Raser gratis ? Cette expression viendrait d'un barbier qui avait placé jadis une pancarte proclamant ladite formule…Mais notre artisan, tout aussi fûté que près de ses sous, l'y laissait tous les jours. Par conséquent, le naïf qui, le lendemain du jour où il avait vu la pancarte pub, venait se faire raser ou couper les cheveux et qui s'étonnait de devoir quand même payer, s'entendait répondre : "Oui, mais il y a écrit que c'est demain que c'est gratuit !". Aujourd’hui encore, notamment en politique, les promesses des personnalités en vue n'engagent que ceux qui les écoutent sans faire appel à leur libre-examen…Ce n’est pas le cas ici. Où on s'efforce plutôt de manier le mot à couper la langue de bois .

mardi 31 mars 2015

Le Thalys wallon, symbole d’une réforme de l’Etat masquée (M...Belgique Hebdo du 21/03/15)

 
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C’est bien connu: un train peut en cacher un autre. “E pericoloso sporgersi”. Danger: derrière le Thalys wallon, c’est le train fantôme des volontés flamandes qui déboule. Plus que du simple communautaire: comme une sorte de réforme de l’Etat masquée qui postulerait un tout nouveau rôle pour la Région wallonne: suppléer le fédéral.
Vous avez assurément entendu souvent, dans la bouche de politiques flamands de tous horizons politiques, cette maxime récurrente: “Ce que la Flandre fait elle-même, elle le fait mieux”.

Evolution récente, N-VA aidant, la formule soudain se complète désormais d’un: “Ce que nous, au gouvernement fédéral, n’avons plus envie de faire, faites-le donc vous même, mes p’tits wallons…”

C’est une ministre francophone, Jacqueline Galant, qui stoppe le Thalys wallon mais incite le gouvernement wallon à le reprendre à son compte.

C’est la même Galant qui entend supprimer des lignes de la fédérale SNCB puisque les TEC wallons n’ont dès lors qu’à acheter des bus en plus…



Back to the future


C’est du “back to the future”, retour à ce qui se passait dans les “secteurs nationaux” dans les années 80, lorsqu’un Luc Van den Brande (CVP) s’exclamait froidement: “Si les wallons veulent aider leur sidérurgie, ils n’ont qu’à payer eux-mêmes”. 
Certes, on pressentait déjà bien, à l’époque, que l’avenir de la sidérurgie wallonne ne serait pas rose. Ce qui n’allait pas, que c’est que des dossiers flamands tout aussi peu enthousiasmants comme ceux du textile, de la construction navale ou d’autres aussi pourris que celui des charbonnages du Limbourg (qui coûtèrent des flopées de milliards à l’Etat belge) étaient traités, parce que concernant le Nord, avec une fluidité exemplaire, les grandes entreprises wallonnes ne recevant que des portions congrues.

Les choses ont-elles tellement changé? Certes, d’importantes réformes de l’Etat sont passées par là, certes les Régions se sont emparées d’importants leviers économiques mais on voit toujours aujourd’hui des ministres fédéraux s’en allant chanter, non plus seulement le paisible Vlaams Leeuw, mais bien les partitions nationalistes de la #Zangfeest.  Qui dénotent pour le moins avec le concept de la “loyauté fédérale”.

Lequel postule, par exemple, que dès lors qu’une décision de compétence fédérale pourrait avoir des conséquences pour la  Wallonie (ou Bruxelles et la Flandre) il y ait à tout le moins “concertation”. (le Comité ad hoc a d’ailleurs depuis été saisi d’office par le Gouvernement wallon).



Le Thalys Vande Lanotte: 1% depuis Ostende


Petit résumé pour ceux qui auraient loupé ce wagon tout chargé de communautaire. En février, le gouvernement se penche sur le “Thalys Vande Lanotte”, du nom du ténor socialiste flamand, surnommé l’ “Empereur d’Ostende”,  et qui a voulu et protégé pendant des années l’arrivée d’un Thalys quasi vide dans sa cité balnéaire, Reine des Plages. Officiellement, on ne vous le racontera pas comme ça, mais la pièce s’est jouée ainsi: le sp.a remballé dans l’opposition, ses copains N-VA mettent en exergue le flop: le tronçon Ostende-Bruges affiche un taux d’occupation de …1%. (chiffre officiel)
Donc, décide le gouvernement, il sera suspendu  jusqu’à examen dans le cadre du “plan de modernisation et d'efficience de la SNCB”, oufti.

Mais c’était sans compter sans un de ces coups fourrés qui donnent décidément toute sa saveur à la solidarité flamande, surtout depuis l’arrivée au pouvoir de la N-VA. Puisqu’une décision politique arrêtait le Thalys du Nord, il fallait évidemment stopper itou le Thalys du Sud.

En y mettant les formes en communication, c’est à dire  en parlant d’abord d’une “suspension” pour l’installation du système de sécurité ECTS (sur un tronçon de la dorsale wallonne). Alors que c’est bel et bien d’une suppression définitive don’t il est question entre les rails.

Pas plus fine psychologue que mathématicienne, la démonstration en a été faite par le ministre Jacqueline Galant elle-même, qui n’avait évidemment aucune raison de tant s’embrouiller dans des chiffres de déficit s’il ne s’agissait que d’une simple et inoffensive suspension technique, comme la dorsale wallonne en a déjà connu par deux fois.



140.000 passagers l’an



Le hic, c’est que la fréquentation du Thalys du Sud est tout de même largement différente: là, on en est à des taux de remplissage de 50%, voire de 60% le week-end.

Pas de quoi crier au succès mais, mine de rien, le temps a fait que de plus en plus de passagers ont découvert la ligne. Sous le gouvernement Verhofstadt, une concertation comme il faut s’était d’ailleurs tenue entre ministres fédéraux et régionaux. Qui s’étaient accordés à donner du temps à la liaison: non sans résultats, le Thalys wallon affichant désormais 140.000 passager l’an.  Soit 5,7 mio€ de recettes et effectivement, un déficit de 4,5 mio€ l’an.

Sur ce dernier chiffre là Jacqueline Galant de Jurbise ne se trompe point: le léger problème qu’elle ignore tout du fond du dossier. A savoir que si 5 mio d’€ ce n’est pas rien, c’est tout de même quasi rien dans le budget SNCB et que c’est le prix à payer pour continuer d’exister sur la carte européenne du train à grande vitesse.



On oublie le grand consensus d’il y a 25 ans



Passons le fait que pratiquement quasi-toutes les lignes de la SNCB sont forcément déficitaires (ça s’appelle un service public), passons le fait que ledit déficit était tellement connu qu’il était prévu dans le Contrat de Gestion SNCB. 

Ce que tout le monde a omis de dire et qu’il faut rappeler c’est que, jadis, avant le Thalys, de multiples lignes internationales reliaient, lentement, les grandes villes de Wallonie à Paris (jusqu’à sept trains par jour).

Et qu’on a oublié un peu vite le grand consensus politique qui s’était noué il y a 25 ans, lorsqu’il s’était agi d’abandonner irréversiblement toutes ces liaisons à l’ancienne et de de positionner la Wallonie, et sa capitale namuroise, sur le réseau européen des trains à grande vitesse. Histoire de doper, comme ce fut le cas pour Lille, le développement économique.

