Bart de Wever a gagné à la Loterie politique.
Il sera sans doute bientôt, propulsé par le combustible BHV, l’immobilisme de Leterme et son ancrage local, le président du premier parti de Flandre. Ce qui mettra un sacré chabanais.
Donc, pour son slogan de campagne, la NVA a fait simple, en reprenant une thématique on ne peut plus classique, tellement utilisée qu’on se pince pour croire que çà puisse encore fonctionner, ce truc si éculé en com'.
“Nu durven veranderen” affiche la NVA,http://is.gd/c61aj ce qu’on peut traduire par “ Maintenant, oser le changement”.
Or, “ Oser” et “ changement” sont , depuis toujours, les mots chéris des hommes politiques, et ce dans tous les pays ou l’on bat campagne électorale.
Pour rester près de chez nous, en France, la défunte UDF, le RPR et itou des candidats PS ( notamment Segolène Royal ) ont usé largement de ces mots-clé.
D’ailleurs plutôt connotés au libéralisme dans leur utilisation, l’ancien premier Ministre français Edouard Balladur développant récuremment son thème favori : “ être libéral, c’est oser provoquer le changement”.
Chez nous, c’est amusant, c’est d’ailleurs exactement la même formule qui fut utilisée par le MR http://is.gd/c5OA7 lorsque Didier Reynders, président du MR, et Serge Kubla signèrent leur fameuse “ Lettre aux Wallons” publiée dans la presse du Sud du pays .
Le slogan de la NVA, et c’est encore plus étonnant, est d’ailleurs aussi kif kif le même que celui de Geert Lambert, ex VU, ex parti Spirit, ex parti SLP, aujourd’hui un des principaux leaders de “ Groen !”, les écolos groenlandais du Nord.
Bon, plus intéressante est donc sans doute la “baseline”, le slogan complémentaire de la NVA : “ Penser. Oser. Faire”.
Qui colle comme un gant à la ligne claire et à l’expression politique transparente, sans grande langue de bois ni faux fuyants, de Bart De Wever.
Qui est, dans le genre, très loin du “double langage” classique du CVP-CD&V.
De “Slimste Mens” de Flandre a décidé par ailleurs de personnaliser la campagne en s’affichant perso, col ouvert pour faire décontracté et pas trop etablishment de la Wetstraat, le tout colorisé couleurs de la Flandre.
Une technique de com’ électorale assez bien vue quand on peut se le permettre (Bart De Wever n’est pas sans charisme et hyper-populaire en Flandre, ou la télé l’a beaucoup aidé…) et qu’on ose jouer le coup. (Elio DiRupo, perso si populaire en Wallonie, ne s’y est prudemment jamais risqué pour le PS).
Une affiche qui se contente aussi d’être un rappel : pour l’efficacité du combat flamand, dit en fait la photo de De Wever, ne votez plus pour le Belang, ni la Lijst DeDecker (qui ne pourront rien faire) ni pour les partis traditionnels (flamands bien trop mous).
C’est, finalement, à l’observer, une démarche d'affichage assez retenue de la NVA qui , en communication, poursuit clairement trois buts : ne pas apparaître comme trop radical
( le mot séparatisme n’est pas utilisé), apparaître sérieux sur l’économique et le social – Bart De Wever parle aujourd’hui plus de cela en Flandre que de communautaire…- et jouer le pluralisme . Il se dit, à la NVA, que 500 nouveaux membres sont déjà arrivés dans la foulée de Siegfried Bracke, ce top journaliste de la télé flamande qui, outre le fait qu’il porte des noeuds-papillon ( tiens, çà rappelle cette autre célèbre affiche de la NVA avec le noeud papillon d’Elio Di Rupo…) et qu’il ait quatre orteils seulement à chaque pied, s’est toujours dit le coeur à gauche, ne pélérine pas à la Tour de l’Yser et s’affiche ouvertement franc-maçon …Un symbole de pluralisme à lui tout seul qui déclare qu’il est surtout en accord avec les “valeurs de société” du programme de la NVA, qu’il s’agisse des droits des femmes ou des homosexuels.
C’est vrai que la communication de la NVA ne va pas souvent sans bousculer les idées par trop reçues chez les francophones.
L’autre jour, un communiqué de la NVA m’a ainsi quelque peu étonné, dénonçant fort bien la persécution de deux homosexuels au Malawi, un pays d’Afrique soutenu par le gouvernement flamand (ou siège, pour rappel, déjà la NVA).
Cela dit, on ne pense pas que Bart De Wever, ignoré du Palais, sera informateur le 15 juin. Ni un jour Premier Ministre comme certains flamands le chuchotent dans des couloirs généralement plus crédibles (Bart De Wever est assurément bien plus cohérent que cela).
L’évidence c’est que Bart De Wever pourrait par contre se révéler un négociateur très, très intéressant. L’homme n’est pas un flamand romantique, mais un réaliste, un pragmatique pas tic tac.
La Nation flamande a son programme mais De Wever, qui connaît son “Commentariolum Petitionis” par coeur, ( la référence romaine du candidat aux élections…) est suffisamment habile pour comprendre qu’il y a encore des étapes.
Ce qui est le plus intéressant, je trouve, dans la com’ politique actuelle, c’est de repérer, dans le brouillard des formules creuses, nazes et convenues, les rares toutes petites phrases qui ont du sens.
Le PS Paul Magnette, qui ne s’exprime évidemment pas sur un tel sujet sans l’aval express du Boulevard de l’Empereur, a, de ce point de vue, dégagé une piste en dédramaturgeant il y a peu la NVA et en la considérant comme totalement fréquentable…
Ce qui est autre manière de dire qu’en politique, seuls les rapports de force comptent.
Combien de divisions, Bart ?