Raser gratis ? Cette expression viendrait d'un barbier qui avait placé jadis une pancarte proclamant ladite formule…Mais notre artisan, tout aussi fûté que près de ses sous, l'y laissait tous les jours. Par conséquent, le naïf qui, le lendemain du jour où il avait vu la pancarte pub, venait se faire raser ou couper les cheveux et qui s'étonnait de devoir quand même payer, s'entendait répondre : "Oui, mais il y a écrit que c'est demain que c'est gratuit !". Aujourd’hui encore, notamment en politique, les promesses des personnalités en vue n'engagent que ceux qui les écoutent sans faire appel à leur libre-examen…Ce n’est pas le cas ici. Où on s'efforce plutôt de manier le mot à couper la langue de bois .

dimanche 7 septembre 2014

Le Cercle des balconnières disparues (MBelgique du 22/08/2014)

 
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C’est un classique médiapolitique: en juillet-août, le belge en vacances s’intéresse bien plus à la météo de ses vacances qu’à celle de la rue de la Loi.
Pourtant, cet été, le bourgmestre d’Anvers Bart De Wever et sa majorité de prédilection (N-VA, CD&V et Open VLD) ont donné, mine de rien, un coup sec de sécateur très symbolique. Oh, ce n’est certes qu’un détail dans le budget d’une grande ville, mais très symbolique d’une certaine conception de la politique: la suppression totale du budget des jardinières-géraniums et autres paniers-pétunias-fleuris décorant traditionnellement les rues de la Métropole. Carrément éradiqués au RoundUp budgétaire. C’est le cercle des balconnières disparues. (#tributeRobinWilliams)

Pourtant, cet été, le nouveau Gouvernement flamand du N-VA Geert Bourgeois a, entre autres coupes budgétaires, décidé de saquer dur dans les budgets flamands si sensibles de la Culture, de la Jeunesse, des  Sports et de bien d’autres.

Oh, ce n’est pas que ce soit passé inaperçu, car c’est quelque part un avant-goût de qui peut se passer au fédéral avec l’arrivée au pouvoir des idées de la N-VA rue de la Loi. (ben oui, faudra  apprendre à ne pas sursauter en voyant Jan Jambon au JT en ministre de l’Intérieur et Théo Francken causer peut-être officiellement, au nom de l’Etat belge, d’Asile et d’Immigration)

Oh, face à la petite avalanche de critiques, le Premier Ministre N-VA du Nord, Geert Bourgeois, a même dû rentrer de vacances pour nuancer ses projets au Parlement flamand- mais, ramenons les choses à leurs proportions, c’est fort resté de la cuisine interne politique.



Les risques d’une opposition inflexible



Certes, les Mutuelles Chrétiennes du Nord ont hurlé, certes les Syndicats Chrétiens du Nord ont protesté, certes socialistes et écolos du Nord se sont égosillés. Mais, il ne faut pas être dupe: avec des ministres flamands proches de la démocratie-chrétienne comme Hilde Crevits et Jo Vandeurzen (le seul CD&V auquel De Wever dit faire une confiance quasi aveugle) la critique tenait plutôt de la musculation politique.

La démocratie chrétienne flamande- future seule tonalité de centre-gauche au gouvernement #suédois- rappelle juste aux leaders du CD&V qu’elle ne saurait oublier ceux qu’on appelle désormais les électeurs “BN”. Surtout lorsqu’il s’agira de négocier et finaliser le texte de ce qui sera la Bible fédérale gouvernementale (rien à voir avec les biscuits, c’est l’abréviation de beweging.net, le nouveau look de com’ des démo-chrétiens du Nord)

Quant aux écolos de Groen, ils tirent de plus en plus des rêves sur la comète en croyant pouvoir remplacer un jour le CD&V comme relais du Mouvement Ouvrier Chrétien flamand.

Chez les socialistes flamands, c’est encore plus limpide: l’ancien consultant de KPMG John Crombez (qui a appelé sa fille Babette) entend s’adjuger la présidence du parti en crise. Et ce par une stratégie, qu’on devine assez momentanée, de profilage très, très à gauche. Histoire de vraiment bien contraster avec Bruno Tobback, l’homme qui trouvait malin de se faire shooter-photographier BCBG devant son joli voilier.

Seule désormais dans l’opposition en Flandre (le Belang, laminé, est devenu inaudible), la gauche flamande aura d’ailleurs à y réfléchir à deux fois avant de poursuivre dans la voie de cette opposition-polarisation très crispée, sinon précipitée. Le risque pour elle de cette stratégie est clair: apparaître par trop inflexible, coupée des “réalités”.

Pour une majorité de flamands lambda, les Gouvernements flamand (formé) et fédéral (en salle d’accouchement) sont les coalitions dont ils rêvaient depuis longtemps.

On se moque ces temps-ci, en Flandre, du fameux plan “5-5-5” des libéraux flamands d’avant les élections. Il n’en reste en effet pour l’heure que quasi pouic de ce déluge de promesses électorales faites aux flamands. Mais un engagement est assurément tenu par le bloc des trois partis flamands partout au pouvoir qu’il s’agisse d’ Anvers, du gouvernement flamand, demain au 16 rue de la Loi: celle de dégraisser. Au produit mordant carrément industriel. Là, 65% électeurs du Nord obtiennent bel et bien ce qu’ils ont voulu, ce pour quoi ils ont voté.

Le gouvernement fédéral sortant, avec pourtant PS, MR et cdH comme solides composantes francophones, avait déjà souvent accepté de suivre nombre de volontés particulièrement chères à la Flandre. Et ce au nom du combat assez bidon du CD&V et de l’Open VLD contre la N-VA.

Aujourd’hui, forte de la puissance du nouveau “bloc flamand” (CD&V-OpenVld -N-VA) stratégiquement aggloméré par Bart par De Wever, la Flandre commune en arrive presque, dans son état d’esprit,  à oublier -ou à ne prêter guère d’importance- au fait que le gouvernement #suédoise sera largement minoritaire du côté francophone. (le MR seul en habits risqués d’alibi)

Ne pas s’y tromper: en cette rentrée, la Flandre, plus forte, plus dominante que jamais dans le cadre belge, vit plutôt en état de grâce. Même sans balconnières fleuries.



Michel HENRION