Ce ne fut d’ailleurs pas évident: il a fallu se battre pour que les lignes à grande vitesse s’installent en Wallonie et les permis de construire furent un feuilleton sans relâche.

Si on n’y prend garde, à force d’en sourire, on en arriverait, avec le folklore mathématique de Jacqueline Galant, à en oublier l’essentiel: à savoir que, jusqu’à nouvel ordre (ou nouvelle réforme de l’Etat) les trains sont financés également par les wallons. Et que ce cela postule des retours pour la Wallonie.



Le flop du Fyra, si important pour la Flandre



Paul Magnette, le si discret Ministre-Président wallon, ne s’est pourtant pas privé de rappeler que lorsque la Flandre s’est retrouvée confrontée à l’historique flop du Fyra (ce train de conception italienne à très relative haute vitesse -108 km/heure à peine- qui n’a roulé que six semaines vers les Pays Bas avec un important arrêt à Anvers), il n’a fallu que peu de temps pour trouver, avec l’appui wallon, un accord financier ad hoc et mettre en place un service Intercity de remplacement.

On verra ce qu’il adviendra du sort final du Thalys wallon, de toute façon à l’arrêt au 1er avril. Une certitude: tandis que la Wallonie n’a rien à dire sur le “plan de transport” qui multiplie à l’infini les colères des navetteurs, la Flandre a développé un bien meilleur réseau ferroviaire, notamment IC, avec une offre conséquente.



Clair de lune à Maubeuge



Ce n’est d’ailleurs pas un événement anodin que le Premier Ministre luxembourgeois soit venu, l’autre jour, à la tribune du Parlement Wallon s’inquiéter de la panne des investissements sur la mythique ligne 162, celle qui tortillarde de Bruxelles à Luxembourg.

Pour les wallons, la suspension/suppression du Thalys, c’est la crainte d’un retour à une provincialisation, alors que, partout en Europe, les compagnies de chemins de fer dépensent des sommes pharamineuses dans l’interconnexion des villes.

On l’a vu dans le débat au Parlement wallon: au delà d’un classique conflit Nord/ Sud sur les ressources, c’est le MR, seul partenaire francophone du gouvernement, qui est acccusé “de n’avoir pas tenu bon face à la Flandre.” 
Le libéral Jean-Luc Crucke a eu beau plaider “pour qu’on extirpe la liaison  Belgique-France du monopole du Thalys” et proclamer sa foi dans une alternative qui passerait par le clair de lune de Maubeuge et la gare de Valenciennes, il n’a guère convaincu. Pire: ses petits camarades se sont amusés à lui mettre sous le nez de mâles mais périmées déclarations d’autres libéraux quant à la sacro-sainte défense du Thalys wallon.



La régionalisation du rail, objectif flamand



Va-t-on vers un confédéralisme larvé dont le sort du Thalys wallon serait un des signaux d’alerte? 
Il est clair ici qu’on a appliqué la fameuse  “théorie du gaufrier” c’est à dire supprimer le Thalys du Sud pour compenser la

suppression du Thalys du Nord.

Et il ne faut jamais perdre de vue que, depuis longtemps, tous les partis flamands ont demandé la régionalisation du rail, la Flandre souhaitant, avec des nuances, gérer toute sa mobilité.

Steve Stevaert, l’ancien président des socialistes flamands, entendait ainsi financer des “lignes locales d’un rail purement flamand”. 
Ou décrocher, à défaut; plus que l’actuelle clé 60%/40% des investissements ferroviaires..

Suspendu ou définitivement arrêté? 
Le sort du Thalys wallon jouera  en tout cas à coup sur l’image du MR en Walllonie.



Chacun sait désormais qu’il y a un prix à payer pour tout politique francophone qui entend accèder à la fonction de Premier Ministre.
Le montois Elio Di Rupo paie cash aujourd’hui ses concessions aux partis du Nord sur les allocations d’insertion et les exclusions du chômage.

S’il ne redémarre pas, le Thalys wallon pourrait conduire à cette question ennuyeuse pour le Premier Ministre, le wallon Charles Michel: son pouvoir fédéral s’arrête-t-il à Wavre?



Michel HENRION













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mardi 24 mars 2015

Le CD&V adopte la stratégie du boa constrictor et étouffe le “changement” tant promis par la N-VA (MBelgiqueHebdo du 13/3/15)

 
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Le dessinateur Erik Meynen, au Nord, c’est un peu le Kroll flamand
Lorsqu’il ne scénarise pas les albums de Suske et Wiske (Bob et Bobette), c’est aussi un fin cartooniste politologue. L’autre jour, dans Knack, un de ses dessins reflètait parfaitement le piège qui menace la N-VA: on y voyait, face au Premier Ministre, un Bart De Wever assorti d’un petit nuage phylactère d’idées très noires, puisque devant constater que toutes les grandes réformes promises au “peuple flamand” par la N-VA sont, tantôt en attente, tantôt reportées…
Bref, pour être clair que la “force du changement” (le mot “verandering” fut l’axe des slogans des campagnes 2012 et 2014) ce sera, si ça continue ainsi, pour une autre fois.

Bart, comme Soeur Anne, ne voit rien venir

Le flux médiapolitique coule ainsi: Bart De Wever a beau encore placer systématiquement des allusions à l’islam dans ses interviews, ce n’est plus le terrorisme djihadiste qui monopolise tout le devant de l’actu.
Les commentateurs politiques en sont revenus à leurs dadas habituels: et, après déjà cinq mois de participation N-VA au fédéral, ils se mettent à comparer promesses et résultats. Certes, la N-VA s’est intégrée au paysage politique fédéral. Certes, les ministres N-VA se sont-ils formés sur le tas et ont-ils acquis de l’expérience. Mais reste la question essentielle: la N-VA risque-t-elle, selon le mot du politologue Carl Devos, le “syndrome Syriza”? Entendez que si ce gouvernement très penché à droite, arithmétiquement hyperflamand, se révèle incapable d’engranger des grandes réformes, il ne sera plus d'un interêt évident pour la N-VA.
Cartoon de Marec (Nieuwsblad)
Au contraire, cette coalition risque de virer dangereusement au bourbier, à la souricière pour les nationalistes flamands, dont les promesses de coup-de-balai deviendraient de carton… Souvenez-vous du dernier scrutin 2014 au Nord: on allait voir ce qu’on allait voir. Pas de communautaire par pragmatisme, certes, mais la promesse d’ une rupture secouante pour la sécurité sociale, la justice, la fiscalité. Bref, avec la N-VA au pouvoir, la Belgique allait vivre une secouante rupture.
Aujourd’hui, bof, et le nain de jardin N-VA au V victorieux a déjà l’air moins fier à bras. Un peu comme pour Syriza en Grece, où le changement n'est pas jugé suffisamment radical pour certains (l’extrême-gauche du mouvement grec).
C’est vieux comme le monde: souvent l’idéologie se fracasse contre le mur des réalités de toutes sortes. Surtout lorsqu’un “parti nationaliste flamand choisit une participation fédérale qui est la totale négation de son core-business” a-t-on pu lire dans Doorbraak, l’organe du Mouvement flamand.

