, Jean-Mi ?
C’est donc vraiment très shebam et pas du tout pow, blop ou même wizzz…