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La politique, ce sont des
mots. Et des signes. Exercer le pouvoir, c’est s’emparer de ce double langage.
Ce n’est pas un hasard si
Albert 2 a dit son abdication debout. Ne plus s’asseoir à son bureau, c’était
le signe évident que là n’était déjà plus sa place.
Davantage dans le style
commedia dell’ Arte, Elio Di Rupo est un personnage tout aussi construit de
mythes et de signes, parfois jusqu’à l’excès. Dont ce fameux noeud-papillon
dont il est désormais prisonnier comme un oiseau de sa volière.
Frans Van Daele. |
Oui, le noeud de l’abdication
avait été choisi rouge rouche.
Tout comme, lors de sa
prestation de serment, déjà au Palais, devant Albert 2.
Rouge comme si Di Rupo, qui a
la stratégie de l’anticipation chevillée au corps, se disait que tout était
quelque part à commencer, comme en 2011. Car le départ d’Albert 2 et l’arrivée
du Roi Philippe cache un tellurisme politique: le départ de celui qu’on a
appelé le Vice-Roi, à savoir Jacques Van Ypersele de Strihou. Ce fervent
catholique charismatique et idéaliste qui, depuis 30 ans, de sa fine écriture,
avec une base de données à nulle autre pareille, influe quasi sur tout.
Ce n’est guère un secret pour
le microcosme de la rue de la Loi: le Roi Albert 2 a largement usé de ce que les hommes politiques appellent
entre eux la “méthode Bebert”, entendez l’avion militaire qui envoyait sans
cesse au soleil les dossiers ou arrêtés à signer.
A Laeken, sous des cieux
moins ensoleillés, c’est Van Yp’ qui s’y colle . Et décide qui le roi rencontre
ou ne rencontre pas. Qui prépare les audiences, les visites, les discours
royaux, les remarques aux projets de loi, jongle du jeu des nominations. Et,
surtout, exerçait un rôle-clé d’influence auprès du roi, qu’il s’agisse de
gérer Laurent ou Delphine. Ou de multiplier les tactiques pour freiner Bart De
Wever et la montée séparatiste en Flandre. Pour Di Rupo, c’est tout un pan de
ce paysage qui va basculer. Ainsi, le prochain chef de cabinet du Roi Philippe (Frans Van Daele)
sera-t-il flamand, histoire d’intégrer la monarchie dans les
nouveaux rapports de force; et peut-être plus, si on entend rétablir quelque
peu les équilibres philosophiques au sein du Palais.
Certes, le monde politique a
déjà bien pris ses marques: le prince Philippe n’est plus l’ “accident
monarchico-industriel “largement décrit par d’aucuns mais un roi soudainement
paré de toutes les qualités. C’est d’un monarchiste militant, Armand De Decker,
qu’est sans doute venu, involontairement, l’avertissement le plus angoissant
pour Di Rupo : “Philippe devra apprendre à se restreindre pour respecter toutes
les sensibilités".
Bien lire: "se
restreindre". De quoi avoir assurément le noeud-pap rouge pâle. Car l’effet-papillon insécurisant, Elio
déteste ça.