Le réveil inattendu d’une “gauche sociale” en Flandre

Et le pire, pour les leaders de la N-VA, c’est que les difficultés ne sont pas communautaires: les francophones n’ont guère, sinon nada à y voir puisque toutes les frictions sont produites dans l’usine politique flamande.
Bref, même entre eux, les partis flamands peuvent se déchirer.
Premier os purement flamand pour la N-VA: sa participation fédérale a provoqué l’inattendu réveil d’une “gauche sociale” en Flandre, et qui n’est pas sans dynamisme. Les grèves provinciales et, surtout, la manifestation nationale du 26 novembre ont eu une ampleur nationale, avec quasi autant de flamands que de francophones. Déconvenue de la N-VA et  résultat habile d’une stratégie fédérale due en grande partie à l’habileté du pourtant très wallon Marc Goblet, nouveau secrétaire général de la FGTB et fin tacticien sous ses dehors bourrus.

Laisser filer le budget en Flandre?

Deuxième os purement flamand pour Bart De Wever: au Nord, l’opinion publique commence à être quelque peu fatiguée de l’austérité “à la flamande” du gouvernement Bourgeois. Le grand débat politique au Parlement flamand, c’est de savoir s’il convient, oui ou non, de laisser un peu filer le sacro-saint équilibre, de lâcher quelque lest budgétaire. La N-VA n’aime évidemment guère ça, mais les pressions sont fortes. Et pas que des écoles catholiques, des organisations chrétiennes de soins de santé ou des agriculteurs (bref, les piliers encore solides du CD&V) qui entendent éviter une nouvelle couche de restrictions.
Troisième os purement flamand pour le parti nationaliste: les divergences, les conflits entre partis du nord pour ce qui est du fameux “dossier Uplace”, ce mega-shopping peu connu des francophones si ce n’est sous l’aspect mobilité, entendez le risque de terribles embouteillages sur le Ring de Bruxelles. Mais qui soulève aussi en Flandre des polémiques virulentes, vu les problèmes environnementaux et de santé publique (cancers et maladies dues aux particules fines) découlant de ce projet à Machelen, au bord du Ring de Bruxelles. Tous les partis flamands sont mal à l’aise sur ce dossier, mais particulièrement la N-VA, où partisans (souvent d’anciens libéraux ralliés) et opposants au projet se cotoient et s’affrontent.
Quatrième os pour le bourgmestre d’Anvers: dans le Mouvement flamand, des voix mettent désormais carrément sa stratégie en cause. Dans Doorbraak, l’écrivain flamand Laurens De Vos y va d’un quasi crime de lèse-majesté: “L'idolâtrie pour Bart De Wever est particulièrement pernicieuse, en raison du manque de critique interne et de voix dissidentes. Personne n’aime être défénestré’

La métamorphose du CD&V que De Wever n’avait pas prévue

Mais l’élément dominant, dans ce cercle des conflits intra-flamands, c’est assurément l’interminable combat de catch “ Bart contre Kris”. Mieux que “Iron Sheik” contre “Hulk Hogan”, mieux que le “Bourreau de Béthune” contre “L’Ange Blanc”, tous champions du genre.
C’était l’élément que De Wever, au moment de la formation un brin précipitée du gouvernement (avec des textes parfois flous), sans doute fort de l’expérience du défunt cartel CD&V-N-VA, n’avait pas vu venir. Que l’ancien boss de l’Unizo (PME du Nord) allait, à contre-courant de tout son passé, se ArturoBrachettiser en “visage social” du gouvernement Michel. Or, le catch n’est pas un sport, c’est un spectacle. Ce qui  importe au public, ce n’est pas ce qu’il croit, c’est ce qu’il voit.
Et ce qu’il perçoit, jour après jour, c’est que le CD&V Kris Peeters se fait le héraut, le “champion de l’équité sociale”, freinant nombre de velléités idéologiques de la N-VA. Et que, jusqu’à nouvel ordre, Wouter Beke, le président des sociaux-chrétiens flamands, soutient bel et bien cette ligne, martelée sans cesse par  son Vice-Premier Ministre, comme si tout cela était bel et bien coordonné.
Et cette vision est encore confortée par un Eric Van Rompuy lorsque celui-ci demande à De Wever  “un peu plus  de respect pour Kris Peeters et Wouter Beke”, y allant même d’un médiatique “le CD&V n'est pas la serpilière humide de la coalition”.

Un saut d’index n’est pas le changement

C’est comme si toute la communication récente du CD&V suivait une stratégie bien réglée: provoquer médiatiquement la N-VA pour que celle-ci s’emporte, montre à l’opinion du Nord que c’est plutôt le parti nationaliste qui cherche la bagarre, et non point ce brave Kris Peeters. “Nous voici à nouveau de mauvais flamands, nous sommes redevenus la Bête Noire de la N-VA” rajoutait encore Eric Van Rompuy, d’évidence en mission de com’ commandée.
Sur le ring, les catcheurs du CD&V, qui ont de l’expérience et ont peut-être lu Roland Barthes sur le sujet, savent décidément très bien flatter le pouvoir d’indignation du public en lui soulignant ainsi la limite même du concept de justice.  Et De Wever, qui l’a mauvaise (son parti veille à apparaître correct au fédéral) ne s’attendait assurément pas à ce que le CD&V se comporte de manière aussi contestataire dans “sa coalition des droites ”, les sociaux-chrétiens flamands allant jusqu’à dire et faire presque tout et son contraire de leur dernier programme électoral. Et n’arrêtant pas de mettre de nouvelles objections ou propositions sur la table. “Le PS aurait fait kif jadis, commente un observateur du Nord, c’eût été illico une crise gouvernementale”.
Bart De Wever a, bien sûr, vu le danger pour son parti de la frustration de son électorat. De la perception d’un flop de son slogan du “verandering” (changement). Car un saut d’index n’est évidemment pas le “verandering”.
D’ou une multiplication d’interviews, pas piquées des hannetons vis à vis de Peeters, du CD&V et des partenaires sociaux, s’en prenant tout à la fois habilement aux employeurs et surtout aux syndicats, ces empêcheurs belges, selon la N-VA, de  réformer en rond…

Investir encore les salons fédéraux ou reprendre son credo de base?

Mais la N-VA se retrouvera inévitablement  un jour ou l’autre face à un problème de taille. Quelle stratégie politique et de communication poursuivre? Continuer à investir mine de rien les salons du niveau Fédéral (Banque Nationale, SNCB et l’on en passe) ou remettre à nouveau plus en avant son credo anti-système et communautaire. Il ne suffit pas que Jan Jambon roule, sur sa voiture de fonction, avec un porteplaque assorti d’un “VL” pour contenter longtemps l’électeur-militant  N-VA. Ou d’aller chanter à la Fête du Chant flamand ou, détail symbolique, les participants  étaient invités l’autre jour à gagner un gros lot de 7.500€ par famille flamande si on supprime les milliards de billions de milliards de transferts vers la Wallonie.

