Raser gratis ? Cette expression viendrait d'un barbier qui avait placé jadis une pancarte proclamant ladite formule…Mais notre artisan, tout aussi fûté que près de ses sous, l'y laissait tous les jours. Par conséquent, le naïf qui, le lendemain du jour où il avait vu la pancarte pub, venait se faire raser ou couper les cheveux et qui s'étonnait de devoir quand même payer, s'entendait répondre : "Oui, mais il y a écrit que c'est demain que c'est gratuit !". Aujourd’hui encore, notamment en politique, les promesses des personnalités en vue n'engagent que ceux qui les écoutent sans faire appel à leur libre-examen…Ce n’est pas le cas ici. Où on s'efforce plutôt de manier le mot à couper la langue de bois .

lundi 17 mars 2014

La pandémie des promesses électorales.

 
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On se pince: est-on dans un rêve éveillé? On sait bien que tout politique, au pouvoir ou en campagne, se doit de composer avec la vérité, de s’adapter aux demandes du public électoral. Mais, en ce début 2014, le constat vire farfelingue
Il n’est qu’une réalité brutale: les caisses sont vides. Nos élus sont les premiers à le savoir mais n’en continuent pas moins à nous bombarder de plans et promesses par milliards de milliards. Comme au bon vieux temps, lorsque l’Europe n’imposait pas ses controversées trajectoires budgétaires. On peut apprécier ou non Laurette Onkelinx mais force est de constater qu’elle est jusqu’ici la seule  à avoir mis les pieds dans le plat. A savoir que le prochain gouvernement- et ce quel qu’il soit- devra, selon les impératifs européens, encore d’abord nous pomper pour pas moins d’au moins…14 millards d’€ d’ici 2019. Et ce alors que pas mal de mesures prises par l’équipée Di Rupo impliquent déjà  -outre les lourds effets à retardement de la 6ème réforme de l’Etat- de solides factures (notamment les paquets de millions censés huiler les rouages du statut unique ouvrier-employés)
Ca n’empêche pas nombre de partis de multiplier les feintes-à-Jules et les  cadeaux fiscaux, très tendance ces temps-ci pour l’emballage électoral. Mais lorsque vous posez la question qui tue (“dites, puisqu’il faudra raper 14 mia d’€ qui vont faire mal, ou allez-vous dénicher les sous pour réaliser toutes ces belles promesses?”) vous n’avez droit qu’à des réponses vagues causant d’ “effet retour”, de lutte contre la fraude fiscale (sur 2000 mia de fraude débusquée, on n’en récupère en fait jamais que 10%) ou de “chasse aux gaspi”, vous savez le truc si efficace qu’il prive juste les commissariats de papier-toilette pour amuser le bon peuple...
Dommage que le droit romain ne soit plus d’application. Car celui-ci prévoyait des pénalités financières pour l’élu récalcitrant à la tenue de ses promesses, que même ses héritiers étaient tenus d’honorer. Aujourd’hui, c’est le règne de la détestable formule cynique selon laquelle “les promesses n’engagent que ceux qui y croient”. Avec comme effet pervers que l’électeur se méfie, prend de plus en plus son autonomie, se laissant tenter par le vote de rejet, celui qui vient des tripes. C’est bien connu: les électeurs veulent soit du changement, soit exprimer une opinion. C’est à dire, de nos jours, souvent du mécontentement.
Comment y voir clair?  L’autre jour, le président du MR proposait de faire factchecker les chiffres des programmes des partis par la brave Cour des Comptes. Un peu court comme comptes:  car le risque évident est alors de déboucher sur une “gestionnarisation” du débat politique. Tout ne se vaut pas et la formule la plus “low cost” n’est pas forcément la meilleure pour le citoyen.
La formule hollandaise, une des rares du genre au monde, est bien plus intelligente. Puisque la politique, c’est surtout faire de bons choix , un organisme vraiment indépendant (si,si) y calcule tous les impacts réels (économique, environnemental, etc) des idées de la dizaine de partis en lice.  Qui ont évidemment tendance à sous-estimer les coûts et à  surestimer les avantages à court terme. Ainsi, au Pays Bas, a-t-on vertement épinglé, entre les lignes, le projet fermenté de la calbombe d’un parti  de réduire, mine de rien, de 50%  la pension de retraités vivant avec trois autres adultes…
Une information vraiment fouillée et indépendante sur les programmes électoraux est de plus en plus une nécessité démocratique. A condition de dépasser la fausse logique selon laquelle tout se vaudrait. Et qu’on pourrait donc, en cette période d’austérité, couper dans tout jusqu’à, parfois, l’essentiel. Entendez cette Sécurité Sociale, qui est somme toute le dernier lien entre les belges.


Miche HENRION