Raser gratis ? Cette expression viendrait d'un barbier qui avait placé jadis une pancarte proclamant ladite formule…Mais notre artisan, tout aussi fûté que près de ses sous, l'y laissait tous les jours. Par conséquent, le naïf qui, le lendemain du jour où il avait vu la pancarte pub, venait se faire raser ou couper les cheveux et qui s'étonnait de devoir quand même payer, s'entendait répondre : "Oui, mais il y a écrit que c'est demain que c'est gratuit !". Aujourd’hui encore, notamment en politique, les promesses des personnalités en vue n'engagent que ceux qui les écoutent sans faire appel à leur libre-examen…Ce n’est pas le cas ici. Où on s'efforce plutôt de manier le mot à couper la langue de bois .

mardi 21 juin 2011

Le MR, un conglomérat hétéroclite qui ne se porte au mieux qu’avec un leader musclé… (l’ enjeu derrière la guerre des boutons bleus)


Tiens, une question: demandez-vous un instant quels seraient les thèmes, les slogans  des partis dans d’éventuelles élections d’automne qui seraient aussi inédites que dramatiques ?
Eh bien, c’est assez évident : au Nord, nul doute que Bart De Wever inciterait son “peuple “ à lui donner la force d’imposer cette fois, par un lourd rouleau-compresseur électoral, le “confédéralisme”-ou davantage- à ces maudits wallons qui n’ont encore rien compris.
Charles Michel : un casque bleu au MR ?
A l’inverse, je prends le pari  (et c’est ce que, comme communicateur, je lui conseillerais) que le PS mènerait une campagne musclée sur un seul thème fort.
A savoir que pour faire face au nationalisme et à la politique éco-soc de droite  (c'est le core-business de la gauche) musclée de la N-VA, il faut faire du PS le rempart, le bouclier protecteur (autre core-business  socialo) qui, seul, pourra lui tenir tête. (ici, fond sonore de tambours et trompettes).
Bref, on aurait droit à un choc des titans politico-médiatique, dans un climat sans nul doute enfiévré, entre les deux grands leaders déjà confortés, les autres partis jouant peu ou prou, dans un tel climat, les utilités menacées de sérieux coups dans l’aile, voire d’évanescence...
L’histoire électorale l’a démontrée: si un scrutin se déroule sans grands enjeux, juste quelques divergences d’ajustements socio-économiques,  les mouvements de voix n’ont généralement rien de très secouant. Par contre, si des élections se déroulent dans un climat très émotionnel, c’est à dire souvent communautaire, les déplacements de vote peuvent être secouants…
Ne la sentez-vous pas progressivement monter, vous, chez l’homme de la rue wallon ou francophone, cette vive allergie populaire à Bart De Wever et à sa nationaliste N-VA ? 
Une colère, un ralbol pas toujours bien informé, presque irraisonné, parfois même jusqu’à verser dans 
l’ injuste ou l’excès, mais qui vient du ventre, mais qui  imprègne peu à peu, mois de crise après mois de mouise, petite phrase méprisante de Bart après petite phrase qui se veut drolatique (“Il y a des médicaments qui peuvent aider Maingain, mais je ne suis pas médecin")  le Sud du pays. Le corps francophone doit être allergique à l'air puisqu'il le recrache désormais dès qu'il en avale chargé de par trop de N-VA…(hormis la petite frange de l’opinion droitière qui rêve d’une N-VA wallonne)
                        
Charles Michel, distrait, emporté par d’autres objectifs ou jeux du palais des vents MR, a dû se mettre ses boules Quiès dans les narines. 
Car il n’a apparemment pas capté cette sourde irritation vis à vis du national-populisme flamand, qui flanque désormais la gerbe à de nombreux électeurs démocrates de tous horizons.
Résultat: boxon au MR avec un Maingain, qui a du nez, du culot à stupéfier ses correligionnaires et de l’arcade souricière.
Et qui balance depuis des heures un tapis de bombes médiatiques, quadrillant la zone cible de la Toison d’Or, de manière à raser systématiquement tout ce qui s'y trouve de contact possible avec la N-VA, ce parti  qui est , à l'en croire,” l’équivalent d’Umberto Bossi en Italie ou de feu Jorg Haider en Autriche.” (mazette, rien que ça: Jérome Jamin (ULg) estime ainsi que "comparer De Wever à Haider ou à Bosi, cela ne tient pas une seconde, limite "escroquerie intellectuelle")
Mais, pour ce qui est de prendre le pouls de l'homme de la rue, Maingain hume plutôt bien. Pour de nombreux wallons ou bruxellois, De Wever n'est rien moins qu'un "nazi camouflé" et toute discussion nuancée en devient carrément impossible.