Le CD&V, boa constrictor

C’est que le catcheur CD&V est doué pour la prise dite du “boa constrictor”.
Qui entend étouffer lentement et patiemment le “verandering” de la N-VA; qui donne des nationalistes une image d’inexpérimentés du pouvoir fédéral, d’idéologues attachés à des symboles assez anti-sociaux. “Le catch est une sorte de combat mythologique entre le Bien et le Mal”  disait aussi Roland Barthès. Le dessein est évident: le centre est un territoire politique convoité et  tant  Kris Peeters que Wouter Beke s’efforcent ainsi de s’attirer la sympathie d’un public flamand modéré, dans la tradition d’un parti censé bien gouverner, responsable et constructif.
Le combat sur le ring électoral est subtil: que le CD&V mette trop de bâtons dans les roues de la N-VA et le danger est qu’il apparaisse comme un vil saboteur, un mauvais perdant ou une formation qui n’aurait désormais plus sa place dans une coalition de centre-droit.
L’équilibre des forces incite le CD&V a la prudence: avec 18,6% des électeurs, les sociaux-chrétiens ont moins de marge que la N-VA (32,4%) qui s’attendait à perdre bien plus que ce que les sondages-il est vrai boostés par le terrorisme- lui prédisent aujourd’hui.
De plus, la N-VA n’est nullement isolée: les relations avec le MR sont cool et les libéraux flamands, même s’ils abhorrent en privé la N-VA,  jouent souvent assez subtilement le jeu des nationalistes: on l’a vu dans les dernières décisions sociales controversées au sein de la coalition. C’est clair: après cinq mois d’aventure fédérale, la situation se complique vachement pour la N-VA. Mais Bart De Wever ne manque jamais d’ingéniosité tactique pour contrer les forces d’un Etat belge qui, selon certains, serait “quasi indomptable.”
Les prochaines négociations budgétaires et #taxshift s’annoncent, dans ce contexte, pour le moins hard entre N-VA, qu’on peut déjà deviner rude et rigide sur ses principes, et le CD&V. La N-VA pourra-t-elle vivre à son aise rue de la Loi après l’inévitable compromis qui en sortira?
 L’attitude des ministres N-VA sera assurément à observer avec attention: on devrait y déceler des indices.  Et puisque le PS (sa cible favorite) se garde stratégiquement de créer l’incident qui permettrait à De Wever de remettre en douce un peu de communautaire à l’agenda, il ne nous étonnerait pas que la N-VA ne s’en charge elle-même un jour prochain ou lointain: une injection de communautaire camouflé ferait assurément le plus grand bien aux nationalistes. En situation désormais d’équilibristes.

La N-VA oublie sa logique confédérale

Observez bien la situation sociale: tout y est résumé. Alors que, dans tous les pays européens, les gouvernements se jettent plutôt sur les accords de plus en plus difficilement noués entre patronat et syndicats (qui connaissent la technicité de ces dossiers), il a fallu que la N-VA, pour bien montrer qu’elle faisait tout de même du “verandering” (changement), corrige et amende le texte à tout prix, par pure symbolique. Au diable les conséquences et l’agitation sociale relancée.
C’est que la N-VA n’est pas un partenaire gouvernemental comme les autres: tout son programme confédéraliste vise à vider le niveau fédéral.
Et la concertation sociale fédérale est clairement, par tradition, un des grands piliers de l’Etat belge. "Après l'économique, c'est par le social que la N-VA veut créer les conditions pour le confédéralisme" lance Marc Goblet (FGTB).
Sulfater la concertation sociale fédérale, lui faire avaler son bulletin de naissance (1946) n’est donc pas pour déplaire à Bart De Wever. Qui s’en fiche évidemment comme d’une pomme des intérêts de la Wallonie et de Bruxelles:  ce qui n’empêche pas ses ministres de décider largement pour tous les francophones.
Amusant: certains observateurs flamands se demandent aussi ou est passée la logique confédérale de la N-VA à vouloir imposer, a contrario, une… même règle uniforme d’activation aux prépensionnés des trois régions? (En 2009, la N-VA avait hurlé contre l’activation des jeunes flamands voulue par un des multiples “plans Milquet”)
La politique de la N-VA est devenue très particulière: une paix sociale, une approbation de l’accord noué entre employeurs et syndicats, aurait été le signe que le parti de Bart De Wever ne pouvait imposer son fameux slogan du changement.
La conclusion est brutale: le plus grand ennemi du changement tant promis par la N-VA, c’est la paix sociale.

Michel HENRION







vendredi 20 mars 2015

Vieillissement et idéologie: ce qui explique vraiment la logique flamande rue de la Loi (MBelgique Hebdo du 6/3/15)

 



La vie politique, aujourd’hui, se raconte en images et en chiffres.  Point commun: tout cela est mis en scène avec soin par des maîtres en communication. D’où l’importance d’apporter des clés d’analyse. Parfois bêtes comme chou.
Ainsi de la démographie: on ignore ainsi encore par trop que la Flandre va subir de plein fouet le vieillissement de sa population, Bruxelles et la Wallonie se retrouvant dans une situation bien plus favorable, voire dynamique.
Marc Coucke, patron BV.
Marc Coucke, l’emblématique patron flamand d’Omega-Pharma, qui vient d’investir chez Mithra à Liège, n’en doute déjà guère: "Je ne serais pas surpris, si on divisait le pays en deux, que la Wallonie prenne plus vite des actions que la Flandre".
Notez bien ceci: la part des soixante ans et plus en Flandre est devenue supérieure à celle de la population wallonne. En 2050, elle devrait même dépasser le tiers de l’ensemble de la population flamande. D’ou une logique très flamande qui s’efforce de s’imposer rue de la Loi.
C’est tout simplement parce que la Flandre vieillit  que ses politiques font tout pour prolonger l’activité des belges: retarder l’âge de la pension, casser net le système de la prépension.
C’est parce que la Flandre n’aime pas trop l’immigration mais qu’elle a néanmoins très peur pour sa propre croissance, qu’un Théo Francken (N-VA) opte pour l’’immigration économique sélective”, histoire de tout de même compenser par du sang neuf bien limité en Flandre.
Autre clé: la Flandre a un patronat- plusieurs dizaines de milliers de PME- bien plus politisé, voire idéologue, qu’en Wallonie. On se souvient du patron du holding Ackermans & Van Haren, sans doute le CEO le plus influent de Belgique, qui disait ne plus vouloir vivre “dans une société marxiste”.

Un Groupe des Dix aussi très flamand

Résultat:  des associations patronales comme le Voka, l’Unizo ou Agoria (ou le poids flamand est lourd) en arrivent à décrocher le controversé saut d’index. En Flandre, c’est un patronat de combat qui lobbye déjà pour décrocher une limitation des allocations de chômage dans le temps, en commençant stratégiquement par celles des plus jeunes.
C’est d’autant plus facile pour les politiques flamands que leur électorat n’est, statistiquement, que le moins concerné.
C’est d’autant plus facile que la puissante aile flamande de la CSC, proche du CD&V, est, in fine, toujours plus accommodante. Un observateur de la vie syndicale définit ainsi Marc Leemans, le puissant boss flamand du syndicat chrétien, par ailleurs qasi un inconnu chez les francophones: “ Un Che Guevara dans les propos, plus vite réfugié dans les tranchées dès qu’il y a confrontation dure avec le patronat au fameux “Groupe des Dix” de concertation sociale”.
Un Groupe des Dix ou la représentation flamande, et c’est tout sauf un détail, est d’ailleurs hyperdominante.
Toujours retenir ceci: dès qu’on parle, en politique belge, de mesures concernant les plus modestes: hausses de TVA ou chômage, les chiffres sont clairs. Ca touche toujours bien davantage la Wallonie, bien plus pauvre.

