Raser gratis ? Cette expression viendrait d'un barbier qui avait placé jadis une pancarte proclamant ladite formule…Mais notre artisan, tout aussi fûté que près de ses sous, l'y laissait tous les jours. Par conséquent, le naïf qui, le lendemain du jour où il avait vu la pancarte pub, venait se faire raser ou couper les cheveux et qui s'étonnait de devoir quand même payer, s'entendait répondre : "Oui, mais il y a écrit que c'est demain que c'est gratuit !". Aujourd’hui encore, notamment en politique, les promesses des personnalités en vue n'engagent que ceux qui les écoutent sans faire appel à leur libre-examen…Ce n’est pas le cas ici. Où on s'efforce plutôt de manier le mot à couper la langue de bois .

mercredi 2 juin 2010

LES TROUBLES DE L’ELECTION(33)/ LE “CLIP” OFFICIEL D’ECOLO SUR LE FIL DE LA COM POPULISTE

On avait dit ici tout le bien qu’on pensait de l’efficacité du déconcertant slogan du parti Ecolo, et de l’intérêt qu’il y avait à utiliser un procédé d’attention humoristique dans un contexte politique.
On en est donc d’autant plus à l’aise pour dire ce qu’on pense de cette cata qu’est le “clip de campagne officiel” du parti Ecolo (qui vient de succéder à l’amuse-bouche qu’était la séquence très pastiche “Questions à la une” du nouveau Vert Jean-Claude Defossé).
Eh bien nous, si on avait vraiment un amical conseil de communication à donner à Jean-Michel Javaux, ce serait de passer express la bobine de ce petit film sous les roues en fonte de son train vert.
Car si les clips du MR, du CDH et du PS ont leurs défauts ou leurs qualités de réalisation, ils sont tout de même, en gros, cohérents par rapport à leur cible.
On n’est, au minimum, pas trompés sur la marchandise politique.
Or, si le clip d’Ecolo aligne bien des défauts, dont un terrible embrouillamini de concepts et de clichés incroyablement caricaturaux, c’est son positionnement politique qui est surtout pour le moins bizarroïde.
On ne veut pas être forcément désagréable, on y a bien réfléchi, mais il n’y a pas d’autre mot : c’est sur le fil de la communication populiste.
Avec des relents aux bouffées, on pèse vraiment ses mots, parfois carrément poujade.
Bon, on sait, ça va en faire bondir d’indignation. On les invite à d’abord bien streamer à nouveau, selon les vertus du libre-examen, ce petit film aux dehors enfantins mais non sans messages douteux très sybillins.
Voici donc une curieuse petite famille modèle, avec le papa baba-cool sorti de Woodstock, cheveux longs mais idées courtes.
Qui, à propos de l’aide monétaire européenne à la Grèce, en montrant dans sa main les euros qu'on lui vole, s’écrie :
Comment sont-ils arrivés à trouver autant d’argent ? Si c’est encore les gens comme nous qui doivent payer !? “
Chouette altermondialisme, ça, y’a pas à dire.
Qui, à propos des élections anticipées, râle : “ Et voilà, grrr, c’est reparti pour un tour ! Ce-n’est-vrai-ment-pas-le-moment-de-se-permettre-ce-genre-d’histoires”.
Qui, à propos de BHV et autres enjeux communautaires, y va d’un commentaire brève de comptoir :
Nous sommes un si petit pays et on arrive quand même à toujours trouver des raisons de s’engueuler” ( Ecolo en arrive ces temps-ci, dans le fond, à être encore plus “Union fait la force”que le CDH)
Bref, dans cette communication ci, Ecolo ratisse en reprenant à son compte, mine de rien, tous les propos dits de l’homme de la rue et autres micro-trottoirs, râleurs professionnels belgicains ou carrément égoïstes (c’est quoi tous ces milliards qu’on donne à ces meûchants Grecs ?)
On nous retournera sans doute l’argument du second degré, mais celui-ci, et c’est ça le hic, est tout sauf évident.
C’est vrai aussi que le comic strip de ce dessin animé (ça c’est plutôt bien , c’est assez moderne dans la forme, même si le réalisateur a par trop écouté Gainsbourg en nous plaçant en surimpression d’onomatopiques et curieux “Swouch” “Kapow” “Ouch”…) est, mine de rien, assez “libéral” dans le concept.
Car c’est, dans le fond, le clicheton absolu de la petite famille modèle préformatée.
Mon papa, ma maman et moi, on a quitté notre appartement de la ville pour une maison à la campagne: c’est moins cher et plus grand, avec un grand jardin”. ( quoi c’est pas bien, la ville, croit-on comprendre?)
Maman est au chômage, papa travaille toujours en ville”.(chouette image de la femme, non ?)
Et là, on ne s’y retrouve vraiment plus du tout dans ce qu’elle pense, cette famille. (il est possible qu’on n’ait rien compris, que ce soit conçu au 43ème degré , que la maman au chômage ce soit pour s’indigner, mais alors, en communication, l’électeur assurément non plus).
Il pense réellement quoi, le papa chevelu ? Surtout lorsqu’il dit successivement “ C’est de la faute aux chinois et aux russes si çà coûte cher “ et “C’est à cause des banques qu’il y a des chômeurs”. Dites, qu’est-ce qui est débile et qu’est-ce qui est juste, selon Ecolo, dans ces deux pensées fortes ? Ambigu encore.
C’est bizarre: combien peuvent encore s’identifier, sur leur Itouch ou devant leur télé, à cette caricature soixantehuitarde ? Et si c’est censé faire écolo-type pour électorat au propret Jean-Mi, pourquoi alors est-il un vrai beauf ?
Bien sûr qu’on devine que le scénariste de cette cata a voulu (on l’espère) jouer l’ironie, le contrepoint, le 43ème degré de compréhension, nous montrer qu’isoler sa maison c’est bien (euh, depuis quand c’est un gros enjeu fédéral, ça ?) que réduire le temps de travail c’est top itou pour Ecolo (mais 38 heures divisées par deux, ça donne… 19 heures : on cherche pas la p’tite bête mais c’est quoi ce calcul très bizarre sur le tableau vert de la prof’ progressiste ?), que c’est of course dommage que les trains ne s’arrêtent plus à la petite gare…
Mais c’est tellement embrouillé, mal scénarisé, les idées partent tellement erratiquement dans tous les sens, bref c’en est tellement confus que ce clip fait des crap! des bang! des vlop quasi PP et même des zip dans notre cerveau ! (oui, nous aussi, on aime bien Gainsbourg)

Et ce qui est encore plus frappant dans le fond, si on revisionne ce clip et qu’on réfléchit un peu plus avant, c’est que le parti Ecolo y veille surtout, surtout à ne pas se situer.
Dans ce clip, tiens, il ne fait somme toute que soulever ou poser des questions.
Voila: untel pense ça et nous on va y réfléchir…
Or, en politique (c’est tout de même de ça dont on parle à une dizaine de jours d’un scrutin) ce n’est évidemment pas un positionnement que de juste dire “qu’on va y réfléchir”.
J’espère qu’il y en a d’autres qui pensent aussi à tout ça,” nous récite pourtant la gamine verte.

Dans sa communication, Ecolo joue donc doublement sur l’ambiguité et, outre la trouble confusion entretenue sur les brèves de comptoir égoïstes, ne nous dit donc pas comment, lui, il se positionne.
Quel programme, à voir ce clip, Jean-Mi ?
C’est donc vraiment très shebam et pas du tout pow, blop ou même wizzz…