LA BOURDE DE LA TOISON D'OR

Oh, point de doute: le FDF a toujours besoin pour l’heure d’un vrai relais en Wallonie et cela se terminera, une fois de plus, entre le fébrile Olivier Maingain et les libéraux de Charles Michel par un assez hypocrite armistice de plus, sans doute au nom des “principes fondamentaux” du MR, sans cesse martelés dans sa com’ par l’inamovible président du FDF (putain, 15 ans…). On n’en pensera certes pas moins mais on affichera les formes médiatiques de rebibochage qu’il convient, des fois qu’on revoterait à l’automne.

Il n’en demeure pas moins un grand mystère: comme la N-VA est incontournable dans la formation,  il n’est somme toute que normal que de la rencontrer. (“ Oui, a fonflonné Maingain, on peut se mettre à table avec eux, mais pour leur dire clairement les choses.”)
 Mais quelle mouche, bourde bleue a diable piqué le nouveau président du MR que de convier Bart De Wever à le rencontrer "discrètement" dans son propre bâtiment, si symbolique, de l’avenue de la Toison d’Or ? Et surtout , sauf l'on nous tord la vérité, de ne pas en informer le  partenaire FDF ?
Sans apparemment réfléchir plus avant quant aux conséquences psychopolitiques de ce symbole ?
Le “Déjeuner chez Bruneau” , premier contact “en douce” entre MR et N-VA,  déjà théoriquement opaque et caché au FDF, avait déjà eu des conséquences médiatiques montées en meringue; fait fulminer des naseaux ledit Maingain (étonnamment jamais au courant de rien dans son propre parti) et collé un dossard de “ouh, le vilain traître d’opéra “ à un  Didier Reynders pas encore putsché de sa présidence par le “groupe Renaissance” des Michel …
N’ayez aucun doute: dans tout débat, même pas préelectoral, ce “Déjeuner chez Bruneau” –symbole marketing, à tort ou à raison, d’une connivence N-VA-MR serait revenu longtemps, fut-il un brin usé, comme ”élément de langage”. Martelé par PS, CDH ou Ecolo…
Et, à peine cette image d’Epinal se floue-t-elle dans la mémoire collective (l’époque médiatique vire scattato) ne voila-t-y pas que le successeur de Reynders  prolonge ledit déjeuner maudit en offrant encore le café à Bart.
Bref, celui-là même qui pour conquérir son mandat bleu et amadouer un FDF plus porté vers son rival Bacquelaine, avait juré tenir la N-VA à l’écart, vire casaque. Curieux, pour un jeune président censé “rassembler “ le MR et le remettre en ordre de marche “cohérent et uni.”
Double sparadrap médiatique qui collera pour longtemps au MR: qui va payer par mensualités, après l’actuelle campagne de com’ au canon d’Olivier Maingain contre le flirt Michel-N-VA, l’addition de  tous ces flirts où on ne sait qui séduit l'autre.
Bien sûr, tout cela est complexe, byzantin et jeux de couloirs. Il est clair que, mettant à profit l’affaiblissement d’un Didier Reynders qu’il soutint, le FDF a acquis, au sein du MR, une influence politique forte, pas forcément proportionnelle à son poids électoral. (Un des bingo décrochés par Maingain étant l’alternance totale des places sur la liste MR de la capitale aux dernières législatives).

Le FDF, objectivement un petit parti, a d’ailleurs ce curieux talent inexpliqué d’influer peu ou prou, au delà du MR, sur tous les autres partis francophones, imbibant curieusement jusqu’au PS ou au CDH, Joëlle Milquet en arrivant à s’apparenter, que dis-je s’amaranter parfois davantage que le dit Front Démocratique Francophone.

Dans la famille Michel, on n’a en fait  jamais caché cette volonté de remettre, au sein du MR, le poisson-pilote FDF à sa juste place. (mieux considéré cependant que ce parti de carnaval qu’est le MCC). En cas d’accord BHV avec appui MR-  une idée qui n'enthousiasme  guère les pensées sous-jacentes d'Olivier Maingain- le schéma était d’ailleurs prêt: les députés FDF n’auraient qu’à s’abstenir.

C’est très étrange: la feuille de route du nouveau président du MR était théoriquement simplissime.
Bénéficiant de l’état de grâce de l’exit-Reynders (chez les libéraux, c’est une tradition: on y est toujours vilipendié à l’extrême après avoir été adulé à l’excès), il se lui suffisait de renouer des contacts apaisés avec les autres partis (Reynders se laissait parfois un chouia aller à  l’ad hominem) et, comme cela s’impose lorsqu’un président est élu d’une tête, de refaire l’unité, fut-elle décor pour tournage cinecitté. Avec des belles phrases tété et éculées du style "le temps est à la mobilisation et à l'union sans faille" (ici, remettez un p'tit coup de tambours et trompettes)