Le Gorafi politique de Gwendolyn

Gwendolyn Rutten, la présidente de l’OpenVLD,  ne manque pas d’aplomb. Comme on lui demandait l’autre jour si un hypothétique gouvernement composé de trois partis francophones et d’un seul parti néerlandophone serait imaginable, elle y alla d’un hardi: “Bien sûr, puisque c’est la logique fédérale”. Euh. C’est vrai que c’est cohérent (elle disait déjà kif pour justifier jadis le manque d’un seul siège dans la majorité flamande qui soutenait la tripartite Di Rupo) mais toute la rue de Loi sait pertinemment qu’une telle idée folle tient du hoax, du Gorafi politique: qu’elle est totalement irrecevable, inconcevable, inimaginable, bref intolérable au Nord.

Ces disputes flamandes qui préservent le MR

Les disputes incessantes entre partis flamands de la coalition, les querelles de chiffoniers, les “pesten” (harcèlements) entre le CD&V de Kris Peeters et la N-VA, ont un double effet médiapolitique:
1) elles occupent le devant de l’actu politique et coupent, mine de rien, le pied à l’opposition
2) Elles préservent le MR, les polémiques flamandes détournant le regard de l’unique parti francophone du gouvernement.
A force, on en arriverait presque, dans les médias, à oublier l’arithmétique asymétrique qui fait toute la singularité de ce gouvernement N-VA-CD&V-OpenVLD-MR. Ou les wallons et les bruxellois ne sont représentés que par seulement 20 députés sur les 63 francophones qui siègent à la Chambre (à l’inverse, la coalition est fortement soutenue en Flandre: 65 députés flamands sur 87)
Aux débuts de la “Suédoise”, c’est la solitude de cette aventure francophone du seul MR qui suscitait le plus de craintes chez les analystes. C’était l’époque ou on feuilletonnait sur le fait que les partis flamands se-devraient-de-souvent-voler-au-secours-du-MR. Aujourd’hui, nada, peanuts, on s’en fiche au Nord. Parce que le MR “tient” dans les sondages et que, paradoxalement,  les fissures les plus vulnérables du réacteur suédois ne sont pas au Sud, mais bien en Flandre.
Avec ce malaise du CD&V devenu élément dissonnant de la coalition,  sans cesse en porte à faux, toujours comme excédé par la N-VA. Avec aussi un Kris Peeters méconnaissable, qui fulmine, qui croit qu’on cherche à le pousser à la démission, qui vit mal l’autorité militante d’une N-VA à ses yeux encore peu formée aux arcanes du pouvoir. Bref, un gouvernement sans guère de grands marathons nocturnes, mais ou, selon des axes d’alliances très changeants (le MR donne tantôt raison au CD&V, tantôtà la N-VA…) on rédéfinit plutôt souvent ce qui a déjà été décidé.
C’est encore le CEO flamand Marc Coucke qui lâchait cette formule: “La Flandre est en train de se belgiciser alors que la Belgique se flamandise”.
Et, du côté des francophones, toute la communication du patronat flamand et de la N-VA (ah, les milliards de transferts Nord/Sud si martelés par De Wever) semble avoir été sinon gobée, du moins avoir imprégné nombre d’esprits.
“C’est la mentalité du colonisé gentil avec son maître”, commente un économiste wallon. “Les wallons se rattachent notamment à l’Etat belgo-flamand parce que c’est là qu’ils trouvent encore des outils économiques comme Belfius. Sait-on assez, alors que le mot régionalisme est presque mal vu par d’aucuns, qu’en Allemagne, il n’y a pas un Land qui n’ait pas sa propre banque?”



Thalys: la “logique” flamande


C’est dans ce climat ou le fameux “Front des francophones” (créé à l’époque du défunt Pacte d’Egmont et aux épisodes à éclipses) apparaît comme ayant viré carrément fossile pour Musée d’histoire politique, qu’il suffit parfois d’un tout petit rien, d’un incident, d’une bêtise, par exemple l’arrêt ou la mort d’une ligne du Thalys, pour réveiller le wallon.
Logique flamande: puisque le Thalys vers Ostende n'avait que 7% de fréquentation, on tue aussi le Thalys wallon (avec des taux de remplissage tournant autour de 50%, soit atteignant doucettement un taux de rentabilité qui n’est d’ailleurs pas forcément l’aune d’un service public)
Et la ministre Marie-Christine Marghem d’un peu gaffer en lâchant ce qu’il ne fallait pas surtout dire en com’chez Pascal Vrebos sur cette suspension/suppression:
"Il faut garder un équilibre dans ce pays. C'est une correspondance d'équité"
Oups. Benoît Lutgen, qui devient, mine de rien, de plus en plus wallon, s’est aussitôt engouffré dans la fissure ouverte par la MR-MCC en remettant le dossier du Thalys dans un contexte d’intérêt économique pour toute la Wallonie: "Arrêter le ‎Thalys wallon c'est casser l'axe Est-Ouest (fluvial,autoroutes, rail) qui est essentiel économiquement pour la Wallonie . Pour être clair, cet axe ne va plus vers Anvers".
Anvers ou le président de la N-VA, qui n’a cessé, sous la coalition Di Rupo, d’user jusqu’à la corde l’argument du “siège qui manquait”  pour une majorité flamande à la Chambre, juge tout à fait "normal" qu'un gouvernement très minoritaire en Wallonie gouverne l’ensemble du pays.
L’argument du président de la N-VA a, il est vrai,  toujours été de dire que “c’est la plus grande communauté du pays qui payait l’addition”. Bart De Wever ne justifie pas vraiment la minorisation des francophones: son raisonnement est de dire qu’il aimerait que ce soit différent- seul le confédéralisme pouvant résoudre la problématique- mais que l’actuel systême belge lui impose de “faire comme cela”, si on entend, comme il le voulait, gouverner sans le PS.
C’est une thèse que le président de la N-VA a développé avec succès en Flandre ou nul n’aborde plus cette question devenue carrément hors-propos.

Le mystère stratégique de Di Rupo

 Plus surprenante, en positionnement politique, est l’attitude du PS. Alors que Bart De Wever a tiré jadis un profit électoral évident à taper récuremment sur le clou du fameux “siège manquant” aux flamands, il y a là un évident argument de communication (les francophones ne sont représentés que par 20 sièges sur 63) qu’Elio Di Rupo n’utilise étonamment qu’avec parcimonie, quasi accessoirement.
Ce qui ne va pas sans surprendre d’aucuns dans son propre parti, alors que l’opposition socio-économique du PS ne marche pas très fort. Alors que les sondages ne sont pas vraiment enthousiasmants. Alors que le MR peut rêver de devenir, comme fugitivement en 2007, le premier parti de Wallonie. Alors que nombre de militants sont toujours furax, fâchés qu’ils sont d’avoir vu le PS faire tomber le tout premier domino de l’effondrement des droits des chômeurs. Alors que le régionalisme et la défense des wallons et des francophones font partie de l’ADN du PS.
Certes, l’homme est sans doute prisonnier d’un discours qu’il a lui-même instauré, d’une certaine logique belgicaine qui a sensiblement conditionné l’opinion publique francophone (la Wallonie ne peut rester debout qu’en se couvrant du tricolore belge) et qui l’a porté au poste de Premier Ministre.
Certes, il faut digérer la sixième réforme de l’Etat (mais les tensions sociales actuelles montrent combien le niveau fédéral demeure un levier très important)
Certes, l’homme est-il prudent avec d’éventuelles alliances à venir (2019) ou cultive-t-il sans doute encore le chantier de l’idée d’apparaître comme un recours en cas de crise…
Mais, pour un fort en com’, se priver de marteler un argument tel que l’infériorisation arithmétique des wallons et des francophones dans un gouvernement ou la N-VA pèse de tout son poids est, assurément, un insondable mystère stratégique.

Michel HENRION




lundi 9 mars 2015

Le nouveau danger pour la N-VA: apparaître comme un parti traditionnel (MBelgique Hebdo du 27/02/2015)



Le phénomène est marquant. La lutte contre le terrorisme aura été un cadeau du ciel pour la N-VA. Puisqu’elle contrôlait tous les départements médiapolitiquement concernés, la normalisation fédérale de la N-VA s’est accélérée à toute vibrure. 
Résultat: le parti de Bart De Wever a quasi décroché son brevet de légitimité, voire de respectabilité. Puisque les importants ministres fédéraux de la N-VA (Jambon, Vandeput, Francken) ont plutôt bien répondu à la forte demande de sécurité, voire de sécuritaire musclé de la population, les wallons, les bruxellois se sont bel et bien habitués à voir les “De Wever boys” apparaître régulièrement dans les Journaux Télévisés.

Jan Jambon, Vice-Premier Ministre/
Le ministre de l’Intérieur Jan Jambon à Washington, ça n’étonne plus personne: le belge sourit juste de sa panne de micro et de sa blagounette un peu pénible qui tombe à plat.

La diabolisation se dégonfle peu à peu: la N-VA au 16 rue de la Loi a, contre toute attente, déjà quasi décroché son brevet de légitimité.

Ca tient à des détails: le même Jan Jambon visite désormais sans soulever le moindre remous les casernes de pompiers de Wallonie. Avec tout de même, pour ses débuts wallons, un pare-feu: il privilégie plutôt les communes ou le bourgmestre est MR (Spa ou Braine l’Alleud) Un MR ou certains vont même au dela de cette normalisation, comme si, s’exclame un libéral plus réticent, “ils étaient tombés amoureux de la N-VA.” C’est un Damien Thiéry, pourtant maïeur non nommé parla N-VA Liesbeth Homans, qui y va d’un cri surprenant: "La force de la N-VA est d'avoir rassemblé des gens qui avaient en commun de ne plus supporter le marasme de la particratie" . C’est Jacqueline Galant qui y va d’un enthousiaste: "La N-VA ce sont des politiques qui travaillent dur et pas juste pour un mandat: pour l'intérêt général, pas personnel"

Propos qui ne sont d’ailleurs pas sans une certaine logique: la N-VA incarne quelque part ce que nombre de libéraux francophones espèrent devenir: une force dominante.

La normalisation de la N-VA va même parfois très loin: plus personne n’a remarqué combien ledit Jan Jambon devenu ministre dézingue toujours, comme au bon vieux temps de l’opposition, le Centre d’Egalité des Chances.

Ou la N-VA, dit le Vice-Premier Ministre N-VA a heureusement “quelqu’un de confiance”: entendez Mathias Storme, opposant déclaré de la loi anti-discrimination,  cette “agression à l’encontre de la démocratie.” 

Réactions? Nada. Aucun remous. Une preuve de plus de cette “normalisation” galopante de la N-VA.

Qui va aujourd’hui  si loin que le parti de Bart De Wever doit se méfier d’un autre danger: apparaître en Flandre comme quasi un parti traditionnel. Ce qui serait fatal pour cette formation qui a toujours eu le talent singulier de cultiver parallèlement le système et l’anti-système.



Le Coran de De Winter: un écart stratégique



Aucun observateur francophone ne l’a relevé: fut-elle applaudie uniment (encore un brevet de respectabilité retrouvée), la fameuse sortie du ministre Jan Jambon contre la démagogie du Belanger Filip Dewinter -qui brandissait un Coran à la tribune de la Chambre- n’est pas forcément une bonne chose pour la N-VA.

Car Jan Jambon, ce jour là, a fait exactement ce qu’un Di Rupo, un Van Rompuy ou un Verhofstadt, aurait fait: casser les propos nauséeux de l’élu d’extrême-droite.

Or, c’est un sérieux écart par rapport à la stratégie traditionnelle de la N-VA, Bart De Wever se targuant souvent, non sans raison, de ramener vers son parti démocratique, (et non xénophobe ce qui est sa particularité dans les partis populistes européens) les électeurs partis jadis vers l’extrême droite et le Vlaams Belang.

D’ou une ambiguité tactique puisque, pour offrir une alternative à ces électeurs là, pour récolter ces voix-là, la N-VA était pour le moins prudente, condamnant le racisme, les excès du Belang tout en veillant à prêter l’oreille aux messages qui ont  séduit un moment jusqu’à 981.000 flamands. (24 % des votes aux élections du Parlement flamand de 2004, devenant ainsi le deuxième parti flamand)

Certes, le Belang est vraiment le meilleur ennemi de la N-VA; certes les chefs de file du parti nationaliste rêvent d’un Parlement sans plus aucun parlementaire d’extrême-droite, mais il y a l’art et la manière pour  ramasser les voix.

Et, ce jour là,  Jan Jambon n’a plus, comme par le passé, juste écouté le Belang: il est sorti de l’ambiguité, avec son côté positif (gommer le fameux “les collaborateurs avaient leurs raisons”)  mais aussi ses risques et ses périls vis à vis d’un certain électorat N-VA.



L’alerte de Pegida



Ce qu’il adviendra du Belang est très important pour la N-VA. Sur les thématiques de l’indépendance de la Flandre ou de l’immigration, de l’islamisation, le Belang peut toujours perturber.

Une alerte stridente a résonné il y a peu au siège de la N-VA: le mouvement anti-musulman Pegida, soudainement né à Dresde, dans le “modèle allemand”, a donné des sueurs froides à la N-VA. Qui a aussitôt diffusé des consignes: se méfier grandement de Pegida version belge, vu qu’on ne sait pas qui vraiment derrière ce mouvement importé.

Précaution évidente puisque le succès des marches organisées depuis octobre par Pegida en Allemagne s’était étendu jusqu’en Flandre, jusqu’à Anvers, la ville même de Bart De Wever.