Las, si on comprend que Charles Michel ait voulu prendre tactiquement ses distances vis à vis du PS, s’écarter pour ne point apparaître une succursale de Di Rupo, fallait-il à ce point, par le “ton”, rappeler le Charles Michel excessif qui, jeune ministre wallon, se mit tellement à dos ses collègues PS qu’il fut pour beaucoup dans la rupture du pacte secret MR-PS à la Région wallonne ? Di Rupo se retrouvant même mis en minorité par la réaction négative de ses propres troupes , avec pour conséquence la fin de la stratégie qui mettre les sociaux-chrétiens ad vitam aeternam dans l’opposition…
Back to the future de l’agressivité, c'est une arme  qui vous explose parfois dans les mains en politique.
Las, fallait-il, à peine après l’avoir réintégré, déjà malmener le Front des francophones et ce après s’être plaint si longtemps d’en avoir été écarté par les partis de l’Olivier ?
Charles Michel, pour ses premiers pas présidentiels, donne subtilement l’impression étonnante de se les prendre dans le tapis. Faisant sourire sous cape ceux qui, derrière un Bacquelaine qui avait soigneusement choisi de s’abstenir à la réunion Michel-Bart, s’opposaient à sa prise de présidence.


Charles Michel apparaît pour l’heure comme un vaticinateur.
On l’a vu, à la télé, le visage tendu, affirmer “qu’il prenait acte de l’absence du FDF” au traditionnel Bureau du MR du lundi. Discours par trop vaporisateur médiatique puisque gonflant finalement encore- mais s’en rend-il compte ou est-ce le but ? - l’ampleur de la dissension interne…Et Gérard Deprez, qui a ses propres raisons cachées, de dénoncer celles qu'il prête lui-même à Maingain. Pénible.

 Mais il n’y a pas que ce flirt, électoralement dangereux, avec Bart De Wever qui fait problème chez nombre de MR. Pour des raisons qui tiennent assurément au vieux rêve d’une “alliance des droites” et à une stratégie électorale, voici que le nouveau président du MR surprend aussi son monde avec un virage très net, très accentué vers la droite.
 Comme si on avait déjà jeté aux orties le pourtant tout récent Manifeste doctrinal du MR, un texte baptisé “ Mieux pour tous” et souvent présenté à l’époque par les analystes comme un relatif “virage à gauche”, basé sur “ l'humanisme au coeur du message libéral depuis sa fondation”. Pour Didier Reynders, il s’agissait ainsi de se dresser clairement “contre la gauche conservatrice ou un populisme dangereux".
Comme ce populisme nationaliste de la N-VA qui aujourd’hui permet à Olivier Maingain d’en rajouter une couche de moraline qui fera que les choses ne seront plus jamais comment avant au sein du MR et même au delà.
Au PS, plus à l’écoute de la base populaire, on sait bien que l’image de la N-VA ne cesse d’apparaître, dans l’opinion wallonne, comme de plus en plus négative au fil des mois: jusqu’à perturber électoralement ceux qui feraient alliance avec ce qui apparaît à d’aucuns comme un parti de “nouvelle droite”.
Et après les sorties sans appel de Maingain- désormais malin patron d’un double FDF, le puissant bruxellois et le mini-wallon assurant ses arrières- on ne voit plus guère le MR, sauf à se scinder avant BHV, s’entretenir encore de façon privilégiée avec De Wever.

Il faut toujours rappeler que le MR n’est pas un parti au sens propre. C’est une coalition de trois mouvements politiques avec bien  plus que des nuances: un conglomérat fait d’adhésions successives, de ralliements hétéroclites, d’ajouts de candidats médiatiques et faiseurs de voix, débauchés dans les télés ou le foot…
Cela marche fort lorsque le Président est puissant, presque autocratique: comme un Jean Gol ou un Louis Michel, souverains absolus.( le champion du genre fut, Omer Vanaudenhove, l’ancien fondateur du PLP décidant seul d’une participation gouvernementale sans même un congrès de parti…)
Cela foire lorsque le pouvoir présidentiel se fragilise: le tandem Ducarme-Duquesne, par exemple.
Quel sera le modèle de présidence de Charles Michel ? Les jours qui viennent
photographieront pour longtemps la réponse, tant l’attaque du FDF et de certains MR
est contestataire d’une autorité toute fraîche. Qui est le vrai enjeu de cette guerre des boutons bleus qui vire à la schizophrénie désenchantée.
Tiens, il est une interview flamande  passée assez inaperçue: celle ou Didier Reynders, “fils spirituel et politique” de Jean Gol, n’excluait pas – genre on ne sait jamais- de revenir un jour pousser la manette des gaz pour reprendre les rênes du MR après un fiasco. 
Tiens, juste le parcours-bis qu’avait réalisé jadis un certain  Jean Gol…