Aujourd’hui, politiquement inexpérimentés, les inventeurs de Pegida ne sont pas parvenus à gérer leur mouvement protéiforme. Il s’étiole en collectionnant les gaffes, il est moralement dénoncé et surtout débordé par des courants encore plus extrêmes et racistes.

On peut donc respirer à la N-VA. Parce qu’un mouvement populaire de type Pegida, sur lequel le Belang s’était greffé immédiatement en Flandre, forcerait le parti de Bart à des choix difficiles. Puisque s’allier avec des racistes et des nazis n’est pas vraiment la tasse de thé N-VA, elle n’aurait eu d’autre choix que de s’éloigner quelque peu du pouvoir pour garder son image de parti anti-système, soit de se mettre en difficulté en muant en parti désormais traditionnel.

L'essoufflement de Pegida arrive aussi à point nommé pour les partis politiques allemands, où des fractures commençaient à apparaître. En assurant que «l'islam appartient à l'Allemagne», Angela Merkel avait suscité un certain malaise dans les rangs de la CDU. A gauche,  le geste d’un leader du SPD, qui cherchait à comprendre le mouvement, avait provoqué une gêne manifeste: les sociaux-démocrates allemands avaient officiellement exclu toute discussion avec Pegida.

Mais pour autant, la peur de l'Islam et du déclassement social qui nourrit Pegida n'a pas disparu. Ni en Flandre, ni en Allemagne. Selon un sondage du Stern, 18% des allemands affirment “avoir un malaise par rapport à la religion musulmane”.



Pas d’opposition à droite de la N-VA



Il faut toujours bien photographier que la N-VA a la grande chance de n’avoir point d’opposition à sa droite. Premier parti de Belgique, mais aussi et surtout premier parti de Flandre, la N-VA n’a  plus qu’un seul vrai rival théorique sur le terrain socio-économico-fiscal de droite: l’OpenVLD de Gwendolyn Rutten.

Mais la police d’assurance de la N-VA est que les libéraux flamands, associés à la N-VA tant au gouvernement fédéral qu’au gouvernement flamand, appliquent kif le même programme gouvernemental.

Conséquence: aucun parti de droite n’est là pour critiquer la N-VA sur ce terrain. Cool.



“Le Jean-Marie Le Pen de chez Aldi”



On insiste sur le point: il n’y a donc plus que le Belang, ou un mouvement citoyen de type Pegida, à pouvoir encore encombrer, affaiblir le cas échéant la N-VA sur l’immigration et l’indépendance de la Flandre.

Certes, en mai 2014, le Belang a perdu 30 de ses 41 parlementaires. Crash total. Bouffée d’air frais pour la démocratie. Mais en réaction le Belang a porté à sa tête un certain Tom Van Grieken (28 ans), soit le plus jeune président de parti que la Belgique ait jamais connu. 

Jadis l’homme s’était déjà fait remarquer avec une action contre un barbecue halal organisé par une école de Schoten. Avec un ami, il avait sauté  un mur pour jeter des saucisses de porc sur les écoliers.

Surnommé tantôt le “petit prince”, tantôt le “petit Dewinter”,  Van Grieken serait, dit-on, bien plus doué que ses prédécesseurs pour reconquérir le terrain perdu. Mais pour l’heure aucun signe d’une vraie mue maîtrisée au Belang.

Certes, Tom Van Grieken entend -malgré son action anti-halal de jadis digne d’un QI de lampadaire- adopter un profil moins radical sur les immigrés et s’inspirant de Marine Le Pen pour ce qui du socio-économique.

Question: y a-t-il encore un électorat pour cela en Flandre? De plus, dans les débats, le petit Tom n'a évidemment aucune chance face à un De Wever. Et avec Theo Francken et Jan Jambon, les électeurs issus du Belang resteront encore longtemps à la NVA.

Autre problème: si le nouveau président du Belang proclame vouloir évoluer pour ce qui est du discours sur l’immigration, Filip Dewinter, lui, ne fait que proférer des propos de plus en plus racistes et nauséabonds. Dans les milieux les plus nationalistes, les plus “flamingants”, même ceux positionnés très à droite, on en a d’ailleurs plus qu’assez du “style Dewinter”. L’homme a d’ailleurs, du coup, hérité d’un surnom :  le “Jean-Marie Le Pen de chez Aldi”.

Bref, rien qui puisse pour l’heure vraiment déstabiliser la N-VA,  nouveau parti belge.



Michel HENRION

lundi 2 mars 2015

Omerta dans nos écoles: les professeurs en ont assez (Comment éjecter de l’enseignement les radicaux qui entendent le polluer?) (MBelgique)



C’est la fin de l’Omerta. De cette loi du silence tacite qui règne encore par trop dans l’enseignement. Parce que les directions sont parfois mal informées elles-mêmes de ce qui se passe dans leurs propres classes. Parce que c’est plus confortable de sous-estimer, voire de celer, les difficultés pourtant relatées par la filière des éducatrices.
Parce que, surtout, des articles dans les médias, ça peut vous abîmer, vous ternir vite fait la sacro-sainte réputation d’une école. “Circulez y’a rien à voir: pas de souci ici”.

C’est en cela que le gros dossier ouvert à l’Athénée Royal d’Anderlecht Léonardo da Vinci, avec en son coeur le sulfureux et borderline professeur de religion islamique Yacob Mahi, est un tournant pour la libération de la parole. En quelques semaines, voici qu’on découvre tour à tour qu’un professeur de mathématiques du réputé lycée Jacqmain aurait tenu des propos antisémites;; qu’on signale qu’un professeur de Woluwé tient des propos d’extrême-droite; qu’on prend au sérieux les persécutions de Sarah, une élève juive forcée de quitter l’Athénée Bockstael; qu’on apprend que la commune d’Uccle a écarté en son temps un professeur de religion israélite qui refusait de serrer la main des femmes…

Et ce n’est qu’un début: on prend le pari que l’actualité prochaine nous apportera désormais récurremment son lot de tribulations, de révélations scolaires sur des nuisibles. Avec une question de fond: comment faire pour éjecter des écoles des personnages qui polluent la neutralité de l’enseignement par leurs propos fondamentalistes, xénophobes, d’extrême-droite ou d’extrême-gauche, antisémites ou islamophobes ?  Comment faire, plus précisément, pour que les cours de religion ne puissent devenir des Chevaux de Troie dans certaines écoles? Pour que des professeurs dogmatisés qui exercent un très fort ascendant sur les jeunes ne puissent continuer à les manipuler?



Des enseignants solides



Bonne nouvelle: le salut viendra en partie des enseignants eux-mêmes. Il y a heureusement des directions aux fortes personnalités, qui veillent à appliquer les règlements sans rien transiger ni négocier. Qui savent que l’école doit parfois se faire intransigeante. Surtout vis à vis des quelques uns qui veulent en faire, mine de rien, un lieu d’opposition entre communautés.

On en compte plein, heureusement d’enseignant(e)s, solides. Qui ne fuient nullement les difficultés en auto-censurant, en classe, les thèmes “sensibles” ou “difficiles”.

Comme ce prof d’histoire de Leonardo da Vinci qui entend bien enseigner encore et toujours ce qu’est la libre-expression, un thème qui insupporte particulièrement le professeur islamique d’Anderlecht. Qui ne supporte apparemment pas non plus que son collègue remette en question les moyenâgeuses us et coutumes d’Arabie Saoudite, ce pays où l’on fouette hebdomadairement les blogueurs épris de liberté d’expression…

Comme ces autres enseignants qui, dans certaines écoles, sont irrités par ces professeurs prosélytes qui abîment finalement  peu à peu la “marque de l’enseignement officiel”. Ceux qu’aucun préfet n’a le droit de contrôler (pas question d’assister à un cours), qui n’ont ni le même traitement, ni la même hiérarchie. Qui ignorent les femmes, même leurs collègues de travail, lorsqu’elles parlent; et détestent encore plus les associations féministes. Qui intimident les autres enseignants musulmans, à qui ils parlent parfois en arabe, histoire de n’être pas compris de tous. Et qui, surtout, infiltrent parfois subtilement les jeunes esprits d’idées radicales dont l’école n’a nul besoin: dénigrement de l’égalité hommes-femmes, des philosophes des Lumières, de l’Histoire, des Sciences, des cours de Gymnastique-Piscine, de la mixité, des voyages scolaires…



Le besoin criant d’une étude objective



Ca se résume en une formule: oui, le tour que prend le problème devient parfois tellement hard que ce sont les professeurs eux-mêmes qui sont fatigués de la loi du silence.

Ici, une précision: on sait bien, combien ce sujet est délicat, car souvent agité par certains politiques d’extrême-droite ou de droite-extrême qui ont fait de l’islamophobie -parfois à en vomir- leur fonds de commerce électoral.

Le libre-examen postulerait précisément que la Fédération Wallonie-Bruxelles, à l’instar de ce qui s’est fait en France, ait le cran de mener elle-même une enquête approfondie, fut-elle dérangeante: et d’ainsi photographier la réelle amplitude d’un problème qu’on ne saurait glisser sous le tapis.

On a depuis longtemps surpris certains professeurs –une minorité, certes, mais très militante- à tenir des discours limites dans le cadre de leur cours. Comme la lecture de textes homophobes parlant aimablement, par exemple, de "pendre les homosexuels par les testicules". Des dossiers circonstanciés ont même parfois été constitués par des chefs d'établissement: mais sans que grand chose ne bouge dans la hiérarchie. Encore et toujours la culture de l’Omerta si chère aux obscures réunions du Pouvoir Organisateur. Chut: silence à tout prix.





Les élèves “mis en poche”



On attend pour la mi-mars le rapport des quatre préfets wallons envoyés à Anderlecht pour mener l’indispensable enquête. Mais il nous étonnerait que celui-ci ne conforte les témoignages recoupés que nous avons recueilli dans les milieux enseignants de l’Athénée.

Qui ont besoin de se sentir soutenus. Qui expriment un vrai ralbol, un authentique malaise quant à la manière subtile dont M. Yacob Mahi “communautarise” l’école, incite à mettre en doute ce qu’enseignent d’autres professeurs, tout en veillant –ce proche des Frères Musulmans est habile, criant à la persécution à la moindre mise en cause de son système- à dûment respecter les prescrits imposés par l’inspection.

L’homme, par sa forte influence, a “mis ses élèves en poche”, nous confie un enseignant. “Il peut très bien donner son cours de manière on ne peut plus correcte et, dans un moment plus relax, plus détendu avec ses élèves, leur balancer mine de rien l’une ou l’autre de ces opinions limite antisémites, homophobes ou anti-euthanasie qu’il développe de manière décomplexée dans des conférences ou dans les medias”. Du genre:“Oui, les jeunes partis en Syrie ne posent aucun problème d’intégration dans notre pays. Ils sont de bons vivants belges et surtout beaucoup sont de brillants élèves”.











D’où un autre solide problème: peut-on incriminer ou non un professeur  pour les propos qu’il tient en dehors du cadre scolaire?

La réponse est apparemment floue, ce qui postulerait, si cela se confirme, une réforme du statut disciplinaire.

Dans la “Lettre ouverte” qu’il a envoyé à la presse pour se défendre, et rédigée dans le plus pur vocabulaire complotiste, Yacob Mahi rendait ainsi, une fois de plus, hommage à Roger Garaudy, son “maître à penser”, accessoirement négationniste des chambres à gaz.

“Rien que cette référence là fait que M. Yacob Mahi devrait être destitiué immédiatement” a lâché cette semaine la députée FDF Joëlle Maison, qui, elle, ne fait pas dans le mou si cher aux responsables de l’enseignement. Qui ont si peur de faire de Yacob Mahi un martyr “à la Dieudonné” et marchent donc sur des oeufs.



Ne pas mélanger avec le dossier des cours philosophiques



Toute salle de classe est un espace finalement assez intime.  Et, au travers du cas Yacob Mahi, c’est tout le problème du danger prosélyte qui est posé. Pas celui de l’évolution des cours de religion/morale qui est tout un autre dossier. Et qui doit, de fait,  évoluer au plus vite, mettre progressivement fin à l’actuelle et aberrante séparation des élèves. Et éviter dans le futur, avec la multiplication des cultes en demande de reconnaissance -dont le bouddhisme- une multiplication des budgets. (l’Etat reconnait déjà le culte catholique, orthodoxe, protestant, anglican, israélite et islamique)

La ministre Milquet (cdH) a déjà décidé de faire se rejoindre tous les élèves pour une heure sur deux dès la rentrée scolaire 2015. C’est encore insuffisant mais c’est déjà ça: les cours philosophiques sont, plus que jamais, une bonne idée pour décrisper, dépassionner, pour créer une culture prenant en compte la diversité des civilisations et des religions.

La Fédération Wallonie-Bruxelles pourrait d’ailleurs faire encore un pas intéressant, en s’alignant sur la Flandre. Ou ces fameux cours de morale/ religion si controversés sont devenus facultatifs alors qu’ils restent étonnamment obligatoires chez les francophones. (pour rappel, la Constitution impose juste aux écoles officielles de proposer lesdits cours, pas forcément de les suivre)

On a parfois accusé Joëlle Milquet de par trop sympathiser -le CDH étant en quelque sorte devenu électoralement le “parti des religions”- avec les tendances communautaristes; mais on est de ceux qui estiment que #cestjoelle a aussi une vision des “lignes rouges” qu’on ne saurait franchir. Comme Yacob Mahi et d’autres le font d’évidence, aussi allégrément que subtilement.

Il y a quelques années, le ministre Pierre Hazette (#MR) avait déjà réagi en bloquant, par un formidable pressentiment, la nomination dudit Mahi comme inspecteur islamique. (ils sont trois pour 650 profs)

On n’ose imaginer ce que serait devenu le “corps” des professeurs islamiques avec un tel contrôle militant.

A l’heure ou l’on constate une montée en puissance du phénomène religieux chez les jeunes, ou d’aucuns proposent à ces mêmes jeunes, pour casser le “vivre ensemble”, une “identité positive musulmane” se substituant à une identité “mal intégrée”, il est une exigence pour tout politique dans le combat contre l’obscurantisme: l’excellence. Surtout lorsque, comme on dit à l’Athénée Leonardo da Vinci, nul n’est préfète en son pays.



Michel HENRION